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Quand Bruno Le Roux s'acharne contre les entreprises françaises
©Reuters

Toujours plus de normes

La loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre, présentée par Bruno Le Roux, ne sera pas sans conséquences néfastes pour les grosses entreprises, mais également les autres.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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On connaissait Bruno Le Roux très occupé à récupérer les attentats de Bruxelles au profit d'une polémique politicienne. Mais on devrait surtout s'intéresser à Bruno Le Roux en pleine acharnement contre les entreprises françaises qui exportent. La loi qu'il a concoctée sur le devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre devrait être prochainement adoptée par l'Assemblée nationale. Elle compliquera encore un peu plus la tâche des exportateurs.

Bruno Le Roux, le conseilleur qui n'est pas payeur

Le texte en discussion en seconde lecture à l'Assemblée Nationale est une proposition de loi portée en 2015 par Bruno Le Roux, président du groupe socialiste. On s'en gausse forcément, puisque Bruno Le Roux fut à une époque vice-président de la MNEF, entreprise de l'économie sociale et solidaire bien connue pour ses malversations et sa conception très approximative de sa responsabilité sociale. En particulier, tout le monde sait que la MNEF a régulièrement financé des emplois fictifs au bénéfice du Parti socialiste. Bruno Le Roux est donc bien placé pour donner des leçons sur la responsabilité sociale des entreprises. C'est un sujet qu'il a touché au coeur et qu'il maîtrise parfaitement.

Bruno Le Roux et le triomphe de la bien-pensance

Fort de son expérience réussie dans une entreprise "morale", Bruno Le Roux a décidé de généraliser les grands principes qu'il a bien connus dans sa jeunesse. Sa proposition de loi propose donc que les grandes entreprises mettent en place un plan de vigilance comportant "les mesures de vigilance raisonnable propres à identifier et à prévenir la réalisation de risques d’atteintes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, de dommages corporels ou environnementaux graves ou de risques sanitaires résultant de ses activités et de celles des sociétés qu’elle contrôle directement ou indirectement, ainsi que les activités de leurs sous-traitants ou fournisseurs sur lesquels elle exerce une influence déterminante. Les mesures du plan visent également à prévenir les comportements de corruption active ou passive au sein de la société et des sociétés qu’elle contrôle".

On notera que les grandes entreprises doivent soumettre leurs sous-traitants à une vérification permettant d'établir que leur organisation est conforme à cette vigilance raisonnable.

Au passage, un amendement en seconde lecture a étendu ce contrôle à tous les sous-traitants...

Bruno Le Roux justifie ces mesures délirantes au nom d'arguments péremptoires tout à fait impressionnants.

Loin d’être un frein économique, cette proposition de loi aura donc comme effet de valoriser les bonnes pratiques mises en œuvre par de nombreuses entreprises, d’améliorer la prise en compte du risque dans notre économie, et de contribuer à la compétitivité hors-coût de notre pays. (...) De par leur vitalité économique et leurs investissements, les entreprises françaises jouent un rôle-clé pour accompagner le développement des pays où elles exercent certaines de leurs activités. À ce titre, leurs efforts en matière sociale et environnementale peuvent grandement contribuer à la lutte contre la pauvreté et améliorer les conditions de travail et de vie de millions de personnes.

Evidemment, si ces mesures font partie de nos bonnes oeuvres ! Pourquoi se restreindre ?

Quelles conséquences pour les petites entreprises ?

Officiellement, la loi Le Roux ne pénalisera que les grandes entreprises de plus de 5 000 salariés. Dans la pratique, les obligations qui pèseront sur celles-ci les obligeront à "contaminer" l'ensemble de leur éco-système avec un paquet colossal de normes dont leurs concurrents ne s'embarrasseront pas.

Ainsi, la moindre entreprise de nettoyage de locaux, le moindre partenaire pour la restauration ou la plus minuscule agence de communication qui pourrait bénéficier d'un marché passé par une grande entreprise soumise à la loi devra prouver qu'elle répond bien aux principes de la vigilance raisonnable. Outre que cette mesure de contrôle aura l'effet inverse à celui recherché, en paupérisant des fournisseurs ou des sous-traitants qui n'auront pas les moyens critiques de satisfaire aux normes imposées par la France.

C'est la face cachée de cette loi : sous prétexte d'améliorer les conditions de travail de tous, elle favorise le fonctionnement à plusieurs vitesses en écartant des marchés les plus faibles ou les moins capitalisées pour affronter les nouvelles normes.

Le Roux et l'obsession de la norme

Mais pourquoi le président du groupe socialiste tient-il tant à handicaper les entreprises françaises par des normes nationales applicables à l'étranger, car leurs concurrentes seront libres comme l'air ? Les entreprises britanniques par exemple ont pour seule obligation de lutter efficacement contre la corruption. Les entreprises allemandes ne sont soumises à aucune norme.

Pourquoi la France se sent-elle une mission civilisatrice dans un contexte économique tendu, où le déficit extérieur est un handicap ? C'est le mystère de Bruno Le Roux frappé de la même maladie que les frondeurs : il faut faire des normes sur tout, et plus elles sont complexes, plus on en est content.

De ce point de vue, Bruno Le Roux est bien l'adepte de la règle : si tu ne sais pas pourquoi tu punis une entreprise, elle le sait forcément à ta place. La désindustrialisation n'est pas près de s'arrêter.

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