Que cache le boom des manuels de coaching sentimental et sexuel ?

Atlantico : En 2012, les livres de coaching sentimental et sexuel représentent plus de 400 000 ventes.  Comment peut-on expliquer un tel succès ?

Marc Dannam : Il y a des livres de coaching sur tous les sujets, la gastronomie, la gym, le jardinage, le CV, le comportement en entreprise… essayer d’atteindre à l’excellence est la norme dans une société de compétition, mais aussi d'angoisse et de doute , dans tous les domaines. Le sexe devient un sujet parmi d’autres, pour séduire, pour sortir du lot, pour s’aimer enfin – soi-même -  il faut être parfait, au lit aussi… Et  ça s'apprend dans les livres car il n'y a pas (ou peu) de coach sexuel...

C'est sans doute aussi générationnel, il n'est plus vraiment honteux d'acheter des livres érotiques, des romans comme des guides. Il y a une banalisation de la sexualité, ce qui rend évidemment important d’en connaître les mystères pour ne pas passer pour une cruche.

Dans quelle mesure ces manuels peuvent-ils aider le lecteur ? Sur quels points précis ?

Ils apprennent surtout à se décomplexer. La phrase culte du « Doc » des années 2000 reste d’actualité : « ce n’est pas sale ! ». Tout est permis entre adulte consentants. Les guides plutôt que d’enseigner des gestes, des caresses, des manières de sucer ou de lécher, apprennent à avoir confiance en soi, à avoir une bonne estime de soi au lit comme ailleurs, la confiance que donne la connaissance – même théorique – de ce qui va se passer sous la couette.

Les guides permettent aussi de dresser une sorte d’inventaire des possibles, il y a des dizaines de positions, l’amour ne se limite pas à la pénétration, ce qu’on appelait naguère des « perversions » ne sont souvent que des petits jeux rigolos et sans danger pour peu qu’on ne les pratique pas en public dans le métro à six heures, etc.

L'amour et le sexe s'apprennent-ils vraiment ?

L’amour ne s’apprend pas. La séduction peut éventuellement s’apprendre, pour la drague j’ai des doutes… Les guides de coaching sont une occasion de découvrir en s'amusant ce que les cours d'éducation sexuelle à l'école ne pouvaient pas nous dire.

Les gestes du sexe peuvent s’apprendre si on n’oublie bien vite que le sexe ne se résume pas à une sorte de chorégraphie. En revanche il est encore utile d’aider la découverte de l’anatomie de « l’autre ». On serait étonné de connaître le pourcentage de garçons qui ignorent encore l’emplacement exact du clitoris ou du point G, ou même qui s’en fichent.

Les filles sont sans doute plus futées mais il n’est pas inutile de leur dire qu’un sexe de garçon peut être fragile, ou que l’érection n’est pas automatique…

Peut-on garder une part de spontanéité en lisant ces manuels ?

Cela dépend de la manière de les utiliser. Les apprendre par cœur est une très mauvaise idée… Essayer de reproduire les gestes appris comme on ferait une sorte de gymnastique est encore plus stupide. Difficile d'être spontanés dans ce genre de circonstances.

Ce n'est de toute manière pas de cette façon qu'il faut les utiliser.

Les guides de coaching sexuels doivent être considérés comme des espèces de sextoys, ils servent aussi à s’amuser, à s’exciter, on y puise une idée, on pousse son amoureux ou sa copine à le lire pour l’émoustiller un peu... Leur place est sur la table de nuit, ils ne remplacent pas le sexe, pas plus qu’un livre de cuisine ne remplace un repas, mais ils donnent « des idées » de menus, rapides comme un quick sexe ou gastronomique comme une nuit d’amour dans un palace ou à la belle étoile.