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Mai 68 : "Soit on adhère à la cause, soit on est un chien de garde du capitalisme"
©AFP

Bonnes feuilles

Les acteurs de Mai 68 n’étaient ni inspirés, ni généreux, ni ludiques. Ils étaient ennuyeux, empesés, mal embouchés, mal b... D’où ce malentendu de fond avec ma génération. Lorsque les enfants gâtés de Marx et de Coca-Cola ont accédé au pouvoir, la France a pris des rides et depuis lors le bonheur d’y vivre ne va plus de soi. Extrait de "Mai 68 l’arnaque du siècle" de Denis Tillinac, publié chez Albin Michel. (2/2)

Denis Tillinac

Denis Tillinac

Auteur de plus d’une cinquantaine de livres – romans, essais, récits, poésie – qui lui ont valu
de nombreux prix littéraires, Denis Tillinac, 70 ans, s’illustre par sa pensée libre et son amour de la
France.
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Le même jour, un autre délégué prend la parole dans le même amphi. Délégué par qui ? Une tête en forme de poire, une voix de fausset. Il fume une pipe. C’est un militant de la Ligue communiste internationaliste, Bernard l’a emmené un soir chez Vanessa. Il est au moins trentenaire, il tient une librairie sur les quais où on peut trouver toute la littérature marxiste – et celle « poétique » spécialisée dans la « prise de parole » des gargouillis émanant du bas-ventre. Ils ont voix au chapitre : le corps doit s’exprimer sans tabou.

« Solidarité, camarades, le fascisme ne passera pas. » Comment passerait- il ? Le fascisme n’existe pas en France, ce type prend ceux qui l’écoutent pour des cons. Pourquoi l’a-t-on laissé entrer et dégoiser ? Les gars casqués du « service d’ordre » m’ont à l’œil parce que je traîne mes baskets entre le hall et l’amphi par curiosité et non pour la cause. Mon indifférence agacée doit se lire dans mon regard, je préfère éviter le leur. Ils ne me font pas peur mais j’aimerais mieux les savoir ailleurs.

Qui les a missionnés et équipés ? Pourquoi empêche-t-on de monter sur l’estrade un gars qui voudrait défendre le droit d’aller en cours ? Des militants à brassards l’expulsent manu militari, c’est un « jaune », un « facho », un « social-traître » ou un provocateur. Au choix. Pourquoi le directeur et son adjoint sont-ils invisibles ? Ils ont la trouille. On dit qu’ils vont faire appel aux flics. On dit aussi qu’Occident prépare une attaque. Occident est l’arlésienne qui entretient l’ardeur des militants et permet de racoler les indécis : on en parle tout le temps, on ne voit jamais rien venir.

Le plus déplaisant, c’est cet esprit de sérieux. Ils sèment la pagaille dans les facs, rien de plus, il n’y a pas de quoi se prendre pour des stratèges de haut vol. Le recteur de Nanterre a fermé sa fac mais Pompidou part en voyage en Iran ; si la situation l’inquiétait, on peut supposer qu’il resterait à Paris. Pourquoi cette gravité sur les visages ? Aucun recul, aucun humour, aucun sourire. Fronts plissés, lèvres serrées. Manichéisme sans recours : soit on adhère à la cause, soit on est un chien de garde du capitalisme. Un « faf ». Un indic. Dans l’hypothèse la plus indulgente, un médiocre petit bourgeois « aliéné » par l’idéologie dominante, on en revient toujours là.

Extrait de "Mai 68 l’arnaque du siècle" de Denis Tillinac, publié chez Albin Michel

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