Réforme de la justice : plaignant ou accusé, ce que va changer le projet du gouvernement pour les justiciables lambda<!-- --> | Atlantico.fr
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La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, et le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, le 20 mars.
La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, et le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, le 20 mars.
©ERIC FEFERBERG / AFP

Evolution

Le projet de loi de programmation de la justice 2018-2022 était présenté ce vendredi 20 avril en conseil des ministres​. Son l'objectif, selon la ministre de la Justice Nicole Belloubet, est de rendre la justice "plus simple et plus efficace".

Gérald Pandelon

Avocat à la Cour d'appel de Paris et à la Cour Pénale Internationale de la Haye, Gérald Pandelon est docteur en droit pénal et docteur en sciences politiques, discipline qu'il a enseignée pendant 15 ans. Gérald Pandelon est Président de l'Association française des professionnels de la justice et du droit (AJPD). Diplômé de Sciences-Po, il est également chargé d'enseignement. Il est l'auteur de L'aveu en matière pénale ; publié aux éditions Valensin (2015), La face cachée de la justice (Editions Valensin, 2016), Que sais-je sur le métier d'avocat en France (PUF, 2017) et La France des caïds (Max Milo, 2020). 

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Guillaume Jeanson

Guillaume Jeanson

Maître Guillaume Jeanson est avocat au Barreau de Paris. 

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Atlantico : Le projet de loi de programmation de la justice 2018-2022 était présenté ce vendredi 20 avril en conseil des ministres​, et son l'objectif, selon la ministre de la Justice Nicole Belloubet, est de rendre la justice "plus simple et plus efficace". En prenant le point de vue du justiciable, que celui ci soit accusé ou plaignant, quels sont les secteurs ou la situation pourrait s'améliorer, ceux ou elle pourrait se détériorer et là ou elle resterait la même ? 

Guillaume Jeanson : Ce projet de loi comporte de nombreuses modifications assez techniques. Il est donc impossible de prétendre sérieusement ici être exhaustif. Ce que l’on peut dire de manière très générale est que cette réforme comporte quelques éléments intéressants qui devraient faciliter le travail des enquêteurs et fluidifier certaines phases de la procédure. Il ne constitue pas cependant le grand soir que certains auraient pu attendre et, à cet égard, on peut estimer qu’il manque encore cruellement d’ambition.

Pour tenter de répondre plus précisément à votre question, je m’efforcerai de pointer plusieurs éléments parmi ceux qui m’apparaissent les plus emblématiques. Prenons d’abord le cas du tribunal criminel départemental. Le projet de loi de programmation de la justice envisage l’expérimentation du "tribunal criminel départemental" "dans certains départements" pour juger les crimes punis de 15 à 20 ans d’emprisonnement. C’est à dire pour "57 % des affaires actuellement jugées par les cours d’assises". Ces tribunaux criminels seront composés de cinq magistrats. Les cours d’assises continueront en revanche à juger les crimes punis de plus de vingt ans de prison, ainsi que l’ensemble des crimes en appel. Cette nouvelle juridiction qui se passera donc de jurés (alors que les rapports des chantiers de la justice avaient pu envisager d’en garder quand même un ou deux) hérisse bon nombre de praticiens mais ne manque pas d’être saluée par d’autres personnes, notamment par l’éminent professeur de droit pénal Jean Pradel qui est venu récemment relativiser l’importance accordée aujourd’hui au jury dans les pays étrangers. Il semblerait en effet que le caractère symboliquement intouchable de cet « acquis » de la révolution française connaisse aujourd’hui un net recul tant en France qu’à l’étranger. L’autre conséquence essentielle d’une telle réforme devrait être de limiter enfin la pratique révoltante des correctionnalisations. Celles qui veulent que, pour désengorger les cours d’assises saturées, on décide de juger un crime comme un simple délit devant le tribunal correctionnel. Ce sont ce type de pratique qui font que chaque année deux viols sur trois ne sont pas jugés pour ce qu’ils sont mais au contraire comme de simples agressions sexuelles, ce qui est évidemment inacceptable et constitue, à ce titre au moins, une amélioration pour les victimes.

Du côté des peines, la fameuse contrainte pénale de Christiane Taubira est supprimée. Elle fusionne avec le sursis mise à l’épreuve qui lui était proche, pour former désormais le sursis probatoire. L’emprisonnement de moins d’un mois est interdit, les peines de plus d’un an cessent d’être immédiatement aménageables et pour certains délits tels que l’usage de stupéfiant, une amende forfaitaire délictuelle sera créé. Bien que la loi prévoyait jusqu’ici une peine d’un an d’emprisonnement, ce dernier dispositif d’amende tend étonnamment à davantage de sévérité. En effet, la pratique montre que les réponses pénales les plus fréquentes pour usage de stupéfiants demeurent de simples rappels à la loi. Sur ce point, il n’est pas certain que les justiciables y gagnent. Pas tant pour la question de la sévérité qui pourrait au moins induire une meilleure dissuasion face à des comportements à risque, mais surtout parce que devant les toxicomanes, une réponse comprenant à la fois un volet coercitif et un volet sanitaire demeure sans doute,dans bien des cas, préférable. Cette amende forfaitaire pèche par absence d’individualisation et de progressivité intelligente. Sauf à laisser bien sûr les policiers arbitrer sur le terrain pour savoir dans quels cas elle semble inadaptée, mais ce qui pourra alors se transformer en une tolérance tacite sur certaines zones où on préférera courageusement acheter la paix sociale.

