Pourquoi la règle de base de la plupart des régimes ne vous suffira jamais à perdre du poids<!-- --> | Atlantico.fr
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Il est généralement considéré que brûler 3500 calories permet de perdre environ 450 grammes.
Il est généralement considéré que brûler 3500 calories permet de perdre environ 450 grammes.
©Reuters

Un remède pire que le mal

Brûler massivement des calories n'est pas suffisant lorsque l'on fait un régime pour perdre du poids sur le long terme. La manière avec laquelle ces calories sont brûlées et les aliments choisis comptent bien plus. Un mauvais régime se traduira d'ailleurs par une prise de poids qui peut dépasser le poids initial.

Réginald  Allouche

Réginald Allouche

Réginald Allouche est médecin et ingénieur. Il assure une consultation principalement axée sur la nutrition et la prévention du diabète de type II. Réginald Allouche a notamment publié en 2022 La nouvelle méthode anti-diabète chez Flammarion et La Méthode hépato-détox aux éditions Albin Michel.

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Atlantico : En théorie, il est généralement considéré que brûler 3500 calories permet de perdre environ 450 grammes. Pourtant, cette affirmation semble être remise en cause dès lors que le terrain de la réalité est abordé? S'agit-il simplement d'une erreur ou d'une trop grande simplification ?

Réginald Allouch : A court terme, on peut considérer que réduire les calories permet de perdre du poids, ça c'est sur. Vous mettez quelqu'un 15 jours en réduisant son apport calorique, il perdra du poids. La question est : quel type de poids va-t-il perdre ? Il va perdre du muscle ou de la graisse, ou de l'eau ? Et surtout, que deviendra ce poids quand la personne va revenir dans des conditions de vie normale ou en tout cas que l'on considère comme normal. Pour ça, les règles absolues pour une bonne perte de poids c'est tout d'abord de viser une perte de poids stable à long terme, ce qui ne veut pas dire perte de poids lente. Il y a un grand débat sur le fait qu'aujourd'hui, on pense que perdre du poids lentement a moins d'intérêt que de perdre du poids rapidement, parce que de toute façon ce qui est important ce n'est pas la perte de poids, c'est la durée pendant laquelle la perte de poids sera considérée par la structure archaïque de notre cerveau.

L'homme est un animal résilient qui a toutes les capacités pour survivre et a horreur, quand il est dans l'abondance, qu'on lui coupe l'abondance. Ensuite, il faut que ce qui soit perdu soit du gras et pas du muscle, pour ça, il faut être sur qu'on n'enlève pas les calories issues des protéines, la seule chose que l'homme peut stocker c'est le gras et le sucre. Ce n'est pas les protéines. Quand il n'a pas assez de protéines au quotidien, il va manger ses muscles car c'est un réservoir de protéines. Troisièmement, il faut que le régime composé respecte la flore intestinale, il ne faut pas un excès de sucre au détriment des protéines. Cela va venir modifier la composition de la flore et entraîner une mauvaise perte de poids.

Plus généralement, n'est-ce pas faux de raisonner en termes de calories et de chiffres alors que les besoins évoluent avec l'avancée du régime ?

Tout à fait, de toute façon, en début de régime, on peut diminuer sa ration calorique de 20 à 30 %, de toute façon l'organisme arrivera à un pallier. Après la perte de 10 à 15% de poids il va devenir très très résistant et il faut évoluer par pallier. Il faut perdre du poids par pallier. Aller dans un moment de stabilisation où on favorise des aliments sains, des bonnes protéines, des sucres à indice glycémiques bas, peu de graisses saturées etc. Il faut perdre du poids, et après la perte de poids, être dans une étape de stabilisation assez longue car encore une fois, l'homme est résilient et tous les mécanismes de régulations vont s'opposer à cette perte de poids au moins pendant 6 à 9 mois. Il faut que cette stabilisation dure au minimum 1 an.

C'est encore pire que ça, il y a même un facteur économique qui rentre en jeu, on pourrait penser que réduire les calories cela fait baisser le budget le budget alimentaires. Alors que cela fait augmenter le budget, c'est à  dire avoir des produits de qualité. Cela va coûter plus cher. Paradoxalement, un régime  moins riche en calories va donc coûter plus cher. Raisonner en termes de calories est extrêmement biaisé.

