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Obama se trompe, la nouvelle Guerre froide ne fait que commencer
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THE DAILY BEAST

De la propagande au déploiement de missiles Poutine, le leader russe, teste la détermination d'Obama tout en se prétendant victime de l'Amérique.

Michael Weiss

Michael Weiss

Michael Weiss est journaliste pour The Daily Beast.

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Copyright The Daily Beast - Michael Weiss. 

"All the Kremlin’s men" (Les hommes du Kremlin, non paru en français) de Mikhail Zygar, est l’une des meilleurs études sur le système Poutine. Le livre démonte toutes les idées reçues sur les relations russo-américaines, surtout les idées proposées par les architectes américains de ces relations durant les huit dernières années. "Dès le début, Vladimir Poutine n’a pas aimé le nouveau président américain" écrit Mikhail Zygar. "Pour lui, Barack Obama était à la fois trop tendre et incompréhensible. Paradoxalement, Obama, le président américain le plus idéaliste et le plus pacifiste qu’on connaisse, est vu comme un va-t-en-guerre en Russie. Il est la cible de la propagande d’état et de blagues racistes. Il est désormais haï par des millions de patriotes russes. Il est caricaturé comme l’ennemi qui n’a pas de chance car il sera vaincu par Vladimir Poutine".

Certaines informations enfouies dans le flot de l'actualité cette dernière semaine permettent de commencer à mieux comprendre la portée de ce bilan sinistre. Vendredi dernier, John Kerry, le Secrétaire d’Etat américain, a demandé une enquête pour crimes de guerre contre la Russie. De nombreux documents ont montré que l’aviation russe a ciblé des infrastructures civiles comme des hôpitaux ou des écoles, le tout avec des bombes incendiaires et des bombes anti-bunker. Samantha Powers, l’ambassadrice américaine auprès de l’ONU, a accusé Moscou de complicité de "barbarie" en Syrie. Washington a également accusé le Kremlin d'avoir bombardé sciemment un convoi d’aide de l’ONU au nord de la Syrie le mois dernier. Une accusation que l’enquête ouverte a corroborée. De plus, une agence de sécurité estonienne a rapporté que la Russie a déployé des missiles balistiques Iskander-M dans l’enclave estonienne russophone de Kaliningrad. Cette enclave fait l'objet d'une réclamation de la part de la Russie, la première ayant été faite par l’ex président Russe Dmitry Medvedev, le 5 novembre 2008, un jour exactement après l’élection d’Obama.

Les missiles Iskander-M sont capables de transporter des armes conventionnelles et nucléaires. Ils représentent une menace directe pour les alliés des Américains en Europe de l’est et arrivent à un moment où l’arsenal nucléaire russe dépasse désormais l’américain de 429 têtes nucléaires. Comme l’a rapporté le Daily Beast, ceci est une violation du nouveau traité stratégique sur la réduction des armes signé en 2011. Il n’y a pas si longtemps, ce traité était considéré comme le chef d’œuvre de la diplomatie américaine (L’information sur les missiles Iskander coïncide avec la violation présumée de l’espace aérien finlandais et estonien par des avions de chasse russes Su-27). Mais la Russie n’a pas amassé un arsenal militaire seulement en Europe. D’après Reuters, durant la quinzaine de jours qui a précédée l’échec des pourparlers entre Les Etats-Unis et la Russie pour un "cessez-le-feu", Poutine avait doublé, par air et par mer, l’envoi de matériel et de munitions destinés à aider le régime d’Assad. Selon toutes vraisemblances, ces ravitaillements devraient aider le régime et ses alliés iraniens à reprendre aux rebelles l’Est d’Alep. Le cargo avait à son bord des systèmes de missiles anti-aériens S-300 qui théoriquement, peuvent abattre des avions américains dans son rayon.