Enfin, il faut garder à l’esprit que cette réforme de la justice ne pourra que produire des effets limités dès lors qu’aucun effort important ne sera fait du côté de la pénitentiaire pour construire des places de prison en nombre suffisant. Aujourd’hui de nombreuses peines d’emprisonnement sont exécutées de longs moins après avoir été prononcées car les prisons françaises sont saturées. Le Président de la république qui s’était engagé à la création de 15.000 nouvelles places de prison a déclaré le mois dernier qu’il n’en construirait finalement que la moitié sur ce quinquennat. Le projet ambitionne certes de faciliter la création de places de prison en autorisant notamment le recours à "la procédure d’expropriation d’extrême urgence", et la cession gratuite de terrains des collectivités territoriales. Mais devant une situation carcérale actuelle se dégradant rapidement, le problème reste celui de ce trop faible nombre annoncé par le Président. Il ne réglera certainement pas en effet cet embouteillage de l’exécution des peines qui décrédibilise la justice pénale en bloquant l’exécution de ses décisions. Sur ce point, vous l’aurez compris, il est donc à craindre que la situation reste la même.

Gérald Pandelon : Je dois d'emblée vous avouer mon scepticisme face à ce salmigondis que constitue encore cette nouvelle réforme de la procédure pénale, mais pas seulement, qui, encore une fois, ne servira à rien, sinon à rendre encore, à rebours des intentions affichées, la justice encore moins lisible, plus lointaine, moins humaine, en définitive. Chaque année, en la matière, les choses semblent se détériorer ; à telle enseigne que l'on peut se poser la question de savoir si l'histoire de la justice pénale a un sens, au double sens d'une direction et d'une signification. Et, pour s'en convaincre, il apparaît nécessaire de reprendre en quelques lignes ce que furent depuis ces dernières années les procédures pénales engagées pour mesurer combien il ne s'agit, au fond, là encore, que de démagogie.  Ce qui heurte le plus, c'est surtout l'absence de cohérence, lorsque l'on se penche sur l'évolution de notre justice pénale, qui semble osciller entre un laxisme relatif des textes et une sévérité absolue des pratiques. En effet, depuis plusieurs années, notre procédure pénale connaît une évolution paradoxale. Car si notre justice répressive a souhaité s’orienter vers davantage d’empathie envers les personnes mises en cause, au nom d’un traitement accéléré des procédures tout comme une meilleure appréhension de la peine, force est d’admettre que cette évolution que les profanes auraient pu qualifier de laxiste a, en réalité, cédé la place à une intransigeance judiciaire qui tranche avec l’évolution des textes. En effet, depuis l’année 2014, les diverses réformes pénales impulsées ont eu pour préoccupation essentielle non seulement de simplifier les procédures mais également de désengorger les tribunaux ; enfin, d’assurer la préservation des droits de la défense. C’est ainsi que Madame Taubira, Garde des Sceaux, avait souhaité faire le pari d’une intelligence collective, insistant sur sa volonté de "repenser le système judiciaire dans sa globalité". D’abord, par une simplification des procédures (ce qui n'est donc pas nouveau...). Ainsi, parmi les pistes envisagées ne concernant pas spécifiquement la matière pénale, la ministre de la justice avait appelé de ses vœux la création d'un guichet universel qui aurait recueilli toutes les démarches entreprises par le justiciable quelle que soit la juridiction. De même, elle inspirait le développement de plates-formes en ligne afin de répondre aux principales questions que se posaient les justiciables ou encore instaurait la centralisation de l'ensemble des démarches quelle que soit la nature du contentieux. Une autre évolution devait inspirer l’action de la ministre : que les magistrats fournissent un effort pour rédiger les jugements de façon plus accessible, estimant, à juste titre, qu’il fallait être "plus pédagogue". Toutefois, concernant la justice pénale, une véritable réflexion de fond était à l’œuvre. La principale innovation concernait la création de la mesure de contrainte pénale visant à créer une nouvelle peine en milieu ouvert et non plus en prison. Ce dispositif devant astreindre le condamné à un ensemble d'obligations et d'interdictions ainsi qu'à une surveillance continue, afin de prévenir la récidive, tout en favorisant la réinsertion, maîtres-mots du texte. Le texte initial prévoyait que cette peine de probation s'appliquerait aux faits passibles de cinq ans de prison au maximum. Mais la commission des lois, sans doute influencée par les valeurs personnelles du ministre de la justice, avait adopté, dans un premier temps, un amendement visant à étendre cette peine à tous les délits, et ce, jusqu'à dix ans encourus. Si ce dernier était, en effet, soutenu par Madame  Taubira, l'exécutif avait fait savoir qu'il y était hostile. Un compromis devait finalement être trouvé : la contrainte pénale serait réservée aux délits susceptibles d'être punis de cinq ans d'emprisonnement maximum à compter du 1er janvier 2015, avant d'être étendue à tous les délits à partir du 1er janvier 2017. Selon l'étude d'impact, 8000 à 20.000 contraintes pénales devraient être prononcées chaque année. Mais l’ancien chef de l’Etat, M. François Hollande, avait souhaité également que fût supprimé les peines planchers concernant les récidivistes et les auteurs de violences aggravées, instaurées par la droite au cours des années 2007 et 2011. À gauche, cette procédure était jugée responsable d'un allongement de la durée des peines et d'une hausse de la surpopulation carcérale. Le nombre de détenus était, en effet,  passé de 58.000 à 68.000 entre 2007 et 2014. Face à ce bilan négatif, le gouvernement estimait donc nécessaire de restaurer le principe d'individualisation des peines. Il supprimait aussi les révocations automatiques de sursis. C’est ainsi que la loi du 14 août 2011 venait supprimer les "peines planchers", introduites dans la législation en 2007. En vertu de la loi du 10 août 2007, les crimes ou délits commis en état de récidive ne pourraient plus être punis d’une peine d’emprisonnement ou de réclusion inférieure à certains seuils, fixés par la loi et proportionnels au maximum encouru. La loi du 14 août 2011 avait d’ailleurs étendu ce dispositif de peine minimale à la répression des violences les plus graves, même lorsqu’elles n'étaient pas commises en état de récidive.

