Action !
Mission (très) possible: comment François Fillon pourrait rassurer la majorité de Français que son programme inquiète
Pour rassurer, François Fillon va devoir insister sur les valeurs, sans renoncer à la radicalité qui est sa marque de fabrique et qui lui a permis de remporter la primaire de la droite.
Atlantico : Dans un sondage Ifop pour Le JDD paru ce dimanche, le programme de François Fillon est jugé inquiétant par 62% des Français et 50% des sympathisants LR. Cette inquiétude est-elle justifiée ?
Maxime Tandonnet : La France est dans une situation économique et sociale désastreuse avec ses 5,5 millions de chômeurs, ses gigantesques déficits et sa dette publique, le poids de ses prélèvements obligatoires, 47%, en hausse vertigineuse ces dernières années, son phénoménal matraquage fiscal. A côté, l'économie allemande est florissante, en situation de plein emploi, dégageant des excédants considérables. Sur le fond, François Fillon a profondément raison de vouloir rétablir le sérieux dans la gestion du pays et se rapprocher du modèle allemand. Aucun pays au monde ne peut consommer plus qu'il ne produit, sauf à sombrer dans la dépendance.
Toutefois, la raison et la rationalité ne font pas toujours bon ménage avec la politique. Les propositions économiques et sociales de François Fillon ne sont pas l'essentiel en soi d'un point de vue politique. Ce qui compte sur le plan politique et ce qui jouera en définitive, c'est la manière dont elles seront perçues. Or, à cet égard, la position de M. Fillon est fragile. Il suffit d'un chiffre, d'une image, d'une sensation, pour provoquer des basculements vertigineux de l'opinion. Pour les oppositions de gauche ou d'extrême droite, il sera aisé de brandir un chiffon rouge et de manipuler l'opinion au point de provoquer un mouvement de rejet. Aujourd'hui, certaines des propositions de François Fillon font peur à une majorité de Français qui n'ont pas voté à la primaire, y compris du côté d'un électorat du secteur privé acquis à la droite modérée. C'est un fait indéniable dont il faut prendre acte. La France est une société malade, fragile, déchirée, profondément traumatisée par la vague d'attentats terroristes, par les scandales politiques, par l'exclusion due au chômage. Le terreau de la révolte et de vertigineuses surprises électorales existe. Ne pas en tenir compte serait une attitude suicidaire.
Par quels moyens François Fillon peut-il parvenir à rassurer ? Renoncer à la radicalité et à la rupture - qui sont ses principales marques de fabrique et qui lui ont permis de remporter la primaire de la droite - ne serait-il pas une stratégie risquée ?
Cette entreprise visant à rassurer les Français et une partie de son électorat sur son programme ne risque-t-elle pas d'être rendue difficile par certains candidats à la présidentielle qui pourraient surenchérir en un front commun sur la casse du modèle social ?
Nous allons vers une période extrêmement difficile pour François Fillon et tous ceux qui le soutiennent. Il sera pris dans le feu croisé de la gauche socialiste et de l'extrême droite. Il va devenir de toute évidence le nouvel épouvantail des milieux politiciens et tous les coups seront permis. Rien ne va lui être épargné. Son projet économique et sociale sera passé au crible de ses deux adversaires. On va évidemment l'accuser de thatchérisme, et dénoncer ses supposées intentions de casser le modèle social. Il va être insulté en permanence, traité de réactionnaire par la gauche et de faux jeton par l'extrême droite. Même sur le plan personnel, il sera inévitablement traîné dans la boue. Il va devenir le point de mire des attaques de l'ensemble des autres candidats. L'avalanche de critiques et d'accusation qu'il risque de subir pourrait ensevelir assez vite le souvenir de sa victoire aux primaires. En somme, son élection en mai 2017, dans un climat où l'opinion est extrêmement volatile et imprévisible, est loin d'être acquise. Sa grande chance est justement le statut de paria qui ne va pas manquer d'être le sien. Sans avoir besoin de s'autoproclamer "anti-système" à l'image de nombreux politiques actuels, il pourrait, à force de devenir le souffre-douleur de la classe politique, de l'extrême gauche à l'extrême droite, s'attirer la sympathie de l'opinion ce qui serait son meilleur atout en mai 2017.
En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.
Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !