Mario Draghi peut rassurer les marchés, il ne règlera pas à lui seul les problèmes structurels de la zone euro<!-- --> | Atlantico.fr
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Mario Draghi peut-il sauver l'euro ?
Mario Draghi peut-il sauver l'euro ?
©Reuters

Pansement sur une jambe de bois

A la veille de la réunion de la BCE, les marchés et les chefs d'Etat ont les yeux tournés vers les décisions que prendra Mario Draghi. Et si on en attendait trop de sa part ?

Isabelle  Mouilleseaux

Isabelle Mouilleseaux

Isabelle Mouilleseaux est directrice de publications chez Publications Agora.

Elle a notamment co-écrit Le déclin du Dollar : une aubaine pour vos investissements ? (Valor, 2008).

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Mario Draghi vient de retourner les marchés comme une crêpe…

De « totalement dépressifs », les voilà soudain passés en mode « euphorie totale ». C’est dire la puissance des mots (qui ne sont rien d’autre que des vibrations, des ondes... du vent); et l’incroyable concentration d’une certaine forme de pouvoir entre les mains d’un seul homme : Draghi.

La veille Ewald Nowotny, président de la banque centrale d'Autriche, évoquait l’idée de mettre en place une licence bancaire pour le fonds de secours européen MES.

Le cash va-t-il couler à flot de tous côtés ?

D’abord avec le MES qui pourrait acheter massivement sur le marché primaire des emprunts d’état espagnols avec la garantie totale de la BCE.

Ensuite avec la BCE qui achèterait les obligations souveraines italiennes et espagnoles sur le second marché ?

La presse mainstream US, fan de laxisme monétaire, applaudit. Du coté de l’Allemagne… tensions.

Nos amis allemands viennent d’en prendre pour leur grade

Le triple A pourrait bien n’être plus qu’un lointain souvenir si l’Allemagne devait plonger corps et âme dans la mutualisation. A 1 contre 17, elle ne fait pas le poids et verrait ses équilibres financiers tirés par le bas…

Le site du magazine Stern titrait ce matin : « Les sauveteurs de l’euro fabriquent un Bazooka…».

Le député FDP Frank Schäffler réagissait aux propos de Draghi sur le site du grand journal économique Handelsblatt en disant que « Draghi n’est pas un sauveur, il pille l’épargne du citoyen ».

De son côté, l’expert en finance de la CDU Klaus-Peter Willsch expliquait dans ce même journal que « L’argent ne tombe pas du ciel, il doit être produit ». Sans quoi, l’inflation resurgira.

Les propos du porte-parole de la Bundesbank (Buba), relatés par le Financial Times Deutschland à l’instant, sont clairs au sujet du rachat de titres italiens et espagnols par la BCE : « Ce mécanisme est problématique, car il donne des mauvais signaux ».

Quant à l’utilisation du FSEF/MES pour racheter ces mêmes titres sur le marché primaire avec une licence bancaire : « Ceci correspondrait au financement d’un état par la planche à billets et ce serait un chemin fatal », nous dit le porte-parole de la Buba.

"Croyez-moi, cela suffira" nous dit Draghi

Humm… Je veux bien vous croire, monsieur Draghi, mais les faits vous contredisent. Comme le dit le magazine Focus sur son site, « Les mesures jusqu’ici prisent par Draghi sont parties en fumée »

La BCE a déjà cédé aux chants des sirènes, achetant pour 211 milliards d’euros de dettes souveraines qui croupissent dans son bilan.

Bilan de cette première action ? Sachant que les taux italiens et espagnols sont revenus aujourd’hui à des niveaux encore plus élevés qu’avant, je vous laisse conclure.

Même le LTRO (1 000Mds€ injectés à trois ans pour financer les banques) n’a pas atteint ses objectifs…

La seule chose que Draghi fera, c’est acheter un peu de temps.

Du temps, encore du temps… n’est-ce pas ce que nous faisons depuis le début de la crise ? De courir après le temps ? D’essayer d’en gagner ?

Et si un Etat faisait faillite ? s’interroge la Süddeutsche Zeitung

Qui remboursera les emprunts d’état que la BCE aura amassés par centaines de milliards dans son bilan ?

Les contribuables Allemand et Français. Ils sont en première ligne pour rembourser l’ardoise.

La boucle est bouclée… tout est prévu. Vous pouvez repartir tranquillement à la plage, Draghi veille.

Les faits, monsieur Draghi, où sont les faits ?

Comme le dit très justement la NZZ (Neue Zürcher Zeitung), il sera intéressant de voir la réaction du conseil des gouverneurs de la BCE qui se réunit jeudi prochain, notamment ceux d’Asmussen et Weidmann  « Draghi s’est mis dans une situation extrêmement délicate » disait l’analyste  Carsten Brzeski sur Bloomberg. Pourtant, les orthodoxes n’ont pas la majorité au conseil, ce qui pourrait laisser le champ libre à Draghi…

Et pour revenir aux marchés, la flambée pourrait être de bien courte durée. Dès qu’ils reprendront leurs esprits, ils exigeront de passer à l’étape suivante :

Les faits, monsieur Draghi, où sont les faits ?

Et même s’il le faisait, pensez vous que cela suffirait ?

Est-ce que injecter du cash résoudra les problèmes de fond structurels de nos pays ?

Le problème du surendettement de nos Etats ne disparaîtra pas.

Les problèmes de compétitivité des pays « du sud » seront toujours là.

Les Etats providence à cours d’argent resteront à bout de souffle.

Le problème du financement des retraites futures restera entier.

Croyez-moi, il faudra aller beaucoup, beaucoup plus loin.

Seuls les politiques peuvent sortir les Etats de l’ornière, nous dit la Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Un constat qui ne rassure pas forcément…

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