Pourquoi acheter des diamants est une absurdité économique

Jean-Pierre Rondeau : Il y a deux sortes d'achat pour un diamant : le plaisir (pour son conjoint), ou pour le placement. Dans le second cas, comme dans beaucoup d'autres domaines comme les manuscrits, le vin ou l'art, on assiste à un processus de "financiarisation" du produit : on y rajoute des réseaux commerciaux et financier qui surcharge le prix du bien. Et c'est d'autant plus ennuyeux pour le diamant qu'il n'y a aucune cotation. Sur le marché d'Anvers par exemple, vous êtes même souvent obligé d'acheter les diamants par lot, empêchant tout système de marché classique. Et le diamant est un produit très sensible aux bulles qui peuvent se former très rapidement sur cet actif. 

Plusieurs entreprises vantent pourtant le diamant comme étant un produit "stable" qui, même s'il n'apportera pas de gains faramineux, restera stable dans le temps. La pierre "précieuse" peut-elle être intéressante sur le long terme ?

Non, c'est faux. Ceux qui en ont acheté dans les années 70 n'ont pas récupéré leur argent. Et les entreprises qui font la promotion des achats de diamant avancent des performances invérifiables, en occultant les années où les prix du diamant se sont écroulés après l'éclatement des bulles. 

Les particuliers ne sont-ils pas prisonnier également de détaillant ou d'intermédiaires qui leur vendent finalement des diamants à des prix largement supérieur au prix d'équilibre du marché 

Totalement. Quand vous achetez du vin en financiarisation, vous avez quand même un peu de recul et des références pour pouvoir vérifier le prix de ce que vous achetez : il y a une sorte de cotation de fait des vins selon leur provenance ou leur année. Il y a donc des points de repères. Alors que vous n'en avez aucun pour le diamant ; vous êtes donc à la merci du vendeur. Et parmi les intermédiaires, certains sont clairement des escrocs qui profitent de la volonté des gens de trouver des placements "réels" craignant la faillite de leur banque. Un peu comme l'or récemment d'ailleurs. Certains vendent même des parts sur les pierres, où les gens se retrouvent à acheter des diamants qu'ils ne verront jamais. 

Les autres pierres précieuses ont-elles plus d'intérêt en termes de placement, ou est-ce que ces pierres en général sont toujours un mauvais placement, le diamant n'en étant que le symbole ?

Non, les autres pierres précieuses n'ont pas plus de système de cotation que le diamant. Et la question de la complexité de la définition de la qualité de la pierre est tout aussi présente. Bien sûr, on vous propose des certificats garantissant en principe la qualité, mais dans l'absolu, tous les problèmes concernant le diamant sont tout aussi valables pour toutes les autres pierres précieuses.

Offrir des diamant, souvent en bague ou en collier, est une tradition qui s'est surtout développée après-guerre. Finalement, la valeur du diamant n'est-elle rien d'autre qu'une "bulle marketing" ? Qui a réussi à imposer une telle situation ?

Ce sont les grands réseaux de diamantaires qui ont réussi à promouvoir le diamant en imposant cette pierre comme moyen de diversifier son patrimoine. Ils ont aussi réussi à l'imposer en tant que bijou, le diamant brillant plus que l'or, et représentant une forme de pureté. Mais le problème dans ce dernier cas c'est que dès que vous l'achetez, il a déjà perdu de sa valeur. Les particuliers sont souvent très déçus d'ailleurs qaund ils essaient de les revcendre, d'autant que la valeur est aussi affectée par la manière dont est taillée la pierre, qui peut devenir démodée. Et que la manière de tailler un "actif" puisse influer sa valeur montre l'absurdité de ce placement.