Si cette évolution a pu susciter des réactions fort contrastées, plus consensuelle fut l’idée de cette même garde des Sceaux d’une possible césure pénale lors des audiences. Dans ce cadre, la juridiction appelée à statuer aurait pu prononcer la culpabilité et des mesures d'indemnisation des victimes lors d'une première audience tout en renvoyant sa décision sur la peine à une seconde audience pour avoir davantage d'informations sur la personnalité et la situation de l'auteur. La nouvelle audience devant se tenir dans un délai maximal de quatre mois et de deux mois en cas de placement en détention provisoire. Ce délai pouvant être prolongé d'une nouvelle durée de quatre mois si elle n'avait pu se tenir. Mais c’est le droit de l’exécution des peines qui aura été le plus profondément remanié, notamment, à mon sens, le mécanisme de libération sous contrainte. En effet, la libération sous contrainte vient redéfinir les clauses de la mise en liberté d'un condamné avant l'expiration de sa peine. L'exécutif décidait ainsi d'évaluer la situation des détenus aux deux tiers de leur condamnation avec un objectif clairement affiché : lutter contre les sorties sèches d’incarcération, c'est-à-dire sans mesures d'accompagnement, celles-ci correspondant actuellement à 80% des sorties ; un taux pouvant toutefois s’élever à 98% pour les peines de moins de six mois. Selon le parcours et le projet d'insertion, une libération sous contrainte pourrait être décidée par le juge de l'application des peines (JAP), comportant des mesures de restriction, d'obligation et/ou de surveillance. Mais, en même temps, Mme TAUBIRA, s’est attachée à renforcer les droits des victimes avec la possibilité, d’une part, pour elles de saisir la justice de ce qu'elles estimaient être une atteinte à leurs droits en cours d'exécution de peine, d’autre part, en instaurant un dispositif de justice restaurative permettant, sur le fondement du volontariat, à des victimes et auteurs d'infractions de se rencontrer pour aider les uns à «se réparer» et les autres à «prendre conscience» du préjudice causé. C’est ainsi que, sans doute pour désengorger encore davantage nos juridictions et accélérer le traitement des procédures s’agissant de délits sans grande gravité, certains délits étaient transformés en contraventions. C’est ainsi que, par exemple, était érigé en exemple l'absurdité d'un conducteur qui aurait été arrêté deux fois pour conduite sans permis, sans toutefois provoquer d'accident, devant comparaître devant le tribunal correctionnel ; l’idée pouvant aller jusqu’à une contraventionnalisation de l'usage de stupéfiants préconisée d’ailleurs également par l'ancien Procureur Général près la Cour de cassation, M. Jean-Louis Nadal, dans son rapport. D’autres mesures importantes étaient également décidées en matière d’aménagement de peine, notamment : la motivation renforcée des décisions de condamnation à un emprisonnement ferme (art. 3) – 1er octobre 2014. L’emprisonnement devenant ainsi l’exception, selon les termes de l’article 132-19 du Code pénal tel qu’issu de la loi. Les magistrats étant tenus désormais de motiver « spécialement » leur décision de condamnation à de l’emprisonnement ferme, « au regard des faits de l’espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale » ; mais également la détermination de la peine d’amende (art. 3) – 1er octobre 2014. La peine d’amende devant strictement être déterminée « en tenant compte des ressources et des charges de l’auteur de l’infraction », selon le nouvel alinéa 2 de l’article 132-20 du Code pénal. En outre une extension des mesures de contrôle du condamné (art. 9) était annoncée – 1er octobre 2014. Les