Politique, médias : Patrick Buisson, quel pouvoir d'influence aujourd'hui ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Dans sa psychologie, Patrick Buisson estime être la victime de Nicolas Sarkozy. Il n'a pas supporté qu'il le qualifie de "traître" en septembre 2014, lorsque ce dernier a découvert que Patrick Buisson l'avait enregistré.
Dans sa psychologie, Patrick Buisson estime être la victime de Nicolas Sarkozy. Il n'a pas supporté qu'il le qualifie de "traître" en septembre 2014, lorsque ce dernier a découvert que Patrick Buisson l'avait enregistré.
©Reuters

Réseau et pouvoir de nuisance

Si l'ancien conseiller de Nicolas Sarkozy a été écarté de la famille de la droite, il conserve un certain nombre de relais dans la presse et dans la sphère politique qui lui permettent de promouvoir ses idées.

Vanessa Schneider

Vanessa Schneider

Vanessa Schneider est journaliste politique au Monde. Elle a co-écrit, avec Ariane Chemin Le mauvais génie aux éditions Fayard en 2015. Elle est par ailleurs romancière.

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Atlantico : Le dernier livre de Patrick Buisson, La cause du peuple, sort ce jeudi 29 septembre. Dans ce dernier, il attaque frontalement l'ancien chef de l'Etat. Quelles sont selon vous ses intentions ?

Vanessa Schneider : Ce livre est clairement un livre de vengeance. Dans sa psychologie, Patrick Buisson estime être la victime de Nicolas Sarkozy. Il n'a pas supporté qu'il le qualifie de "traître" en septembre 2014, lorsque ce dernier a découvert que Patrick Buisson l'avait enregistré. Mais il n'a pas non plus digéré le procès qu'il a perdu contre Nicolas Sarkozy et Carla Bruni, ou que la droite se retourne contre lui et fasse comme s'il n'avait jamais existé. Il se trouve donc dans la position d'un amoureux éconduit, d'un homme humilié qui se trouve dans une posture de victimisation.

Patrick Buisson n'a qu'une obsession aujourd'hui, empêcher Nicolas Sarkozy de revenir au pouvoir. Comme il est extrêmement minutieux et qu'il calcule tout, rien n'est dû au hasard… Ce livre lui permet de justifier qu'il ait enregistré tout le monde. Mais ce n'était pas sa défense initiale puisqu'il avait tout d'abord nié qu'il avait enregistré Nicolas Sarkozy, puis que son dictaphone s'était branché tout seul, puis avait expliqué que ces enregistrements devaient l'aider à écrire un livre. Publier aujourd'hui, pendant la primaire Les Républicains, n'est donc pas anodin.

Comme il n'a pas d'autre candidat à soutenir dans cette primaire, son but est de décrédibiliser celui qu'il veut tuer politiquement.

Dans son livre, il n'y a pas de révélation, pas de scandale d'État, mais des épisodes comme celui du CPE qui ne sont pas vérifiables. Quel crédit accorder à ce qu'il rapporte, alors qu'il est connu pour avoir déjà menti par le passé ?

Quelle est l'importance de son réseau ? Que ce soit dans ses relais médiatiques ou ses soutiens politiques, sur quoi et qui peut-il compter ?

Il garde évidemment des soutiens dans les médias comme en politique. Il continue à faire peur, ce livre montre bien qu'il n'a pas exploité tous les enregistrements à sa disposition. Comment est-il resté à la tête de la chaîne Histoire, pourquoi y est-il toujours malgré cette affaire des enregistrements, malgré sa mise en examen, malgré sa limite d'âge ? Cette question montre bien qu'il n'est pas complètement banni de tous les milieux.

Mais il garde aussi de bons contacts avec des journalistes, à Valeurs Actuelles notamment qui publie ses bonnes feuilles. Cette rédaction, où il a d'ailleurs passé un certain nombre d'années, comprend plusieurs de ses protégés. Patrick Buisson a souhaité en faire une pouponnière de la droite dure. Il conserve également certains relais au Figaro, dont la rédaction n'est pas toujours indifférente à ses idées. Si personne ne s'affiche avec lui, il garde un nombre important de relais-amis qui peuvent lui être utiles, et faire progresser ses thématiques.

C'est un homme qui conserve une influence idéologique très importante. Quand on entend Nicolas Sarkozy pendant sa campagne, on comprend que Patrick Buisson a réussi à imposer un certain nombre de thématiques à droite, de vocables, d'éléments de langages sur les migrants, les étrangers ou encore l'Europe que l'on n'entendait pas à droite il y a une dizaine d'année. Il a réussi à faire infuser ses idées dans toute une partie de la droite française. Ce n'est pas un pouvoir matériel, mais c'est une petite victoire.

Il peut causer du tort à Nicolas Sarkozy en lui renvoyant l'image la plus détestable possible, celle du personnage clivant, qui insulte son entourage, vulgaire, mesquin, parfois à la limite du racisme. Mais on n'avait pas attendu Patrick Buisson pour avoir des éléments sur cet aspect de la personnalité de Nicolas Sarkozy, en témoigne le livre Ça reste entre nous hein ? de Nathalie Chuc et de Frédéric Gerschel publié récemment.

Une version augmentée de votre ouvrage, Le mauvais génie, est publiée aujourd'hui. Vous y avez ajouté un chapitre sur ce qu'a fait Patrick Buisson depuis un an. Que pouvez-vous nous dire à ce propos ?

Après Nicolas Sarkozy, Patrick Buisson a soutenu Jean-François Copé pendant son affrontement contre François Fillon à la tête de l'UMP. Patrick Buisson voit toujours Philippe de Villiers, qu'il ne considère pas pour autant comme un poulain d'avenir. Laurent Wauquiez, qui était le seul à reconnaître publiquement qu'il continuait à le voir, a montré à la suite des extraits de son livre sa ferme opposition à Patrick Buisson. Il entretient en revanche toujours des relations avec Eric Zemmour, qu'il a poussé à se présenter à des élections – mais l'écrivain ne souhaite pas se confronter au suffrage universel. Il s'intéresse beaucoup à Marion Maréchal-Le Pen et à la droite dite "hors les murs", sans pour autant voir une personnalité émerger vraiment. Et en panne de nouveau poulain, il s'occupe avant tout d'empêcher Nicolas Sarkozy d'accéder au pouvoir.

France 3 diffusera fin octobre un documentaire consacré au Mauvais génie d'Ariane Chemin et de Vanessa Schneider.

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