Pourquoi le libéralisme doit plus que jamais se (re)poser la question de ce qu'est l'Homme<!-- --> | Atlantico.fr
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le libéralisme doit plus que jamais se (re)poser la question de ce qu'est l'Homme (sculpture de Rodin ici en illustration).
le libéralisme doit plus que jamais se (re)poser la question de ce qu'est l'Homme (sculpture de Rodin ici en illustration).
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Emprise économique

Aux rencontres internationales de Genève de 1943, Bernanos constatait que lorsque la civilisation fléchit "les hommes recommencent à chercher un terrain vague, un coin de rue où perdre leur âme immortelle avec l’espoir que personne ne la leur rapportera".

Emmanuelle  Gave

Emmanuelle Gave

Emmanuelle Gave est titulaire d'un DEA de Droit des Affaires de PARIS II (Assas), ainsi qu'un LL.M de Duke University. Lauréate du barreau de Paris, elle prête serment en 1996. Elle est Directrice Exécutive de L'Institut des Libertés depuis janvier 2012.

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Il avait raison.

Nous trouvons nous encore une fois, devant cette caste de libéraux qui soit parce que trop jeunes, soit parce que trop indifférents propagent le message d’une soit disant "liberté absolue" de tout faire, tout vendre, tout acheter : vendre son corps, acheter le corps de l’autre. "Liberté, j’écris ton nom".

Lasse.

>>>>>>>>>>>>>>> Cet article est aussi publié sur institutdeslibertes.org


Or, les Droits ne sont jamais que des moyens pour garantir le respect de l’homme et le Libéralisme quant à lui, dans sa tradition de philosophie du Droit n’est jamais qu’une pensée cherchant à défendre le faible contre le fort, le petit contre l’Etat. Or, parce que nous avons de plus en plus de difficultés à savoir ce qu’est l’homme nous avons aujourd’hui du mal à également définir ce que sont ces fameux "droit de l’homme". En revanche, je sais une chose, jamais un libéralisme digne de ce nom ne cautionnerait un système d’oppression du plus faible au service du plus fort, contrairement à ce que je vois écrit, drapés dans une appellation sirupeuse de "Liberté". L’homme, contrairement à ce qu’insufflent ces héritiers de Pic de la Mirandole, n’est pas une cire molle. Si vous faites abstraction des significations que recèle un individu vivant et souffrant, vous pouvez le découper en tranches, vous ne trouverez que de la viande. L’homme contemporain est réduit à sa biologie, à la marchandisation du corps, à sa violence et à sa dimension perverse.

Ne mentionnons pas les dérives insoutenables qui conduisent parfois des hommes et des femmes frappés par la misère à vendre un de leurs organes.

Ne mentionnons pas le fait que même au sein des pays les plus favorisés économiquement, ce sont les plus fragiles de ces pays-là qui font l’objet d’une sournoise exploitation, et concernant la médecine de la procréation, ne mentionnons pas que le corps féminin a été transformé en usine à produire des ovule..

Le règne de l’efficience totale et de la liberté totale n’atteint-il pas, dans cette perspective, l’humanité dans sa dignité même ?

Plus gravement encore, c’est à une perversion du principe suivant lequel une intervention sur un corps humain n’est légitime que si elle a lieu avec le consentement de l’intéressé, “sa liberté à vendre son corps”.

L’imposition de cette soit disant norme libérale d’un individu libre et consentant contraste fortement avec les réalités sociales et culturelles des patients indiens qui n’ont bien souvent que leur corps biologique comme ressource économique et qui ont rarement accès à des soins de santé de qualité. Au bout du compte, la liberté de vendre son corps en vient à servir de caution à l’emprise économique sur la vie humaine plutôt qu’à protéger les plus démunis : ces derniers auront consenti aux diverses interventions sur leur propre corps, mais auront-ils eu le choix de ne pas consentir? Où est la beauté de la liberté dans l’utilisation de la misère humaine ?

Nous sommes bien loin de la philosophie utilitaristes de Bentham et de Mill  qui en leurs temps ont pu servir d’activateur ultime à la marchandisation du corps en offrant leurs corps à la science !

Quant à nous, spectateurs extérieurs, la question demeure la suivante : "Une société humaine, humaniste, doit-elle tout autoriser au motif que tout est possible ?"

Mais, pouvoir faire quelque chose ne signifie pas qu’il est bien de le faire et c’est le rôle des sociétés humaines, de leurs règles et de leur Droit, que de dire ce qui est permis et ce qui ne l’est pas, de dire ce qui est éthique et ce qui ne l’est pas, de défendre le plus faible contre la violence des plus forts. Un homme a besoin de libertés pour vivre mais de quelles libertés peut-il disposer sans pour autant aliéner les autres et s’aliéner soit même ?

Le libéralisme, plus que tout autre courant de pensée, ne saurait faire l’économie de cette question: Qui est l’homme ?

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