Le porte-parole du Kremlin Dmitry Kiselyov, qui présente l’émission de propagande "Les nouvelles de la semaines", était très clair : "Nous les abattrons". Le porte-parole du ministère russe de la Défense, le général-major Igor Konashenkov, a quasiment menacé de faire exactement la même chose, lorsque des révélations récentes ont montré que l’administration américaine réfléchit à une confrontation directe avec les forces du régime d’Assad. Cette option est recommandée par la CIA et le commandement conjoint des armées car tous deux craignent que la chute d’Alep n’exacerbe les risques terroristes aux Etats-Unis.

Le porte-parole de la Maison Blanche, Joshua Earnest, s’était publiquement demandé pourquoi la Russie avait besoin de système avancé de défense anti-aérienne en Syrie lorsque sa mission officielle est de combattre Daech, qui n’a pas de capacités aériennes connues à ce jour. En réponse à cette remarque, le compte Twitter de l’ambassade russe aux Etats-Unis a posté une image sarcastique avec cette réponse "car on ne sait jamais vraiment de quelle type d’aide ils vont bénéficier".

près l'erreur de frappe de l’aviation de la coalition qui a bombardé par erreur des soldats syriens à Deir Ezzor, les officiels russes ont ouvertement accusé les Etats-Unis de soutenir Daech en Syrie. Auparavant, et notamment en Irak, ce genre d’allégations se faisait plutôt par chuchotements et par le bouche à oreille, dans la salle des opérations où les officiers russes côtoient leurs homologues iraniens et les chefs des milices chiites pro-iraniennes. Soit Vladimir Poutine est sérieux, soit il veut projeter une image qui souhaite l'être. Il suspend la coopération de son pays dans un accord de coopération pour le nettoyage de déchets de plutonium vieux de 16 ans. Il suspend également l’accord de 2013 sur la recherche et le développement sur le nucléaire et encore un autre accord bilatéral pour reconfigurer des réacteurs afin qu’ils ne puissent pas produire de l’uranium à usage militaire. En échange de la reprise du dernier accord, au moins, Poutine a demandé à Washington l’arrêt des sanctions contre les officiels russes et le paiement de réparations pour d’éventuelles pertes mais aussi de lever les sanctions contre les éventuelles représailles russes contre des organisations américaines. Annuler la loi Magnitsky, un monument des droits de l’homme promulgué en 2012 qui a pour but de pénaliser les officiels russes corrompus. Réduire le personnel de l’OTAN au niveau où il était en 2000 ; et en fait réécrire l’accord sur le retraitement de l’uranium de sorte à en faire porter aux Etats-Unis toute la responsabilité. En réponse à ce qui est clairement une risible tentative d’extorsion, même selon les standards de Poutine, le leader de l’opposition russe, Leonid Volkov a écrit sur Facebook : "Il aurait dû demander le retour de l’Alaska, la jeune éternelle, Elon Musk et un ticket pour Disneyland"

En plus de ce brouhaha de guerre froide à travers le monde, les médias d’Etat de Poutine – et notamment TV Zvezda une chaine sous le contrôle du ministère de la défense russe – ont commencé à émettre l’hypothèse selon laquelle le conflit au Moyen Orient pourrait déboucher sur une guerre nucléaire avec l’Occident. Récemment, le monsieur météo de la chaine publique russe Rossiya-24 a montré comment des frappes nucléaires russes dans le Nebraska pourraient handicaper les communications stratégiques américaines, canadiennes et mexicaines. Le ministre russe des situations urgentes a annoncé que 40 millions de citoyens pourraient prendre part à des exercices d’incendies (par mesure de précaution, bien évidemment) dans le cas d’une guerre nucléaire. Un événement qualifié la semaine dernière de "comportement impudent" par Kiselyov de "Nouvelles de la semaines". Cela semble constituer tout ce que l’Amérique fait ou ne fait pas enfin de compte. Et quel revers pour Obama, lui qui a passé les huit dernières années à insister que "la Guerre Froide est terminée" pour mieux passer toute la fin de son mandant à observer sa renaissance.

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