condamnés dont la peine étaient aménagées étant tenus, en plus des obligations préexistantes énoncées à l’article 132-44 du Code pénal, d’obtenir l’autorisation du JAP pour tout changement d’emploi ou de résidence de nature à mettre obstacle à l’exécution de ses obligations, et d’informer le JAP de tout déplacement à l’étranger ; mais également nous assistions à une extension des obligations auxquelles le condamné pouvait être soumis (art. 9 et 10) – 1er octobre 2014 ; tout comme la disparition de la possibilité de ne prononcer qu’une seule fois la révocation partielle du sursis était décidée (art. 11) – 1er octobre 2014 ; cette loi abrogeant l’alinéa 1er de l’article 132-49 du Code pénal qui limitait à une seule fois la possibilité d’attribuer la révocation partielle d’un sursis. Autre originalité, la possibilité d’ajourner le prononcé de la peine (art. 5 et 6) – 1er octobre 2014. D'ailleurs, le Code pénal était complété des articles 132-70-1 à 132-70-3 afin de permettre à la juridiction de jugement de décider de diligenter des investigations complémentaires à l’égard de la personne condamnée afin d’individualiser au mieux la peine devant être exécutée ; ainsi que la faculté de solliciter la consignation d’une somme d’argents à fin de paiement de l’amende dont le montant serait déterminé après les investigations ; en outre, était instauré des procédures simplifiées d’aménagement des peines pour les condamnés incarcérés (art. 46 et 54) – 1er janvier 2015. La loi venant ainsi abroger les procédures simplifiées d’aménagement des peines pour les condamnés incarcérés, à savoir les articles 723-19, 723-20, 723-22, 723-24 à 723-27 du Code de procédure pénale. Enfin, la disparition de l’aménagement automatique des fins de peine (art. 46 et 54) – 1er janvier 2015 était décidé puisque les dispositions contenues à l'article 723-28 du Code de procédure pénale, qui prévoyait l’aménagement automatique des fins de peine, étaient abrogées. A cette politique pénale empreinte d’empathie aussi  bien pour les délinquants et les victimes, tout comme en direction des justiciables, allait se substituer celle, plus réaliste, dictée par l’état d’urgence, en réaction aux attentats de Paris courant de l’année 2015. C’est ainsi que parmi les dispositions majeures et controversées du projet de loi figurait la possibilité, lors d’un contrôle d’identité, de retenir, en cas de soupçons de terrorisme, une personne pendant quatre heures pour vérifier sa situation. Ou encore celle d’assigner à résidence pendant un mois des individus de retour de « théâtre d’opérations de groupements terroristes », comme la Syrie, mais à l’encontre desquels il n’y aurait pas d’éléments suffisants pour justifier une mise en examen. Le texte élargissait ainsi les moyens à la disposition du procureur et de la police judiciaire pour mener des enquêtes. Après autorisation du juge des libertés et de la détention, le procureur pouvant désormais ordonner des écoutes téléphoniques, de la vidéosurveillance, des captations de données informatiques ou des perquisitions de nuit, autant d’outils jusqu’ici réservés au juge d’instruction dans le cadre d’une information judiciaire. C’est ainsi que les juges pourront également prononcer des peines de sûreté de trente ans, au lieu de vingt-deux actuellement. Aucun aménagement de peine n’étant envisageable avant cette date. De plus, un nouveau délit de consultation habituelle de sites Internet terroristes était passible d’une peine de deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Mais afin toujours de mêler les vents contraires du laxisme et de la sévérité, d'autres dispositions voyaient le jour, hors terrorisme :

