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 Pornographie : pourquoi les hommes en consomment plus que les femmes
©Reuters

Bonnes feuilles

Ce livre vous invite à explorer votre vie érotique et à vous poser les bonnes questions qui amèneront de véritables changements dans votre façon de vivre votre sexualité. Extrait du "Décodeur sexuel", de Yves-Alexandre Thalmann, publié aux éditions First (1/2).

Yves-Alexandre  Thalmann

Yves-Alexandre Thalmann

Yves-Alexandre Thalmann anime des ateliers centrés sur le développement de la communication interpersonnelle, la gestion des émotions et l'affirmation de soi. Auteur d'une douzaine de livres de développement personnel dont Le Décodeur psy (First, 2009), il exerce actuellement en Suisse et en France comme formateur, professeur et psychologue clinicien.

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Que n’a-t-on pas déjà dit sur la pornographie ? Tout et son contraire, dans une solide hypocrisie (masculine en tout cas). Faut-il interdire, ou mettre des limites aux pratiques que l’on peut visionner sur Internet ? Y a-t-il un lien de cause à effet entre la consommation de pornographie et la délinquance sexuelle juvénile ? Etc. Ces questions habituelles n’interviennent pas dans notre réflexion sur le désir.

Ce qui est certain, c’est que les représentations d’actes sexuels excitent l’imagination et les sens des humains depuis la nuit des temps. L’Antiquité nous livre de nombreuses images et sculptures mettant en scène la sexualité, en Orient comme en Occident. Qu’elles soient exposées aux yeux de tous ou confinées dans le secret et échangées sous le manteau (ou la toge) n’y change rien : la pornographie est omniprésente : seuls les canaux de diffusion évoluent au rythme de la technologie.

Ajoutons un deuxième constat : les hommes consomment davantage de pornographie que les femmes.

Une première raison à cette asymétrie a déjà été éclaircie précédemment : l’excitation masculine passe beaucoup par les yeux, ce qui a un sens du point de vue de l’évolution de l’espèce. Le mâle repère d’abord du regard la femelle qui lui plaît. La pornographie est majoritairement produite par des hommes pour les hommes.

Pornographie au féminin

Il existe des auteurs de films pornographiques féminins, dont le but est d’apporter une touche féminine à cet univers, qui corresponde davantage aux fantasmes et à la sensibilité des femmes. Les plans gynécologiques (gros plans sur les organes sexuels) y sont absents, les femmes n’y sont pas retouchées à grands coups de bistouri, l’éjaculation (faciale) n’est pas le point culminant des ébats…

Ovidie est une réalisatrice bien connue en France. On mentionnera aussi Erika Lust2, une réalisatrice dont la production variée en séduira plus d’une, ainsi que Petra Joy3, qui propose une palette de films faits « par des femmes pour des femmes ».

Quelle sensibilité particulière la pornographie véhicule-t- elle pour qu’elle rencontre à ce point l’imaginaire érotique masculin ? Il suffit de regarder quelques films pour découvrir leur point commun : des femmes qui crient « oui, encore ! ». Dans les films pornographiques, les femmes ont envie de sexe. Elles sont le plus souvent demandeuses, toujours prêtes à l’action. Quel contraste avec la routine conjugale où il faut négocier parfois âprement un rapport sexuel, où l’on risque de passer pour un obsédé sexuel si l’on demande trop souvent, un pervers si l’on suggère une pratique un peu moins conventionnelle, un maladroit si l’on ne sait pas s’y prendre pour faire jouir sa partenaire, un impuissant ou un éjaculateur précoce si l’érection n’est pas aussi dure et durable que madame le souhaiterait !

Addiction

La pornographie, notamment par Internet, peut devenir, semble-t-il, le motif d’une dépendance. On repère une dépendance au fait que l’on ne peut plus se passer de cette stimulation, que l’on se sent mal si l’on ne peut pas y avoir accès et que la vie quotidienne se trouve organisée autour de l’objet de dépendance (moment où l’on peut consommer, ressources pour se procurer la stimulation, etc.). Il ne faut pas hésiter à consulter si l’on croit devenir dépendant. Le plus tôt est le mieux, car cela augmente les chances de réussite des traitements. En bref, on se montre vulnérable dans le rapport sexuel. Or, c’est l’inverse dans la pornographie : les sexes masculins bandent à l’envi et sont toujours prêts à l’action. Mais surtout, les sexes féminins sont eux aussi toujours prêts à l’usage, de même que leurs propriétaires sont toujours excitées et désireuses de relations sexuelles. 

« J’adore regarder – certains diront mater – ma femme en train de se masturber. Cela m’excite énormément. En y réfléchissant, je me rends compte que c’est son désir que j’aime voir. Elle pourrait faire l’amour avec moi juste pour me faire plaisir, sans réelle envie. J’ai du mal avec cette idée : je me vivrais alors comme un profiteur, voire un agresseur sexuel. Quand elle s’occupe de son propre plaisir, cela me rassure… » Éloi

Une femme qui a toujours envie, même lorsqu’elle n’a a priori pas vraiment envie : voilà le fantasme masculin qui se cache derrière la pornographie ! Pour étayer ces dires, un autre élément est saillant dans les représentations pornographiques modernes : les femmes y sont la plupart du temps habillées de lingerie fine (et chaussées de hauts talons). Or, ces habits sont clairement destinés à éveiller l’envie masculine en sublimant les formes féminines (en particulier en jouant avec la transparence). 

Désir au masculin

Si la mécanique sexuelle masculine semble simple (à tort, comme on le découvre quand cela ne fonctionne plus comme ça le devrait), le désir masculin n’en reste pas moins complexe et surtout fragile. Exprimer son désir, c’est aussi se rendre vulnérable. À vous, mesdames, de ne pas piétiner cette offrande ! Il est terrible pour un homme désireux d’être déprécié et rabaissé à cause de son désir, d’être rendu :

• sale : « Espèce de cochon ! » ;

• petit (comme un enfant qui fait un caprice) : « Tu peux bien attendre, on a déjà fait l’amour il y a deux jours » ;

• méchant (dans le rôle du prédateur) : « T u fais passer le sexe avant tout ! ».

C’est aussi la raison pour laquelle les hommes sont friands de lingerie fine et qu’ils en offrent autant à leur compagne : une femme qui porte de la lingerie, c’est une femme qui affiche sa beauté et sa séduction, et donc qui suggère qu’elle est prête à la sexualité, qu’elle en a envie. L’homme n’est alors pas rendu méchant ou sale par son désir pour une femme qui n’en voudrait pas…

 Extrait du "Décodeur sexuel", de Yves-Alexandre Thalmann, publié aux éditions First, 2014. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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