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Rapport Dombre-Coste sur la loi Hamon : quand le gouvernement détricote ce qu'il a entrepris
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Une maille à l'endroit, une maille à l'envers... Ainsi va le tricotin gouvernemental, un mode de gouvernance assumé.

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon

Sophie de Menthon est présidente du Mouvement ETHIC (Entreprises de taille Humaine Indépendantes et de Croissance) et chef d’entreprise (SDME).

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La politique, depuis longtemps, a pris le dessus sur l'intérêt du pays ; et même si la perspective d'une "Macron économie" a redonné un peu d'espoir, ce fut de courte durée. D'abord parce que l'attitude de toute la classe politique a vite remis les pendules à l'heure. A droite par exemple, un ex-ministre du gouvernement précédent résistait à toutes les suppliques patronales en protestant "je ne vais quand même pas voter pour la concurrence!", insensible aux intérêts réels d'une petite avancée réformatrice, comme tous ses acolytes.

A gauche, Benoît Hamon déguisé en Thierry la Fronde résistait on ne sait pas très bien à quoi, mais résistait ; l'Assemblée nationale se donnait en spectacle sous le regard navré des Français. On doit connaître la suite mais tout se trame dans les arcanes du pouvoir. Les jeux occultes, les négociations de palais, les donnant-donnant auxquels personne ne croit, les promesses de couloirs, tout cela pour détricoter les erreurs que l'on sait commettre mais qui servent d'appâts à une partie de l'électorat. La loi Macron est Epsilonnienne par rapport à tout ce qui doit être négocié et surtout renégocié de ce qui a été décidé.

La spécificité de ce gouvernement au pouvoir qui n'a pas le pouvoir, ni l'adhésion de l'opinion publique, ni de ses propres parlementaires, ni de Bruxelles, ni des syndicats, est de tergiverser. En haut lieu on s'arrache les cheveux et on ne sait pas sur quel pied danser d'autant moins que l'orientation de la politique économique a clairement changé, car on n'échappe pas au principe de réalité surtout lorsqu'on est endetté et que l'Europe et les entreprises vous rappellent tous les matins que les décisions prises sont mauvaises et contraires à toutes les directives signées par la France et à ses engagements de réformes !

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Qu'à cela ne tienne, on va faire de la politique en conséquence : ménager la chèvre et le chou. On va donc continuer de mentir aux Français sur la possibilité de maintenir en l'état un "modèle français" (qui n'en est plus un pour personne) et faire semblant de réformer. "Mais c'est bien sûr!", on va continuer de promettre au "peuple de gauche" la "to-do" liste de "moi président " et après on détricote... "Comme on ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment" on va brouiller les cartes. Au début, l'opération détricotage a concerné à peu près tout ce que Sarkozy avait mis en place, retraites, heures sup. etc. Sur certains points on a retricoté derrière.

La nomination d'un ministre de la simplification permet de simplifier d'un côté, pendant que l'on complexifie de l'autre. Le malheureux Thierry Mandon ministre Sisyphe a dû accepter la démission de Guillaume Poitrinal, son bras droit, talentueux patron au bord de la crise de nerfs (on s'est bien gardé de donner les raisons de sa démission). Ensuite, l'usine ministérielle tourne à plein régime et les conseillers technos sont chargés de revenir en arrière sur tout ce qui a été annoncé et voté depuis les premiers jours du quinquennat. Il faut répondre aux frondes et aux lobbys en même temps qu'on cède aux grévistes les plus nuisibles...

Ce sont les "pigeons" qui ont lancé le mouvement avec une hardiesse jusqu'alors inégalée, souvenez- vous les start-up tellement taxées qu'elles n'avaient plus de viabilité en France. Nous eûmes ensuite nombre de volailles plumées et d'espèces menacées de disparition. A chaque fois il fallait sur le métier remettre son ouvrage pour trouver des complications adaptées car la complexité consistant à créer des exceptions est la seule voie de sortie.

Pendant ce temps-là, des ministres nommés en début de mandature donnent des gages aux plus engagés. Certains ministres aussi idéologues que butés ou incompétents, ou les trois à la fois, massacrent des secteurs entiers d'activité. On pense tout de suite à la loi ALUR qui a durablement sinistré l'immobilier malgré les avertissements de toutes parts : loyers encadrés sur toute la France, garantie universelle des loyers et des meilleures. Rassurez-vous, on détricote avec énergie tant le mal est grave ; ainsi l'encadrement des loyers sera "en test seulement sur Paris", la garantie universelle ne l'étant plus du tout : limitée à quelques nécessiteux, etc.

Et les 24h ? On n'en est à peine remis ! L’idée brillante en résumé consiste à interdire d'employer quelqu'un moins de 24h par mois, certes on peut comprendre que ce soit insuffisant mais c'est  tout ignorer du retour à l'emploi qui passe aussi par-là, sans compter la tentation du travail clandestin! On a donc détricoté  avec une liste d’exceptions autorisant à recruter "dans certains cas" (je conseille la lecture distrayante de la liste d’exceptions !)

La loi Hamon également catastrophique, en train d'être détricotée en ajoutant une information obligatoire générale, complexe bien sûr, en cas de projet de vente d'une entreprise. La vente ne sera plus annulée si l'information est mal passée mais l'amende de 3% est scandaleusement élevée... pour rien !

Bref, tout cela pourrait faire l'objet d'une Macron 2 dédiée aux détricotages tant  les exceptions et rajouts rendent les textes stupides, inutiles, rébarbatifs et contre productifs.  Et encore nous n'avons pas évoqué les retraites et le feuilleton de l'ouverture le dimanche !

Parallèlement Bercy, tel un bateau ivre, continue son délire fiscal  avec enthousiasme. Au début du quinquennat le ministère des Finances ciblait les riches avec des fusils à lunette, les capitalistes au bazooka et les chefs d'entreprises à la mitraillette.

Bruxelles protestait, les Français râlaient, les patrons licenciaient, les riches fuyaient...

C'est à la tardive prise de conscience de cet état de fait que nous sommes entrés dans la politique du détricotage qui désespère les entrepreneurs auxquels on promet la stabilité à longueur de discours et  tous les Francais en général, qui voient le bout du tunnel reculer.

C'est exactement pour faire cesser ce mode de gouvernance que les Français votent pour n'importe qui, pourvu que cela s'arrête !

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