Massacre à la taxe : comment les candidats à la présidentielle sont en train de tuer l’entrepreneur<!-- --> | Atlantico.fr
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Les candidats à la présidentielle vont-ils nuire aux actionnaires ?
Les candidats à la présidentielle vont-ils nuire aux actionnaires ?
©Reuters

Le fisc pour les nuls

Nicolas Sarkozy et François Hollande semblent au moins être d'accord sur une chose : il faut retirer à l’actionnaire le bénéfice de son abattement de 40 %.

Daniel  Gutmann et Jean-Yves Mercier

Daniel Gutmann et Jean-Yves Mercier

Daniel Gutmann et Jean-Yves Mercier sont avocats au cabinet CMS Françis Lefebvre et membres du Cercle des fiscalistes. 

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On ne peut pas s’empêcher de crier au massacre face à la proposition Hollande-Sarkozy de retirer à l’actionnaire le bénéfice de son abattement de 40 %.

Le dividende de l’actionnaire est un revenu du capital. Le bénéfice de l’entrepreneur individuel est un revenu d’activité. Mais les deux ont la même et unique source, la richesse créée par l’entreprise. Comparons leurs modes d’imposition. Ou plutôt comparons au traitement fiscal de la société, puis de son actionnaire, celui qui s’applique à l’associé d’une société de personnes non soumise à l’impôt sur les sociétés (société en nom collectif, par exemple). Sa part de profit est, en effet, taxée exactement comme le bénéfice de l’exploitant individuel.

Cette part de profit entre dans les bases de l’impôt progressif. Sur un bénéfice de 300, la ponction fiscale maximale est de 41 %, soit 123. Lorsqu’un bénéfice de 300 est réalisé par une société de capitaux (SA, SAS,  SARL), celle-ci supporte 100 d’impôt sur les sociétés (IS) (33 1/3 %). Si le dividende de 200 qu’elle décide de verser devait être compris tel quel dans les bases de l’impôt sur le revenu progressif d’actionnaires taxables à 41 %, une seconde ponction de 82 serait opérée au titre de l’impôt sur le revenu (IR). Au total, le bénéfice de 300 supporterait alors une taxation de 182, soit 59 en plus, ce qui porterait le taux effectif d’imposition à 61 %.

La loi atténue cette surimposition en ne soumettant le  dividende à l’impôt que sur 60 % de son montant. L’IR sur le dividende de 200 n’est que de 49,2 (200 x 60 % x 41 %), en sorte qu’au total, les 300 ne seront  taxés qu’à 50 % environ (149,2/300). Malgré cela, la situation de l’actionnaire reste moins favorable que celle de l’associé de la SNC (taxation à 50 % au lieu de 41 %).

Le désavantage s’accroît encore si le revenu n’atteint pas la tranche supérieure. Au taux de 30 %, l’imposition directe d’un bénéfice de 300 représente 90. En cas de transit par la société de capitaux, les impôts dus sont 100 (IS) puis 36 (200 x 60 % x 30 %), total 136,  soit une imposition effective de 45,33 % au lieu de 30 %.

Et nous n’avons pas encore parlé des prélèvements sociaux qui atteignent 15,5 % sur le dividende contre 8 % sur le bénéfice directement taxé. Même abattu de 40 %, le dividende issu de la distribution du bénéfice taxé à l’IS supporte, de leur fait, une imposition totale de 60% entre les mains des actionnaires taxés à 41 %. La suppression de l’abattement la hisserait à 70 %.

Certes, tous les dividendes ne sont pas prélevés sur des bénéfices ayant effectivement supporté l’IS ou l’impôt comparable appliqué à l’étranger. Mais il existe des moyens pour moduler l’abattement en fonction de cette situation.

La proposition que nous dénonçons sonne dangereusement comme une déclaration de guerre contre les chefs d’entreprise et ceux qui acceptent de partager leurs  risques, bref une déclaration de guerre contre les forces vives de notre économie. La France serait-elle devenue folle en se singularisant à ce point par rapport à ses partenaires européens qui tous favorisent fiscalement le dividende au lieu de le vouer aux gémonies ?

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