Réforme du collège : enfumage et matraquage, les deux mamelles de l’Éducation nationale<!-- --> | Atlantico.fr
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Najat Vallaud-Belkacem veut réformer le collège.
Najat Vallaud-Belkacem veut réformer le collège.
©Reuters

Des ombres au tableau

Pendant que les latinistes s’émeuvent de l’assassinat programmé de la culture des humanités et que d’illustres profs d’allemand -JM Ayrault- interpellent la Ministre sur ses intentions, Najat Vallaud-Belkacem avance sur le reste de ses projets…

Emmanuelle  Ory-Lavollée

Emmanuelle Ory-Lavollée

Emmanuelle Ory-Lavollée n’est ni grande, ni blonde, ni fashion victim… elle n’a pas de toutou, ni de 4×4, ne trie pas ses ordures. Elle fume parfois et s’accorde même un petit verre de temps en temps.

Comme les vaches, elle regarde passer le train de la vie politique et sociale française, qui à maints égards et tour à tour la consterne, la révolte ou l’amuse…

Emmanuelle Ory-Lavollée anime le blog 2quoijmemêle.com.

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Le sourire d’ange de la jeune femme cache une formidable détermination à tuer chez nos jeunes gens toute opportunité de construire leur avenir et leur intelligence sur un socle culturel solide. C’est ainsi que l’on distordra, entre autres, l’Histoire de France pour ne livrer aux gamins encore malléables qu’une bouillie mondialiste teintée des obsessions de la Ministre et de ses camarades : le cabas idéologique des "valeurs de la république", l’égalité sexuelle et l’omniprésente et mortifère laïcité elle-même inséparable de l’auto-flagellation.

Le conseil supérieur des programmes vient de valider la programmation concernant le cycle 4, soit les élèves de 5e, 4e et 3e. Il n’a pas échappé à nos "instructeurs" que cet âge est une période bénie pour engraisser l’enfant d’une idéologie prémâchée, comme en témoigne une des phrases du préambule : "Lors des trois ans de collège du cycle 4, l’élève qui est aussi un adolescent en pleine évolution physique et psychique, vit un nouveau rapport à luimême, en particulier à son corps, et de nouvelles relations avec les autres. Les activités physiques et sportives, l’engagement dans la création d’événements culturels favorisent un développement harmonieux de ce jeune, dans le plaisir de la pratique, et permettent la construction de nouveaux pouvoirs d’agir sur soi, sur les autres, sur le monde".

Serait-ce une publicité pour du coaching ? Nulle part il n’est question d’apprentissage, de culture, ni de connaissance, moins encore de travail dans cette phrase qui en dit long sur la philosophie du programme de ce nouveau collège. On y recherche la construction de pouvoir dans le plaisir et l’harmonie. Si avec ça les enfants n’y vont pas en courant… c’est que la cause est perdue, il faudra fermer les écoles !

En fin stratège, NVB a bâti sa communication sur les idées magiques que sont l’autonomie des collège sur une partie des programmes, l’accompagnement personnalisé, un pseudo-renforcement des langues vivantes et l’invention révolutionnaire de l’interdisciplinarité pour mieux éliminer certaines matières (le latin par exemple). Toute objection est, bien entendu, nulle et non avenue. Il est faux de dire que le latin ou le grec ne seront plus enseignés, car on évoquera les civilisations anciennes dans le cadre de l’interdisciplinarité. Il est également malhonnête de s’interroger sur le progrès que représente l’arrivée de la langue 2 en cinquième. Ce qui est vrai en revanche, c’est que l’on porte un coup fatal au prétendu élitisme des classes de latinistes et de germanophones, comme aux classes européennes qui seront supprimées sans autre forme de procès. Toutes choses parfaitement logique quand on ne veut voir qu’une tête, farcie d’un magma identique de préférence. C’est la justice scolaire.

Les 60 pages de ce programme recèlent bien des surprises. En Histoire par exemple, les thèmes abordés au cours du collège sont composés de chapitres obligatoires et d’autres laissés à l’appréciation de l’enseignant. Dans le Thème numéro 1 enseigné en 5e qui concerne le Moyen-âge, l’Islam (débuts, expansion, société et cultures) est un enseignement obligatoire, l’item concernant le christianisme "société rurale encadrée par l’église" est facultatif. De même, en quatrième, le passage de la traite négrière -dans le cadre de la domination européenne-, à la révolution française n’envisage pas de détour obligatoire par le siècle des lumières. L’engagement féministe de la rue de Grenelle n’est pas en reste : "les femmes au cœur d’une société qui change » facultatif, ou encore « les françaises et les français en république de 1944 à nos jours ». On passera sur les formulations très « novlangue » concernant l’enseignement moral et physique : « Comprendre la diversité des sentiments d’appartenance civiques, sociaux, culturels, religieux. Comprendre les enjeux, de la laïcité (liberté de conscience et égalité des citoyens). Expliquer les différentes dimensions de l'égalité, distinguer une inégalité d'une discrimination. Différencier son intérêt particulier de l’intérêt général, ou encore s’appuyer sur des données biologiques pour mettre à distance les préjugés et les stéréotypes."

Le programme est un modèle de jargon qui demande une extrême concentration –ou un niveau d’études très élitistes ?-  En langue de l’éducation nationale : nager devient  « construire la capacité à "traverser" l’eau avec le moins de résistance en équilibre horizontal par immersion prolongée de la tête . Ca ne s’invente pas et ça questionne.

Car c’est de cela qu’il s’agit, l’élève ne doit plus apprendre, ni comprendre, il doit questionner : questionner un texte, questionner son rapport au monde, au corps, questionner une langue, questionner une civilisation ou des savoirs interdisciplinaires. C’est bien logique étant donné le relativisme qui sous-tend tout l’échafaudage. Les réponses proposées ne sont plus du domaine de la connaissance mais de l’idéologie.

Cette réforme n’est pas du goût des enseignants dont une intersyndicale (FSU, FO, CGT, SNALC, CGT, Sud) appelle à la grève le 19 mai prochain. Ce n’est pas  le douteux contenu des programmes qui les heurte, mais plus une nouvelle organisation qui multiplierait les hiérarchies et mettrait en concurrence les disciplines, les enseignants et les établissements entre eux.

Au même moment, un rapport de la Cour des Comptes dénonce la gabegie du  système de formation des enseignants, qui forme toujours moins en dépit d’une dotation importante (3,5 jours de formation par enseignant/an contre 8 en moyenne dans les pays de l’OCDE). Les enseignants eux-mêmes se disent déçus par ce qui leur est proposé, un déchiffrage des réformes successives plus qu’un réel accompagnement dans leurs problématiques pédagogiques.

Après les grèves d’usage, des promesses de création de postes et quelques hochets de nature à calmer la grogne enseignante, la réforme entrera en vigueur pour le plus grand malheur de nos enfants qui n’échapperont pas à cet écœurant matraquage.

Et comme après chaque nouvelle réforme de l’éducation, les quelques vernis qui le peuvent se dirigeront vers les écoles privées qui affichent encore la volonté de transmettre de la connaissance.

C’est aussi ça la justice scolaire.

>>>>>>>>>>>>>>> Voir le programme de réforme ici <<<<<<<<<<<<<<<<<

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