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Pierre Laurent va rencontrer Arnaud Montebourg d'ici les vacances : mais que pourrait bien espérer l’ancien ministre d’un rapprochement avec le PCF (et vice-versa) ?
©Reuters

Camarades rouges

Pierre Laurent, secrétaire national du Parti communiste français, a prévu de rencontrer Arnaud Montebourg cet été en vue d'un possible rapprochement entre les deux hommes pour 2017. Une "alliance" qui, si elle reste encore hypothétique, pourrait permettre à l'ancien ministre de l'Economie de rallier définitivement les frondeurs et peser sur la primaire de la gauche.

Maud Guillaumin

Maud Guillaumin

Journaliste à Europe 1, BFM, ITélé, Maud Guillaumin suit pour le service politique de France-Soir la campagne présidentielle de 2007. Chroniqueuse politique sur France 5 dans l’émission Revu et Corrigé de Paul Amar, puis présentatrice du JT sur LCP, elle réalise également des documentaires : « Les Docs du Dimanche », « Les hommes de l’Élysée » sur les grands conseillers de la Ve République et « C’était la Génération Mitterrand » transposé de son livre Les Enfants de Mitterrand (Editions Denoël, janvier 2010). Elle écrit également dans la revue littéraire Schnock. Elle est l'auteur de "Le Vicomte" aux éditions du Moment (2015).

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Atlantico : Alors que le Parti communiste n'a toujours pas apporté son soutien à Jean-Luc Mélenchon en vue de la présidentielle de 2017, Pierre Laurent a annoncé qu'il souhaitait rencontrer Arnaud Montebourg cet été. Une alliance entre les deux hommes serait-elle susceptible de donner l'avantage à Arnaud Montebourg dans le cadre de la primaire à gauche ?

Maud Guillaumin : Il est évident que la primaire a déjà commencé pour Arnaud Montebourg : il est parti en campagne. Il a besoin de tirer tous azimuts car il sait qu'il n'a pas tous les frondeurs avec lui. Dans cette optique, montrer qu'il parvient à attirer Pierre Laurent serait en effet un bon argument pour les convaincre.

De son côté, Marie-Georges Buffet, elle, est pro-Mélenchon. Comme le Parti communiste se divise petit à petit, si jamais il réussissait à en séduire une partie, cela lui donnerait un poids non négligeable face aux frondeurs qui ne sont pas pour sa candidature.

Le fait que la primaire à gauche ait bel et bien lieu donne aux frondeurs l'occasion de se faire entendre. Même s'ils ne veulent pas dire qu'ils ont un chef officiel, Arnaud Montebourg a beaucoup de poids pour pouvoir les représenter. Cela ne veut pas dire que c'est cette aile gauche qui pourra remporter la primaire, parce qu'il y a eu une réelle droitisation du parti, mais au moins ils auront des arguments pour eux en ayant toujours critiqué la présidence Hollande et en proposant d'appliquer un "vrai" programme de gauche. Ils prendront une grande distance par rapport au quinquennat et insisteront en disant que rien n'a été fait et qu'il reste encore beaucoup à faire.

Quels sont les points d'achoppement qui pourraient compliquer la mise en place d'une entente entre Arnaud Montebourg et le Parti communiste ?

Le premier élément ne jouant pas en la faveur d'Arnaud Montebourg, c'est le fait qu'il ait été membre du gouvernement et qu'il ait participé activement à la présidence de François Hollande, cela pourrait être rédhibitoire pour certains. Ce sera difficile à faire passer pour le Parti communiste, mais d'un autre côté comme il a critiqué très vite l'action du gouvernement, justifiant son départ par son incapacité à travailler dans ces conditions, pourquoi pas…

Mais Pierre Laurent est lui aussi en position de faiblesse et se pose des questions. Qu'est-ce que le Parti communiste pourrait gagner à soutenir Jean-Luc Mélenchon ? Est-ce que cela vaut vraiment le coup ? Est-ce que ce ne serait pas plus intéressant pour le parti d'aller soutenir un candidat socialiste un peu affaibli, sur lequel il aura justement davantage de poids dans son programme ? Pierre Laurent se dit qu'avec Jean-Luc Mélenchon, il n'aura pas son mot à dire.

Deuxièmement, dans les points négatifs, Arnaud Montebourg en tant qu'ancien ministre de l'Économie va mettre en avant le fait qu'il ait défendu Florange. Ce sera son gros cheval de bataille dans son entreprise séduction. En revanche, on lui rétorquera qu'il était très ami des patrons, soutenu notamment par Jean-Louis Beffa, et que ce n'est pas exactement la vision des partisans du Parti communiste. Cela peut être un point de friction. Arnaud Montebourg espère retourner l'argument et estime au contraire qu'il est dans le concret vis-à-vis de l'économie d'aujourd'hui, tout en ayant des valeurs de gauche et en voulant les défendre, et que c'est grâce à cela qu'il peut défendre d'un côté l'idée d'une France forte dotée d'une économie forte, et de l'autre le made in France et les emplois français.

N'y a-t-il pas un risque pour le Parti communiste de se "trahir" lui-même en s'alliant avec Arnaud Montebourg ?

Cela prouve en tout cas que le parti est en mauvaise posture. Pour commencer, il n'aura pas de candidat propre, et ensuite le parti se divise en interne pour savoir quel candidat soutenir entre Jean-Luc Mélenchon et Arnaud Montebourg, qui ne sont tous les deux pas membres du parti. Le PCF ne dispose pas de candidat avec assez de poids pour pouvoir y aller seul, il a obligatoirement besoin d'être la béquille d'un autre candidat.

Même si François Hollande venait à remporter la primaire, Arnaud Montebourg pourrait-il tout de même infléchir à gauche le positionnement du PS post-2017 en cas de bon résultat ? Et dès lors, quel serait l'avenir du PCF ?

Il est certain que si jamais François Hollande gagne, il sera assez difficile pour Arnaud Montebourg de pouvoir vraiment imposer sa vision des choses face à Manuel Valls, François Hollande, Emmanuel Macron et tout le gouvernement actuel. Il essayerait évidemment de défendre certains points, mais sa voix serait tout de même assez faible.

Son seul moyen de peser sur le rapport de force serait de réitérer son très bon score obtenu lors de la primaire de 2011, où il avait recueilli 17% des votes. C'est lui qui avait fait nettement pencher la balance pour François Hollande face à Martine Aubry.

Mais s'il n'a pas un bon score, il ne se passera pas grand-chose.

En tout état de cause, Arnaud Montebourg va développer un dernier argument très important pendant la primaire : sa position par rapport à l'Europe. Il a voté contre le référendum constitutionnel en 2005, il a toujours estimé que le vote des peuples avait été bafoué et qu'aujourd'hui le Brexit n'est que la conséquence de tout cela (faire voter les peuples et marcher sur leur vote par la suite). S'il y a un projet de reconstitution des traités européens, il va de nouveau pouvoir avoir voix au chapitre en expliquant qu'on ne l'avait pas écouté en 2005, qu'il avait eu raison et qu'il faudra davantage l'écouter cette fois-ci. Il tentera sans doute de peser sur ce point de vue, lui qui avait vu "juste" en 2005 par rapport à François Hollande, qui avait soutenu le oui en tant que chef de parti et qui n'avait pas pu se présenter en 2007 à cause de cela.

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