Le trafic d’armes. La lutte contre le trafic d’armes est renforcée par le durcissement des sanctions pénales, et par la possibilité offerte aux services d’enquête de recourir à des achats illégaux pour pénétrer les réseaux, comme c’est le cas pour les stupéfiants ;

L’usage des armes. Un nouveau régime d’irresponsabilité pénale bénéficierait aux policiers et gendarmes. Ils auraient le droit de faire usage de leur arme en cas « d’absolue nécessité », en présence d’un « périple meurtrier », afin d’éviter la réitération d’une attaque meurtrière ;

L’argent du crime. La lutte contre le blanchiment d’argent était durcie, les paiements par carte monétaire rechargeable au porteur étaient interdits. Tracfin, la cellule antiblanchiment de Bercy, pourrait prévenir les banques de comptes à survbeiller. Un délit de trafic de biens culturels issus de pays en guerre était créé ;

Les outils d’enquête. Les juges d’instruction et les procureurs pourraient recourir, dans le cadre d’enquêtes en matière de criminalité organisée, aux IMSI-catchers, des antennes qui captent toutes les données de communication dans un rayon donné ;

Le statut du témoin sous X. La justice pourrait écouter et faire témoigner aux procès des témoins sous X. Un changement d’identité, une protection et une aide pourront leur être accordé ;

La gestion des grands événements. Pour des manifestations du type Euro de football, une enquête administrative serait menée sur le personnel recruté, même à titre temporaire ;

Notre procédure pénale. Les pouvoirs d’enquête du parquet étaient renforcés. Des garanties supplémentaires étant apportées au justiciable dès l’enquête préliminaire, avec la possibilité d’introduire le débat contradictoire sans attendre le juge d’instruction.

Mais c’est surtout la réforme de la prescription en matière pénale qui par la loi n°2017-242 du 27 février 2017 donnait l’occasion de faire un point sur les règles applicables en la matière. Une loi qui se donnait pour but de rétablir un peu d’ordre dans le maquis des règles de la prescription engendré par la jurisprudence et l’inflation législative. En effet, le nouveau dispositif modifie profondément les règles de la prescription de l’action publique : le texte double le délai de prescription de droit commun en matière délictuelle et criminelle, qui passe à 6 ans pour les délits et à 20 ans pour les crimes. En revanche, le délai de prescription en matière contraventionnelle demeure fixé à 1 an. Toutefois, les délais dérogatoires de prescription ne sont pas modifiés. Il en va notamment ainsi pour le délai de 30 ans en matière criminelle (crimes contre l’espèce humaine, crimes terroristes, trafic de stupéfiants...) et pour le délai de 20 ans en matière correctionnelle (délits terroristes, trafic de stupéfiants…).

Toutefois, les règles spécifiques aux infractions commises sur des mineurs demeurent également inchangées. Néanmoins, 2 régimes dérogatoires sont supprimés : celui relatif aux infractions commises sur des personnes vulnérables, et celui relatif au discrédit jeté sur une décision de justice. Ces infractions seront désormais soumises au délai de prescription de droit commun. De même, les crimes contre l’humanité demeurent les seuls crimes imprescriptibles. Et s’agissant des crimes de guerre, leur régime de prescription n’est pas aligné sur l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité. Ils deviennent, en revanche, imprescriptibles lorsqu’ils sont justement connexes aux crimes contre l’humanité. S’agissant surtout du point de départ des délais de prescription de l’action publique et notamment du cas particulier des infractions occultes, le texte crée un nouvel article 9-1 du Code pénal consacrant le report du point de départ du délai de prescription pour les infractions criminelles, correctionnelles et contraventionnelles dites occultes ou dissimulées, tout en définissant désormais ces infractions. Ainsi, le texte dispose : « Est occulte l’infraction qui, en raison de ses éléments constitutifs, ne peut être connue ni de la victime ni de l’autorité judiciaire. Est dissimulée l’infraction dont l’auteur accomplit délibérément toute manœuvre caractérisée tendant à en empêcher la découverte ». Sont ainsi considérées comme occultes et/ou dissimulés : l’abus de confiance, l’abus de bien social, le trafic d’influence, la fraude fiscale, la prise illégale d’intérêts. Pour ces infractions, le délai de prescription de l’action publique court à compter du jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique. Toutefois, afin d’éviter une imprescriptibilité de fait de ces infractions, la loi créé un délai butoir de 12 ans en matière délictuelle et de 30 ans en matière criminelle, énoncé de la manière suivante aux termes de l’article 9-1 alinéa 3 concernant les infractions occultes et dissimulées : « sans toutefois que le délai de prescription puisse excéder douze années révolues pour les délits et trente années révolues pour les crimes à compter du jour où l’infraction a été commise ».  Aujourd’hui, les pistes de réflexion de notre nouvelle garde des Sceaux, Madame Nicole BELLOUBET s’inspirent donc largement de l’œuvre accomplie précédemment puisque, s’agissant de la procédure pénale, seuls deux chantiers, déjà largement explorés, sont retenus ; à savoir, une simplification de la procédure pénale (thème récurrent), et une simplification de la peine, dans la continuité de l’œuvre de Madame TAUBIRA, qui déclarait courant 2013 : « La prison est nécessaire, mais elle ne peut pas être la seule peine nécessaire ». Autrement dit, qu’on l’accepte ou le déplore, et à rebours des multiples critiques dont a pu faire l’objet son prédécesseur, force est d’admettre qu’en dépit du caractère parfois erroné de certaines des dispositions pensées par cette ancienne ministre de la justice, la procédure pénale qu'elle a impulsée sert aujourd'hui de modèle à Madame BELLOUBET ; que, par conséquent, ce qui aura échoué auparavant échouera encore maintenant ; en réalité, il n'existe pas de vision, qu'au fond,  un esprit des lois a cédé la place à des lois sans esprit…

Si l'augmentation de budget du ministère atteint 1.6 milliard d'euros en 5 ans, passant de 6.7 à 8.3 milliards d'euros, cette progression n'est finalement que légèrement supérieure à celle attendue des recettes de l'Etat en la matière, ce qui aboutira à un niveau de dépenses du ministère par rapport au PIB qui restera bien inférieur à la moyenne européenne (la France étant à ce jour 23e sur 28 dans l'Union sur cette question). En partant d'un tel constat, quels sont encore les efforts à réaliser pour un traitement satisfaisant des justiciables ?

