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"Aujourd'hui, Mahmoud Abbas n'a qu'une légitimité relative auprès du peuple palestinien"
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Pouvoir palestinien

A l'issue de sa rencontre avec Nicolas Sarkozy, Mahmoud Abbas a "félicité le président de la République française pour la libération du ressortissant franco-israélien Gilad Shalit". Mais au-delà de l'échange de prisonniers, les deux leaders ont abordé l'épineuse question de la reconnaissance de la Palestine.

Julien Salingue

Julien Salingue

Julien Salingue est Doctorant en science politique à l'Université Paris 8 et enseignant à l'Université d'Auvergne.

Ses recherches portent sur le mouvement national palestinien et sur les dynamiques politiques, sociales et économiques en Cisjordanie et à Gaza.

Il a notamment publié A la recherche de la Palestine : Au-delà du mirage d'Oslo.

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Atlantico : Mahmoud Abbas, le représentant de l’Autorité palestinienne a rencontré Nicolas Sarkozy à l’Élysée ce vendredi. Il l’a remercié pour les "efforts considérables" de la France pour la libération annoncée du soldat israélien Gilad Shalit. Au-delà de cette actualité, que se sont-dit les deux responsables ?

Julien Salingue : On peut penser que l’objectif de la rencontre pour Mahmoud Abbas a été de discuter des suites de la démarche palestinienne aux Nations unies au sujet de la reconnaissance de la Palestine comme Etat. On sait que la France ne s’oppose pas à un vote au Conseil de sécurité des Nations unies. Ils ont aussi dû évoquer des propositions faites par le président Sarkozy sur l’éventuelle reprise d’un processus de paix et étudier dans quelle mesure ses propositions peuvent avoir des traductions pour Mahmoud Abbas dans ses rapports avec Israël.


A son arrivée au pouvoir Nicolas Sarkozy semblait plus atlantiste qu’aujourd’hui. Pensez-vous qu’il y ait un fléchissement de la diplomatie française depuis 2002 ?

Je ne crois pas qu’il y ait de fléchissement particulier. Il y a une certaine continuité. La politique réellement menée sur le plan économique, culturel, etc. est assez favorable à l’Etat d’Israël. Il n’y a jamais eu autant de partenariat entre la France et Israël depuis des décennies.

D’un autre côté, on note la continuité de ce qu’a été la politique française vis-à-vis de la question palestinienne. C’est-à-dire un positionnement diplomatique qui est de s’affirmer comme étant un acteur qui souhaite parvenir à une “thèse juste” entre Israël et la Palestine. Je ne considère pas que Nicolas Sarkozy ait été en rupture avec ses prédécesseurs. Aujourd’hui, son objectif est de soutenir de manière visible les Palestiniens et s’affirmer comme un acteur dans le cadre d’une éventuelle reprise des négociations.


Mahmoud Abbas est il encore un interlocuteur valable dans la mesure où, élu pour cinq en 2005... il est toujours au pouvoir ?

D’un point de vue institutionnel, il n’est plus président de l’Autorité palestinienne. En revanche, il reste numéro 1 du Fatah et de l’OLP. Officiellement, c’est l’OLP qui négocie ; et non l’Autorité palestienne. Mahmoud Abbas a donc une légitimité relative. Il a eu besoin d’un accord de réconciliation avec le Hamas il y a quelques mois, pour pouvoir prétendre parler au nom de tous les Palestiniens, et aujourd’hui sa démarche à l’ONU a été contestée et critiquée y compris dans les territoires palestiniens et pas seulement par le Hamas, par une série d’ONG, de mouvements de gauche, et autres...
Les positions qu’il défend depuis plusieurs années sont décriées dans les territoires palestiniens, qui ont une crainte sur la question des réfugiés. Sa légitimité est très partielle, elle est davantage due à l’Histoire de l’OLP qu’au personnage Mahmoud Abbas, et c’est évident qu’il n’a pas la légitimité qu’avait Arafat pour signer un accord qui apparaîtrait comme bancal.   


Redoutez-vous des risques de débordements suite à la libération des prisonniers palestiniens ?

Des fêtes seront organisées dans beaucoup de villes et de camps de réfugiés palestiniens, puisque certains prisonniers sont en prison de puis plus de trente ans. Pas de débordements, mais une ambiance festive. Sans oublier une certaine déception du côté de ceux dont les familles n’ont pas été libérées. Pour le Hamas, c’est une victoire, Abbas les a d’ailleurs félicités.



On peut penser que la Hamas, fort de cette victoire, devrait se distinguer lors des prochaines échéances électorales ?

Il n’y a pas d’élections de programmée encore, elles sont repoussées. Dans l’accord de réconciliation Fatah-Hamas au Caire, figurait l’idée de mettre en place un gouvernement qui organiserait des élections dans un délai d’un an, mais pour l’instant il n’y a pas d’avancées majeures. Ce qu’il faut, c’est qu’elles puissent être organisées en Cisjordanie et à Gaza, mais pour l’instant les conditions n’étaient pas réunies. Aux dernières élections, le Hamas avait gagné. Sa gestion à Gaza a fait plus de mal que de bien sur le plan de la popularité. Mais avec l’échange de prisonniers, il regagne de la popularité, puisqu’il démontre qu’il arrive à faire ce qu’Abbas n’arrive pas à obtenir : des résultats concrets.     


Pensez-vous que l’Autorité palestienne a eu raison en tentant d’être admis à l’Unesco, faute de l’être à l’Onu ?

En cas d’admission ou autre, ils essaieraient d’être reconnus, d’être recommandés via les autres instances de l’ONU. Est-ce une bonne tactique ? Ce n’est pas surprenant vu que l’objectif est d’obtenir la plus grande légitimité sur le plan international, il est normal d’user de tous les moyens qui sont à leur disposition. Mais cela ne fera en rien changer d’avis les États-Unis, ils ont prévenu qu’ils déposeraient leur veto, rien ni personne ne les en empêchera... 

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