Nous avons tous des métabolismes différents, dès lors, peut-on faire suivre un même régime à tous les individus ? Quel rôle vient jouer le métabolisme dans la perte de poids ? 

C'est une excellente question, on pourrait effectivement donner le même régime à tout le monde, mais il y a deux principaux problèmes. D'abord, un régime ne se conçoit pas sans la mise en place d'activité physique. Il faut pratiquer trois fois 50 minutes d'exercice par semaine. Il faut voir si les gens en sont capables, quelqu'un qui a 55 ans ce n'est pas pareil que quelqu'un qui a 35 ans. On peut très bien prescrire le même régime à tout le monde, mais les goûts ne sont pas les mêmes, il faut conserver une forme de plaisir. A partir du moment où vous allez réduire les calories, il faut que les calories restantes soient les meilleures possibles, qu'elles soient agréables. Sinon c'est intenable. La variation du régime se fera beaucoup plus sur des données hédoniques que sur des données caloriques, ce qui de toute façon ne fonctionne pas.  Les gens ont des goûts très très différents, des gens vont être habitués à des calories libres, ils sont toujours en excès sur le gras et le sucré. Quand on parle des édulcorants, les édulcorants c'est très utile en début de régime car cela permet aux gens de ne pas avoir trop de frustrations en même temps, mais après il faut se débarrasser du goût sur sucré. Si dès l'enfance, on vous habitue à avoir des produits très gras et très sucré, vous aurez un niveau de référence toujours élevé par rapport à quelqu'un d'autre qui n'a pas eu ce type d'alimentation. La variation se fait sur l'hédonisme et le plaisir, elle ne se fait pas sur les calories

Après avoir suivi un régime, de nombreuses personnes finissent par retrouver leur poids initial quelques mois après, le cerveau garde-t-il en mémoire le poids ? Pourquoi reprenons-nous notre poids aussi rapidement ? 

Tout simplement parce que le poids est une régulation très complexe.  Vous avez des éléments de régulation de ce poids. Vous avez le cortex, où vous avez ce qui correspond aux sentiments, à la régulation, à l'action  et c'est là où la notion de nécessité de régime va démarrer. Mais vous avez deux autres structures, une qui est très archaïque qui se situe dans l'hypothalamus dans le cerveau dit reptilien, le tronc cérébral, qui est le noyau arqué et qui lui est l'espèce de gardien absolu de votre poids et des calories que vous ingérez. Il a horreur des variations de poids, il a horreur qu'on lui enlève des calories. Il est à un niveau très archaïque donc très inconscient qui fera tout pour reprendre du poids. Ensuite vous avez entre les deux structures vous avez le centre de la récompense. C'est une zone très importante car tout passe par là, c'est même là que se passe l'effet placebo. Il est capable de faire prendre des  vessies pour des lanternes au cerveau. En fait, quand vous perdez du poids, vous avez un élément qui va résister très fort le tronc cérébral, un cortex qui dit "il faut que je perde du poids ça va pas du tout" et entre les deux le centre de la récompense qui peut calmer les deux autres. Pour se faire, il faut donc que le régime soit agréable. La frustration ne fonctionne pas car dès que l'effet volontaire va s'estomper au fil des semaines, les deux autres zones du cerveau vont tout faire pour compenser, et là ça sera les pralines, le chocolat, etc. Il y a un 4ème  élément qui lui est un amplificateur de votre comportement, c'est la flore bactérienne. Si vous mangez gras et sucré, vous allez sélectionner sur les 100 0 germes que vous avez dans votre intestin grêle, vous allez sélectionner celles qui vont vous aider à capter le gras et le sucre. Elle va amplifier le phénomène, quand on fait un régime, il faut toujours veiller à éviter deux choses : les acides gras saturés et les sucre indice glycémique élevé. Le premier rend l'intestin perméable les germes peuvent s'immiscer entre les cellules et favoriser l'inflammation. Et le sucre va aider d'autres bactéries qui elles aussi sont inflammatoires. Donc si vous êtes dans un état inflammatoire, vous pouvez faire tous les efforts du monde, vous aurez une reprise de poids qui risque d'être supérieur que ce que vous avez auparavant.  J'ai participé à une expérience où on a pris de la flore bactérienne de diabétique de type 2, on l'a implanté chez des souris qui avaient des repas normaux qui n'ont jamais changé et qui sont devenus diabétiques au bout de 3 semaines.

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