C'est un début
Pourquoi le livret A bat tous les records malgré son rendement dérisoire
Les Français épargnent comme ils salivent. Cet aphorisme d’un ancien ministre des finances se vérifie chaque jour davantage, comme en témoigne l’engouement suscité par le livret A qui bat tous les records.
Nos compatriotes lui ont apporté plus de dix milliards depuis le début de l’année, portant ainsi les sommes détenues au nouveau record absolu de 370 milliards, en y ajoutant le produit de son petit frère le livret de développement durable et solidaire. Pourtant, si l’on tient compte de l’inflation, il s’agit là d’un placement qui n’est pas rentable, puisque la hausse des prix dépasse largement un pour cent. Et le gouvernement aurait dû théoriquement relever le taux d’intérêt d’au moins un quart de point le 1er août prochain s’il avait appliqué la formule traditionnelle afin de maintenir son pouvoir d’achat. Mais il y a renoncé cette fois dans le but de freiner l’ardeur de nos compatriotes, sans être nécessairement payé de retour. Car la rationalité économique et financière n’est pas la vertu essentielle des épargnants qui délaissent aujourd’hui l’assurance-vie et demeurent très frileux à l’égard des actions, en raison d’une aversion légendaire au risque.
François Hollande l’avait bien compris en relevant au cours de son quinquennat le plafond du livret A à 22950 euros, qui avait conduit les ménages les plus fortunés à remplir au maximum leurs livrets. Mais sur ce dossier encore, Emmanuel Macron s’écarte de son prédécesseur, car il entend réorienter l’épargne française , en la vaccinant contre la recherche de la rente et de la sécurité à tout prix pour la diriger vers l’investissement productif, dont le pays a cruellement besoin. Mais le seul maintien du rendement actuel à 0,75% n’est pas suffisamment attractif pour changer la donne. D’autant que l’annonce de la réforme de l’ISF qui supprimera la taxation de la partie financière des patrimoines va encore accroître les liquidités disponibles.
Cela est devenu aussi un casse-tête pour les banques , car elles doivent rémunérer les livrets à un taux supérieur à celui qu’elles peuvent emprunter sur les marchés pour satisfaire leurs besoins , compte tenu de la faiblesse du niveau des taux, alors que le président de la banque centrale européenne Mario Draghi reporte toujours la date à laquelle il réduira le montant des injections de liquidités dans l’économie pour commencer à faire remonter le loyer de l’argent. En attendant, les banques acceptent de conserver une partie importante de l’épargne des livrets A, en renonçant à les transférer à la Caisse des Dépôts pour éviter de noyer celle-ci sous l’afflux de liquidités, et de créer une crise monétaire comparable à celle de 2008. Il est donc urgent pour le gouvernement de lutter contre la frilosité de nos compatriotes. Mais, pour les conduire à accepter de prendre davantage de risques, avec la perspective de réaliser aussi des gains véritables sur l’investissement de leur épargne, il faudrait aussi les convaincre que ceux-ci ne seront pas repris aussitôt par l’Etat sous forme d’impôts, avec cette fringale du pouvoir en faveur de la redistribution. C’est dire qu’il faudrait organiser parallèlement une revue complète de la fiscalité de l’épargne, qui apparait dans certains projets annoncés, mais dont la mise en oeuvre reste problématique, compte tenu du poids des habitudes du passé.
En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.
Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !