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Mezzo voce : comment (et pourquoi) Nicolas Sarkozy tente de se faire oublier
©Reuters

Tour de France en silence

Depuis son élection à la tête de l'UMP, l'ancien président n'a accordé qu'une seule interview sur TF1 le 30 novembre. Une stratégie de rareté médiatique qui devrait toutefois prendre fin en janvier.

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy est rédacteur en chef Politique et Économie chez Paris Match. Spécialiste de la droite, il est notamment le co-auteur du livre Le Coup monté, avec Carole Barjon.

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Atlantico : Comment expliquer que Nicolas Sarkozy s’astreigne à un silence médiatique ? Dans quel contexte cette stratégie de la rareté de la parole médiatique s’inscrit-il ? 

Bruno Jeudy :Il applique ce qu’il avait dit le soir de son élection et même lors de sa campagne interne pour la présidence c’est-à-dire qu’il voulait être un président de l’UMP qui jouerait collectif, selon ses propres mots. Il s’est entouré de plusieurs secrétaires généraux adjoints, de délégués généraux et de porte-paroles, autrement dit une équipe de direction assez large. Son objectif était de laisser son équipe être en première ligne pour commenter l’actualité alors qu’il se réservait les commentaires portant sur les grandes décisions qui n’ont d’ailleurs pas eu lieues pour l’instant. Nicolas Sarkozy sait qu’en revenant chef de l’opposition il était menacé d’une forme de banalisation s’il prenait trop souvent la parole pour commenter l’actualité, comme le faisait Jean-François Copé par le passé.

Il y a dans cette situation quelque chose de curieux et de paradoxal : au moment où il envoyait des cartes postales lorsqu’il était en retrait de la vie politique il donnait l’impression d’être omniprésent dans les médias, tandis que désormais en étant revenu il semble se mettre au-dessus de la mêlée et ne pas parler trop souvent  pour échapper à la banalisation. Nicolas Sarkozy voudrait en fait garder son statut d’ancien président tout en étant le patron de l’opposition. Je pense qu’il aura du mal à garder ce silence. En étant le chef de l’opposition, Nicolas Sarkozy va être en première ligne lors des campagnes pour les départementales et les régionales de 2015. Il aura alors face à lui des Jean-Christophe Cambadélis ou Manuel Valls.

Selon RTL, le président de l’UMP effectuera un déplacement par semaine en janvier. Pourquoi rester en contact avec les militants et effectuer des déplacements sur le terrain est-il vital pour Nicolas Sarkozy ? Le président de l’UMP ne devrait-il pas d’ailleurs en effectuer encore plus ?

Il est obligé de passer à une séquence beaucoup plus dense en janvier après un mois de réorganisation en interne et une présence inexistante dans les médias. Cela s’explique pour plusieurs raisons : d’abord, en tant que président de l’UMP il va faire la tournée des fédérations du parti. Deuxièmement, il doit aller soutenir les candidats pour les élections départementales de mars. Enfin Alain Juppé va quant à lui entamer un tour de France en janvier. Cela va obliger Nicolas Sarkozy à ne pas laisser le champ libre à son plus sérieux rival dans les sondages.

L’entourage de Nicolas Sarkozy lui demande de se reconnecter avec le terrain et tous s’inquiète d’un Nicolas Sarkozy qui se contenterait de présider l’UMP attendant tranquillement l’élection de 2017 qu’il pense d’ores et déjà acquise à la droite car François Hollande est au plus bas dans les sondages. Plusieurs élus UMP s’inquiètent donc d’un Nicolas Sarkozy qui resterait un peu trop sur son Aventin car la situation politique est très favorable à l’UMP en ce moment.

Selon les informations de l’Opinion, Alain Juppé effectuera son premier déplacement à la rencontre des Français dans l’est de la France vers la mi-janvier, où il passera une nuit sur place. Quelle stratégie peut de son côté adopter son principal rival en vue de la primaire, Nicolas Sarkozy ?

Avant de caler une stratégie sur celle d’Alain Juppé, Nicolas Sarkozy a déjà besoin de se réconcilier avec les Français. Il reste en difficulté dans les sondages à ce niveau. Il a besoin de recoller au terrain et d’avancer des idées novatrices. Alain Juppé a quant à lui besoin de faire des déplacements à la rencontre des militants UMP pour essayer de remonter le retard et d’améliorer sa cote de popularité auprès d’eux, ce qui n’est pas le cas de Nicolas Sarkozy. Ce dernier a cherché à bétonner dans l’est et le sud de la France pendant la campagne interne de l’UMP, c’est-à-dire ses zones d’attraction naturelle. Je ne pense pas que cela changera maintenant qu’il est président de l’UMP.

Pourquoi la mise en place du nouveau parti qui remplacera l’UMP met-elle place plus de temps que prévu ? Comment expliquer que Nicolas Sarkozy ait du doubler ou tripler les postes au sein de la nouvelle direction de l’UMP ?

Il rencontre quelques difficultés dans la réorganisation de l’UMP actuelle, dans la mise au point du nouvel organigramme, dans l’installation des nouveaux cadres, dans la gestion courante du parti ou encore dans la réalisation d’économies… tout cela met du temps. Il a pour le moment rassemblé avec un travail méticuleux, c’est réussi de ce point de vu car tout le monde est resté à l’UMP, y compris les fillonistes.

Le nouveau président de l’UMP est moins pressé d’organiser son nouveau parti. Il a décidé de prendre son temps et il n’accélère pas les choses contrairement à ce qu’on nous avait expliqué. On peut aussi l’expliquer par le fait qu’il y a des problèmes d’argents et de susceptibilités internes à gérer. Pour beaucoup de ténors dont Alain Juppé, François Fillon et Xavier Bertrand l’urgence est l’organisation de la primaire ce qui va prendre du temps. On peut aussi analyser ce retard par le fait que les candidats aux départementales n’ont pas envie de voir leur campagne parasitée par l’organisation d’un nouveau parti et la mise en place d’un nouveau logo. Nicolas Sarkozy devrait finalement repousser la réorganisation du parti après les départementales, vers juin, c’est-à-dire au moment où le PS fera son congrès et sera en pleine bataille interne. Nicolas Sarkozy a sans doute cette idée en tête. 

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