Guillaume Jeanson : Le magistrat Philippe Courroyecite, dans son livre « reste la justice » paru tout récemment,de nombreux chiffres émanant notamment de la Commission Européenne pour l’Efficacité de la Justice. Ces chiffres sont intéressants pour estimer la réalité de l’effort budgétaire consacré à la justice en France.Ils permettent ainsi d’établir que, là où le budget de la justice en France revient à 1,8 % de son PIB, la moyenne des pays duConseil de l’Europe se situe plutôt autours de 2,2%. De manière peut être plus parlante encore, il précise que tous les ans, chaque français dépense 64 euros pour sa justice, contre91 euros pour chaque anglais, 114 euros pour chaque allemand et 219 euros pour chaque suisse. Au regard de tels chiffres, il est évidemment loisible de considérer que l’effort consenti par la France pour le fonctionnement de sa justice demeure encore sans doute insuffisant. Pourtant, et comme vous l’indiquez vous-même dans votre question, il est tout aussi important de reconnaître que cet effort s’est déjà considérablement renforcé ces douze dernières années, en passant d’environ 5,5 à 8,5 milliards d’euros et en faisant passer le nombre des agents de près de 72.400 à 83.200.

Comment expliquer alors, qu’en dépit de telles augmentations, le dernier garde des Sceaux de l’ère Hollande, Jean-Jacques Urvoas, ait pu, -à juste titre d’ailleurs- parler de « clochardisation de la Justice » ? Sans doute parce que non seulement cet effort demeure insuffisant mais aussi et surtout parce que tant qu’il ne s’accompagnera pas de réformes en profondeur de l’organisation, les efforts budgétaires réalisés demeureront toujours largement insuffisants pour satisfaire le justiciable demandeur de toujours plus de compétence, d’écoute et de célérité.

Prenons un seul exemple, jugé d’ailleurs polémique par de nombreux praticiens : l’étendue du rôle dévolu au juge d’application des peines. Le trop faible nombre de places de prison a conduit les gouvernements successifs à rivaliser d’inventions pour limiter toujours plus les flux entrants en prison. Parmi les méthodes choisies, il existe celle qui veut qu’une peine d’emprisonnement ferme allant jusqu’à deux ans (ce qui est considérable en pratique) sans que ne soit décerné un mandat de dépôt (c’est à dire sans que la personne condamnée ne ressorte immédiatement détenue à l’issue de son procès) doit par principe être aménagée par un juge d’application des peines, alors même que la personne condamnée n’a pas effectué la moindre journée en détention. Cette règle conduit donc concrètement à ce qu’un deuxième juge soit chargé de défaire ce qu’a fait un premier juge, avant même le commencement d’exécution d’une peine. Un esprit impertinent pourrait estimer que deux magistrats sont ici purement et simplement affectés au travail d’un seul. La réalité de la pratique montre aussi que les délais qui en découleront seront d’autant rallongés et que cela se traduira enfin par un sentiment d’incompréhension terrible pour la victime. Cette dernière qui aura en effet vu son agresseur condamné en audience publique à de la prison ne le verra jamais y passer ne serait-ce qu’une seule journée car un autre juge, dans le secret et l’intimité de son cabinet, en l’absence decette même victime, aura décidé de commuer cette peine de prison en un bracelet électronique ou autre chose encore. Dans cet exemple précis, il est permis de s’interroger. Ne serait-il pas préférable pour tous que : soit la personne condamnée aille véritablement et immédiatement en prison (encore faudrait-il pour cela disposer de places en nombre suffisant… ce qui pose à nouveau la sempiternelle question du nombre de places de prison à construire), soit qu’elle soit directement condamnée en audience publique (par le premier juge et devant ses victimes) au port de son bracelet électronique ? Certes la réforme de la justice s’intéresse à ce point en se proposant de limiter à une durée d’un an et non plus de deux l’application de cette règle. Mais ce ne serait en réalité que marquer une forme de retour à 2004, année de création de ce dispositif par la droite (avant que cette même droite ne l’aggrave en 2009 en passant cette durée d’un an à deux ans). Ne faudrait-il pas faire montre en cette matière d’une plus grande ambition?

