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New York, la ville où l’antilibéralisme fait un tabac
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zone franche

Dans la Grosse Pomme, une liberté est menacée mais ce n’est pas celle de DSK. Tocqueville en serait certainement fumasse.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Les restrictions draconiennes imposées à DSK dans l’attente de son procès sont impressionnantes (il n’a pas le droit d’aller à la muscu ou de jouer au billard), mais pas autant que celles qui viennent d’être infligées à l’ensemble de la population new yorkaise…

Depuis lundi, il est en effet illégal de fumer dans les parcs et jardins publics de la Grosse Pomme, sous peine d’une amende de 50 dollars. Mieux, les célèbres plages de l’agglomération sont elles aussi interdites aux clopeurs, tout comme un certain nombre d’espaces extérieurs emblématiques ‒ Time Square en tête.

C’est perturbant parce que c’est tout à fait le type de mesures que les ex-fumeurs comme moi, favorables à la prohibition du tabac dans les restaurants ou dans les trains, passent leur temps à qualifier d’inimaginables lorsqu’elles sont données pour inévitables par les toujours-fumeurs : « Interdire de fumer dehors ? Tss… N’importe quoi ! On te demande juste de ne pas nous gonfler pendant le repas, voilà tout… »

Libertés individuelles : un droit imprescriptible de se faire du mal

Cette nouvelle approche radicale de la lutte contre le tabagisme finira-t-elle par traverser l’Atlantique ? On ne saurait le dire. D’accord, le présent des Américains est souvent notre futur mais ça n’est pas systématique et l’interdiction déjà ancienne de traverser en-dehors des clous à New York ne s’est jamais transportée jusqu’ici. Et pour cause : en France, même les voitures ont le droit d’ignorer les passages pour piétons.

Il y a tout de même des signaux d’alerte, comme lorsque Jacques Attali, qui est pourtant un type intelligent, demande l’interdiction pure et simple des cigarettes au motif qu’elles sont dangereuses pour la santé. On l’avait connu plus libéral, le pourfendeur des pratiques anticoncurrentielles de taxis parisiens

Manifestement, les forces déterminées à faire le bonheur du peuple malgré lui restent vigoureuses. Qu’on ne s’y trompe pas, toutefois, le malaise provoqué par l’interdiction de fumer à l’air libre n’est pas symétrique de la colère des anti-radars. Dans un cas, c’est le refus d’une brimade hygiéniste et totalitaire (« fumer, c’est mal, je vous demande de vous arrêter ! »), dans l’autre, c’est celui d’une règle de bon sens qui veut que l’on ne mette pas la sécurité d’autrui en péril en roulant à 90 dans une zone où la vitesse est limitée à 50.

Oui, dans le premier cas, c’est d’une question de libertés individuelles qu’il s’agit. C'est-à-dire du droit d’un être humain maître de son destin de choisir son mode de vie, aussi dépravé soit-il aux yeux des gardiens du bon goût et de la morale. Dans le second, c’est une vulgaire beauferie

On ne devrait d’ailleurs pas trivialiser cette décision du conseil municipal de New York sur le tabac, pas plus qu’il ne faut ignorer l’interdiction du cannabis en France au motif qu’on ne fume soi-même ni l’un ni l’autre. C’est d'ailleurs tout le sens de l'inquiétude de Tocqueville sur le despotisme de « l’empire moral de la majorité » dans De la démocratie en Amérique, un ouvrage clairement rédigé avant l’arrivée de Michael Bloomberg à la mairie de New York !

A ce stade, fumer dehors finira peut-être par devenir un devoir civique. Hum, j'en tousse d'avance !

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