Quelle efficacité pour les caméras embarquées sur les policiers ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Le système de caméras portées par les policiers est efficace.
Le système de caméras portées par les policiers est efficace.
©Reuters

Souriez, vous êtes filmés !

A l'essai depuis maintenant trois ans, le système de caméras portées par les policiers connaît un retour terrain très favorable. Considérées comme une aide au quotidien indéniable, les caméras protègent les policiers des violences verbales, contribuent à pacifier les relations avec la population et les magistrats. Le procédé doit être étendu lundi 26 octobre.

Philippe Capon

Philippe Capon

Philippe Capon est Secrétaire Général de l'UNSA Police.

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Atlantico : En place depuis trois ans dans le cadre de tests, le système des caméras portées par les policiers devrait être étendu ce lundi 26 octobre. Quel retour de terrain peut-on faire ? S'agit-il d'un procédé efficace, qui aide les forces de l'ordre au quotidien ?

Philippe Capon : Au début de l’expérimentation un certain scepticisme entourait l’utilisation des caméras puis les premiers retours ont été très positifs.  A tel point que dans certains commissariats lorsque l’expérimentation s’est terminée et que les caméras expérimentales ont été retirées pour poursuivre l’expérimentation dans un autre service de police, les policiers ont demandé que des caméras leur soient rapidement et à nouveau attribuées. Cela n’ayant pas été fait certains policiers ont alors acheté sur leur budget personnel des mini caméras…cela traduit bien l’état d’esprit des policiers sur l’utilisation des caméras. 

Les représentants de l’UNSA Police ont d’ailleurs été dès les premières expérimentations très attentifs sur ce sujet des caméras et le travail effectué par le syndicat a permis de faire le constat suivant : 

- Les policiers sont très largement favorables aux caméras.

- Les caméras permettent de faire redescendre la tension lors des interventions. La personne qui se sait filmée par le policier change de comportement sachant ses gestes et paroles enregistrés.

- Les caméras permettent aux policiers d’éviter les violences verbales dont ils sont encore aujourd’hui, trop souvent, victimes…

- Pour les policiers l’enregistrement doit pouvoir servir de preuve à charge et être un élément probant si une contestation survient.

- Les images enregistrées si l’intervention a dégénéré sont plus "parlantes" que des pages de rapport qui ne pourront jamais retranscrire à l’identique une situation vécue et dont les éléments peuvent ou pourraient être projetés y compris dans un tribunal.

- Les policiers sont très régulièrement filmés, par des citoyens, lors des interventions sur la voie publique, les images des policiers en intervention sont très régulièrement diffusées sur les réseaux sociaux. Les policiers estiment, pour moi à juste titre, qu’en retour filmer les interventions est un juste retour.   

- La caméra apparait pour le policier comme une protection administrative et juridique

- Début 2014 le défenseur des droits présentait d’ailleurs la caméra comme un élément permettant de "pacifier les relations police – population"

Les caméras sont en expérimentation depuis maintenant 3 ans et cela devient un peu long. Une expérimentation dure habituellement beaucoup moins longtemps 6 mois en général – 1 ans au plus… 

Si les caméras s'avèrent utiles face à des citoyens lambda, peut-on dire qu'elles servent également face à des magistrats ? Dans quelle mesure ces petits engins peuvent-ils protéger les forces de polices face à de potentielles condamnations ?

Pour les policiers l’enregistrement doit pouvoir servir de preuve à charge et être un élément probant si une contestation survient. Certains procureurs ont déjà accepté la production d’images enregistrées par des policiers pour appuyer des procédures et les éléments écrits de cette procédure. Mais pour cela les caméras doivent sortir de la période d’expérimentation et le cadre légal doit être éclairci pour que l’on puisse passer d’une situation expérimentale à une situation pérenne.

Toujours sur le plan légal, quelles sont les limites du procédé ? N'existe-t-il pas un problème d'ordre juridique qui empêche les policiers de filmer n'importe quelle scène de la façon qu'il souhaite ? Qu'en est-il du droit à l'image ?

Le cadre juridique est en effet à l’étude pour déterminer les conditions d’emploi des caméras-piéton (enregistrement des interventions, des situations tendues, lieux dans lesquels un enregistrement peut être réalisé : lieu public sans autorisation, lieu privé ouvert ou non au public) et la durée de conservation des données (images et sons). Lors d’un comité technique de la police nationale en juillet 2015  le principe des caméras semblait enfin finalisé, un projet de décret avait même été présenté et l’UNSA Police avait voté favorablement pour ce texte commun aux policiers et gendarmes.

L’UNSA Police suivant toujours l’évolution du texte voté en juillet a appris que le 23 septembre 2015 le projet de décret présenté en juillet 2015 a été rejeté par la section de l’intérieur du conseil d’état. Le conseil d’état a estimé qu’une loi était nécessaire pour autoriser l’utilisation des caméras invoquant l’art 34 de la constitution … 

Outre les questions de droit à l'image, quelles sont les raisons qui poussent à étendre simplement le procédé plutôt qu'à le généraliser ?

La lenteur avec laquelle ce dossier avance, la durée de l’expérimentation qui est maintenant de 3 ans ; un cadre juridique encore fragileLe coût important pour l’achat de ces caméras…

De plus filmer c’est une chose – stocker en est une autre – se servir des données un autre point et permettre l’accès aux images filmées pose ou pourrait aussi poser un problème.

Mais en ma qualité de responsable de l’UNSA Police je défends le principe des caméras pour toutes les raisons sus citées. Cette expérimentation à rallonge est pour moi inadmissible et le politique doit savoir ce qu’il veut dans son soutien aux forces de l’ordre… et sortir de l’expérimentation, avancer sur un cadre légal dons la sortie n’a que trop tardé.

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