Une autre boite de pandore budgétaire concerne la pénitentiaire. De nombreuses voix estiment en effet que le poids de la pénitentiaire qui est aujourd’hui rattachée au ministère de la justice grève bien trop lourdement le budget de ce ministère. Ceux-là même expliquentainsi ce pourquoi l’augmentation permanent du budget de la justice ne soit que si rarementressenti dans le fonctionnement quotidien des juridictions. Poursuivant cette logique, d’aucuns plaident aussi pour un rattachementde la pénitentiaire au ministère de l’intérieur. Une telle réorganisation ne constituerait aux yeux de l’histoire qu’un simple retour. Mais, ne nous y trompons pas, quel que soit le ministère à laquelle elle devrait être rattachée, la pénitentiaire comme la justice nécessite hélas aujourd’hui des moyens importants.En tout état de cause, le projet de loi présenté hier prévoit encore une hausse du budget de la justice de 24 % sur cinq ans, soit de près d’1,6 milliard d’euros.La garde des Sceaux Nicole Belloubet a précisé que cecipermettrait notamment la création de 6 500 emplois.

Gérald Pandelon : Au-delà de la question sempiternelle du budget, je crois que tant que l'on confiera le ministère de la justice à des personnalités qui, pour être individuellement de qualité, sont et seront toujours coupées des réalités, des réalités que seul la connaissance du terrain peut dispenser, aucune réforme ne pourra réellement prospérer. Quand comprendra-t-on qu'un ancien professeur de droit, dont la vision est nécessairement essentiellement théorique, donc limitée sinon étriquée, ou encore un magistrat, qui n'a de la connaissance du droit que ce qu'il lit dans des dossiers soumis à sa juridiction, n'ont aucune idée de ce qu'il faudrait concrètement faire pour susciter une réforme digne de ce nom ? Je considère qu'il faudrait donner le pouvoir aux avocats, seuls connaisseurs, à parts égales, à la fois du droit et de la pratique, des textes et du concret, de la réflexion juridique et du terrain. Tous les autres praticiens du droit racontent, en réalité, n'importe quoi car ils disposent d'un savoir livresque mais pas d'une réelle connaissance, ils prennent leurs théories pour la réalité, pour la vérité, alors que toutes leurs théories s'en éloignent, et ce, depuis toujours. Je me souviens d'un avocat général, par ailleurs professeur de droit, qui expliquait depuis 20 ans à tous ses étudiants comment fonctionnaient un certain nombre d'institutions mais qui, confronté à un cas pratique que je lui avais soumis concernant lesdites institutions, n'avait aucune idée de la façon dont le résoudre ; que, face à son malaise, un confrère lui expliqua ce que nous savions tous, sauf lui, pourtant spécialiste reconnu... Mais le cas de ce magistrat n'est pas isolé, il est généralisable à tous ceux qui disposent d'une savoir théorique qu'ils n'ont jamais confronté à la réalité. Le problème c'est que la France, pour des raisons historiques et idéologiques, a décidé de confier les rênes du pouvoir, quel qu'il soit d'ailleurs et pas uniquement judiciaire, exclusivement à des théoriciens-là et que, pourtant, la France en crève de cette idéocratie, de ce pouvoir de la théorie au détriment de l'efficacité.  Prenons trois exemples :

Faciliter l’accès à la justice : par le dépôt de plaintes en ligne ; par la constitution d’un dossier unique au pénal allant du recueil de la plainte au jugement. Sur ce point, et au nom de la célérité espérée d'une réponse pénale, les dépôts de plaintes en lignes ne permettront pas véritablement aux OPJ de se forger une opinion sur le bien-fondé ou non de ladite plainte ; en toutes hypothèses, ils devront entendre à nouveau le plaignant comme dans le dispositif antérieur pour se faire préciser tel ou tel point demeuré obscur, autrement dit clarifier des points concernant la relation des faits ou la qualification juridicque à retenir ; outre le fait que bien souvent les enquêteurs devront solliciter les pièces afférentes ou d'autres pièces supplémentaires ; autrement dit, au nom de la rapidité et de la célérité des procédures, nous allons être confrontés, bien au contraire, à un alourdissement desdites procédures et à une lenteur accrue dans le traitement des dossiers pénaux, par conséquent à une lenteur dans la réponse qui sera apportée par le ministère public. Dès lors, il n'y aura donc aucune efficacité concrète à retirer du nouveau dispositif. Il serait, en outre, possible de rajouter que lors de dépôts de plaintes classiques (directement dans le bureau d'un enquêteur), l'OPJ peut rapidement se forger une opinion sur la solidité de ladite plainte, son caractère sérieux, en faisant, par exemple, préciser le contexte de la plainte au plaignant, en captant ses émotions, un regard, un geste, tous ces détails qui, en réalité, révèlent ou trahissent la vérité ; autrement dit l'enquêteur saura presque par intuition si l'auteur de la plainte dit ou non est sincère, s'il dit ou non la vérité. Or, comment pourra--il apprécier le carcactère ou non séreux de simples écrits rapportés en ligne ? L'idée va se heurter, encore, à la pratique, par méconnaissance, par paresse intellectuelle, par ignorance encore de ce qu'est en définitive, la justice ;   

