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Marine Le Pen tente-t-elle de profiter du mariage homosexuel pour tuer le père ?
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Mon papa à moi...

Marine Le Pen a récemment déclaré qu'elle ne participerait pas à la manifestation contre le projet de loi du gouvernement sur le mariage homosexuel. Deux jours plus tard, à l'issue d'une réunion du bureau politique du FN, elle appelait à manifester...

Lorrain de Saint Affrique

Lorrain de Saint Affrique

Lorrain de Saint Affrique est un ancien journaliste.

Proche du Front national, conseiller en communication de Jean-Marie Le Pen de 1984 à 1994, secrétaire départemental du FN dans le Gard et conseiller régional du Languedoc-Roussillon, de 1992 à 1998. Il avait été écarté du FN en 1994 à l’occasion d’un conflit avec Bruno Mégret. Il a publié Dans l'ombre de Le Pen (Hachette Littératures) en 1998. A la suite de l’exclusion de Jean-Marie Le Pen du FN, il renoue avec celui-ci : depuis le 1er octobre 2015, il exerce la fonction d’assistant parlementaire du député au Parlement européen, en charge des questions de presse.

 

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Atlantico : Il y a une semaine, Marine Le Pen faisait savoir qu'elle n'irait pas battre le pavé contre le mariage homosexuel dimanche 13 janvier, arguant qu'elle "ne participerait pas à ce qui est devenu une grossière tentative de récupération politicienne et d’enfumage sociétal de la part de l’UMP et du PS". Deux jours plus tard, la présidente du parti frontiste n'ira toujours pas défiler mais le FN, à l'issue d'une réunion de son bureau politique, appelle à manifester. Jean-Marie Le Pen a-t-il fait plier sa fille sur cette question ?

Lorrain de Saint Affrique: Par esprit de loyauté, je souhaite dire en préalable à la question que, si j’étais parlementaire, je voterais le projet de loi dit « mariage pour tous » du gouvernement.

Ensuite, autant il est sûr que Jean-Marie Le Pen ne s’effacera pas, autant Marine Le Pen n’a pas l’idée d’effacer son père. Cette cohabitation qui mêle politique et sentiments, ressentiments et amour, révélatrice aussi de clivages sérieux, n’offrira néanmoins jamais d’angles d’attaque à quiconque croirait qu’une apparence de fêlure pourrait devenir une fracture. La défense de la famille en général, c’est une chose, mais s’agissant de la famille Le Pen, elle sait se défendre en particulier. Il est vrai que, depuis quelques semaines, l’ambiance au FN rappelle les moments les plus chauds de la campagne interne qui se termina par l’élection de Marine Le Pen confrontée à Bruno Gollnisch. Sous les même plumes, et par les mêmes canaux, sur la place publique, des battus de 2011 cherchent, dans ces milieux, une revanche. Mais le FN d’avant est-il « restaurable », maintenant que le score atteint par Marine Le Pen à l’élection présidentielle l’a fait passée du statut d’héritière à celui de femme politique ? Je me demande si la chance de Mme Le Pen, ces temps-ci, n’est pas d’avoir raté de peu le siège d’Hénin-Baumont : ne pas aller manifester, au prix de contorsions plus ou moins risibles, c’est une chose ; un vote de député de la Nation, une autre chose. Dans un cas, on voit qu’elle est gênée, dans l’autre, on aurait vu qu’elle était coincée.

Il y a quelques semaines, lors de la parution de « Le Pen, Une Histoire Française » signée Pierre Péan et Philippe Cohen, Marine Le Pen a eu à commenter sur une radio l’évaluation de la fortune de son père par les auteurs (entre « 30 et 40 millions d’€ »). Réponse de Marine : «  Je ne sais pas, mais j’espère… L’héritière n’est jamais loin, même quand c’est dit dans un petit rire… Si le vieux a entendu ça…

Au-delà du clivage idéologique, la question du mariage homosexuel au sein du FN n'est-elle pas l'enjeu d'une lutte de pouvoir interne ? Peut-on parler d'affrontement générationnel ?

Je dirais réalisme générationnel : entre ceux qui jouent le coup d’avant-hier, et celle qui tente le coup d’après-demain. Mais le fond de ma pensée, c’est que tout le monde s’en fout, sauf que chacun a une boutique à défendre. Et ma remarque ne concerne pas que le FN, loin de là.

En décembre dernier, le journal d'extrême droite Minute consacrait sa "Une" au lobby gay, notamment au sein du Front national. Selon l'historien et spécialiste de l'extrême droite Nicolas Lebourg "au sein du FN, des cadres accusent effectivement les gays de constituer un lobby, une hiérarchie parallèle." Existe-t-il vraiment un lobby gay au sein du FN ?  Si oui, quelle est son influence notamment auprès de Marine Le Pen ?

Bruno et Catherine Mégret, Jean-Pierre et Marie France Stirbois, Jean-Pierre et Lydia Schénardi, Christian et Myriam Baeckroot, Martine Lehideux et son mari André Dufraisse, je pourrais remplir un annuaire d’exemples qui feraient penser que le Front National est sous le contrôle d’un lobby hétéro qui a trusté postes, mandats, investitures, positions d’influence. Je soupçonne Nicolas Lebourg de prendre plaisir à appliquer ses grilles de lecture d’historien rigoureux et talentueux à un petit monde assez désorienté par ses contradictions intimes autant qu’internes. On bat le pavé, ou on bat sa coulpe ? Telle est la question.

Ce n’est pas le tabou de l’homosexualité ni l’effondrement de la civilisation, le cœur du sujet. Le cœur du sujet, c’est que l’Egalité devenait, devient tabou.

Propos recueillis par Alexandre Devecchio

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