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Retour sur une ironie mal comprise
©Reuters

Cas d'école

Un établissement scolaire juif incendié à Marseille et les commentaires prennent feu !

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

Voir la bio »

Commençons brutalement. C’est une des plus célèbres histoires juives de l’époque de la défunte Union soviétique. Du temps de Brejnev, quand les Juifs étaient durement persécutés. À minuit, Moïshé passe sur la place Rouge de Moscou. Soudain un véhicule noir du KGB s’arrête. Les portes arrière de la fourgonnette s’ouvrent. Et un corps est jeté sur la chaussée. Le véhicule repart. Moïshé a peur. De loin il entend des gémissements :" Oï, oï, oï !"

Il s’approche quand même. Dans le noir, il entraperçoit des traces de sang et de coups sur le corps qui gémit. Il s’approche encore. "Non, non, non !" crie la victime martyrisée. Moïshé s’approche encore et reconnaît son vieil ami Abraham. Terrorisé et croyant avoir affaire à un de ses bourreaux, ce dernier hurle : "N’approchez pas !" Alors Moïshé lui dit : "Mais Abraham, c’est moi, Moïshé. Souviens-toi, nous étions ensemble à Auschwitz." Abraham lâche alors un extatique soupir, plein de nostalgie : "Ah, Auschwitz…"

Elle est affreuse, cette histoire ? Non. Il s’agit simplement d’une histoire juive. Les Juifs ont une longue mémoire remplie de leur destinée tragique. Depuis la nuit des temps, ils ont souffert, ont été massacrés et persécutés. Pour pouvoir respirer et garder la tête haute, ils ont inventé un humour, l’humour juif, à nul autre pareil. Il est fait d’autodérision et mêle le rire et les larmes. Il a parfois une apparence cynique et détachée. En réalité, il participe de la plus belle façon qui soit à un manuel de survie.

Atlantico a publié un article de moi sur une école juive incendiée à Marseille. Ce texte était erroné non pas dans l’énoncé des faits, bien réels, mais dans les dates. Une mauvaise transcription de mail m’a fait croire que l’événement s’était passé récemment, alors qu’il avait eu lieu il y a quelques années. Mais ce n’est pas cela qui m’est reproché.

Mon article serait antisémite. Insultant pour les Juifs et leurs malheurs. Allons donc ! il est simplement inspiré – d’où son apparente désinvolture – par la blague juive du temps de Brejnev et par tant d’autres histoires juives du même ton. Manifestement il n’a pas été compris par certains. Pour ceux-là je demande à Atlantico d’améliorer son code typographique. Au point d’exclamation, au point d’interrogation il se devra d’ajouter, et donc d’inventer, un point d’ironie.

Encore une histoire juive pour terminer. Contemporaine et française, celle-là. Au huitième étage d’une tour HLM habite une famille "mixte" : le père est juif, la mère arabe. Les parents sont au salon et regardent la télé. Leur gamin est à la fenêtre et regarde en bas. Il hurle : "Papa, maman, je suis juif ou arabe ?" Les parents ne répondent pas, rivés qu’ils sont au petit écran. Le gamin hurle de plus belle : "Papa, maman, je suis juif ou arabe ?" Les parents, excédés : "F***-nous la paix !" Le gamin hurle encore : "Papa, maman…" Les parents, n’en pouvant plus : "Et pourquoi t’as besoin de savoir ça ?" Le gamin : "C’est à cause du scooter qui est en bas de l’immeuble. Je veux savoir si je le marchande ou si je le vole."

Cette histoire est-elle antisémite ? Anti-arabe, peut-être ? Les deux à la fois ? Non. Juste une histoire juive. Il me faut préciser que cet article a été écrit un vendredi soir, soir de Shabbat. C’est pas trop grave, j’espère…

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