Réduire les formalités inutiles et redondantes : en simplifiant les régimes procéduraux et les seuils prévus dans le code de procédure pénale, en n’imposant pas au procureur de se faire présenter systématiquement les mis en cause en cas de prolongation de la garde à vue s’il juge que cela n’est pas nécessaire. Sur ce point, quels seront les critères d'appréciation du parquet pour décider d'une prolongation sans avoir pu s'entretenir avec le mis en cause ? Comment faire respecter, dans ce contexte, les droits de la défense et le principe de présomption d'innocence ? Sur ce point encore, il s'agit au nom d'une accélération dans la réponse pénale, de faire astraction des droits de la défense.

Permettre une réponse pénale efficace et rapide : avec la mise en place d’un mécanisme de verbalisation pour certains délits (ex : usage des stupéfiants) ; en permettant au parquet de conclure une transaction financière avec le suspect ; par l’extension du juge unique ; par le développement de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité ; par l’expérimentation d’un tribunal criminel départemental composé de magistrats professionnels. L'objectif clairement affiché est celui d'une déjudiciarisation, dont le pendant est celui d'un renforcement des prérogatives de l'Etat au détriment des justiciables. Comment, en effet, faire jaillir la vérité alors que l'objectif avoué est de priver de plus en plus les avocats de leur faculté, dont ils ont le monopole, de plaider pour assisster leurs clients ? Le projet de réforme de la procédure pénale BELLOUBET signe une nouvelle régression des droits de la défense et des libertés publiques. En effet, non seulement la création, même expérimentale d'un tribunal criminel départemental en lieu et place de la cour d'assises, mesure jamais soumise à débat, contrevient aux principes judiciaires fondamentaux, mais également la facilitation des interceptions de communications électroniques et de géolocalisation, l’extension des enquêtes sous pseudonyme, la réforme de la garde à vue, le développement du recours à la visio-conférence pour l’interrogatoire de première comparution, etc.

Magistrats et avocats ont déjà pu se mobiliser contre ce projet de loi. Quelles en sont les causes principales, notamment du point de vue du justiciable ? 

Guillaume Jeanson : Vous avez raison, la mobilisation a été assez importante. Le conseil national des barreaux s’est ainsi félicité de voir 7.000 avocats, soit plus de 10% de la profession, manifester à Paris le 11 avril lors de la journée « justice morte » aux côtés de magistrats et fonctionnaires de justice pour réclamer, suivant ses propres termes,une « justice accessible, humaine, partout et pour tous ». Parmi les craintes fréquemment énoncées, on relève surtout la dématérialisation (les dépôts de plaintes en ligne, la numérisation des procédures…) et le recul d’une justice proche géographiquement des justiciables. D’autres s’inquiètent aussi de modifications procédurales qui auront sans doute pour effet d’entrainer un recul du juge d’instruction et donc d’une procédure dans laquelle la défense dispose aujourd’hui de véritables leviers pour influer sur le cours d’une information judiciaire. Des leviers qui peuvent permettre à un justiciable, par le truchement de son avocat, de demander à ce qu’un juge d’instruction réalise certains actes d’instruction qui seront pour lui à décharge et non plus seulement, comme il pourrait parfois le craindre en l’absence de telles interventions, uniquement à charge.

Gérald Pandelon : Pour des motifs différents, magistrats et avocats sont opposés à la réforme. Selon les magistrats, la réforme souhaitée ne se pencherait pas sur le quadruple problème de notre justice pénale que constitue, non seulement, d'une part, son assujettissement au droit européen, par conséquent celui de sa souveraineté, d'autre part, celui de l'absence de tête du ministère public, donc son absence d'unité, donc de pilotage central, par conséquent de cohérence ; par ailleurs, celui de l'indétermination des peines; enfin, celui de l'absence d'un outil pénitentiaire suffisamment opérationnel. En revanche, les avocats regretteront le phénomène annoncé de déjudiciarisation, non seulement en matière pénale mais également en matière civile, tendant à priver toujours davantage le citoyen de ses droits, ce qui semble annoncer un crépuscule de la justice pénale. D'autres questions, jamais tranchées, demeurent en suspens et ne seront jamais traitées, celles d'un véritable statut protecteur pour l'avocat, ou encore celui d'un appel général pour la victime d'un procès pénal dans l'hypothèse d'une relaxe de son agresseur, etc. La liste est longue, elle le demeurera. Eloppement des droits de la défense, ou encore la possibilité de recourir à une procédure de CRPC sans présence de l’avocat, constituent autant de mesures que la profession d'avocat a toujours refusées car tout simplement elles portent atteintes, dans un Etat de droit, à la défense des plus démunis.

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