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Les très étranges priorités de la mairie de Paris
©Reuters

Vous avez dit étrange ?

Petit à petit, tout se met donc en place pour que Paris, capitale mondiale du socialisme boboïde turboendetté, coupe définitivement ses amarres au monde réel et dérive gentiment, de Paris Plage en happenings citoyens et festifs, vers un monde fantasmé où les pauvres n’ont plus droit de cité.

Hash H16

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H16 tient le blog Hashtable.

Il tient à son anonymat. Tout juste sait-on, qu'à 37 ans, cet informaticien à l'humour acerbe habite en Belgique et travaille pour "une grosse boutique qui produit, gère et manipule beaucoup, beaucoup de documents".

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Petit à petit, tout se met donc en place pour que Paris, capitale mondiale du socialisme boboïde turboendetté, coupe définitivement ses amarres au monde réel et dérive gentiment, de Paris Plage en happenings citoyens et festifs, vers un monde fantasmé où les pauvres n’ont plus droit de cité.

Et pour cela, rien de tel que d’empêcher ces derniers de circuler dans les rues, et de faire fuir ceux qui ont eu l’impudence d’y habiter.

Pour les empêcher de circuler, rien de plus facile puisqu’il suffit essentiellement d’interdire les voitures trop vieilles : à partir du 1er juillet de cette année, les voitures de plus de 20 ans n’auront pas le droit de rouler dans Paris, au motif qu’elles polluent, les sales !

Quant à faire fuir les pauvres, rien de tel que laisser la délinquance, les incivilités, et mieux encore, l’insalubrité s’installer doucement dans les quartiers où ils habitent. On apprend ainsi que du côté de Château Rouge, rue Dejean, la Mairie ne fait pas vraiment le travail de base qui consisterait ou bien à assurer la tranquillité des riverains, ou bien à assurer la propreté de la rue, cette dernière étant régulièrement investie de camelots et autres vendeurs à la sauvette.

À tel point que ces riverains, fatigués d’années d’immobilisme des autorités, en viennent à lancer une action en justice contre la mairie et l’Etat afin d’obtenir gain de cause.

Peut-être la proximité de Montmartre, haut lieu touristique de la Capitale, incitera-t-elle à intervenir la brigade des Japonais Nettoyeurs, ces effervescents nippons à ce point dépités par la mauvaise tenue de la capitale française qu’ils ont décidé de la nettoyer bénévolement ?

C’est édifiant.

En fait, ces récents développements de l’actualité parisienne imposent un constat triste : l’équipe du maire s’occupe de la pollution la plus médiatique, et dont l’impact sera mécaniquement de plus en plus faible plutôt que de s’occuper de la pollution réelle.

En effet, de toutes façons, le nombre de voitures anciennes diminue inexorablement, la casse et le vieillissement faisant plus que les autorités pour renouveler le parc automobile. La pollution qu’elles entraînent va donc diminuer (ce qu’on observe, du reste, comme un précédent billet le rappelait ici).

En revanche, d’autres pollutions ne semblent guère diminuer :  on voit fréquemment s’entasser à Paris les ordures, déchets et autres détritus qu’une certaine catégorie de camelots illégaux laissent derrière eux, sans parler de la légendaire propreté des Parisiens.

En parallèle à ce triste constat sur la propreté parisienne, force est de constater que concernant la sécurité, mandat normalement impératif de la Mairie dans ce qu’elle a de plus basique, elle n’est même plus réellement à l’ordre du jour.

Ainsi, les radars et autres mesures de rétorsion à l’encontre des automobilistes ne sont même plus présentés comme un gage de meilleure sécurité, mais uniquement pour lutter contre la (méchante, omniprésente et grandissante pollution). D’ailleurs, l’argument sécuritaire s’épuise d’autant que l’abaissement de la vitesse sur le périphérique parisien ne s’est pas accompagné d’une baisse des morts et des blessés ; au contraire, même, puisqu’on a constaté une hausse du nombre de morts (certes statistiquement non significative mais parfaitement à l’opposée de l’effet recherché).

En outre, l’insécurité croissante de Paris n’est plus guère à démontrer ; les mésaventures du quartier Dejean rejoignent celle du XXème arrondissement dans lequel le combat contre l’insécurité semble tourner à la farce pas drôle ; en 2010, je faisais déjà le constat de tensions de plus en plus vives entre la communauté asiatique installée à Belleville et un nombre croissant d’individus interlopes aux pratiques délictuelles voire criminelles. Un an plus tard, la situation ne semblait guère meilleure. En 2015, les mêmes populations de Belleville avaient interpellé Valls devant l’insécurité régnant dans leurs quartiers. À l’aune de cette expérience dans le XXème arrondissement, les habitants du XVIIIème devront donc probablement s’armer de patience et de moult pétitions pour espérer un mouvement de la part des autorités qu’elles payent pourtant fort cher de leurs impôts.

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La simple réalité est que les automobilistes sont fichés (minéralogiquement parlant) ; ils sont donc faciles à traquer, et il est assez simples de leur faire cracher au bassinet le cas échéant, que ce soit pour vrombissements intempestifs ou pour défaut de voiture propre.

La simple réalité est que les habitants des lieux souillés sont faciles à canaliser : locataires ou propriétaires, ils sont dans leur immense majorité en règle avec les lois de la République, ne veulent probablement pas se retrouver en délicatesse avec la police, et ils continueront donc de payer scrupuleusement leur taxe foncière, leurs impôts locaux et ne pourront guère envisager un arrêt franc de leur « aimable participation financière » au service (ou plutôt, son absence) qui leur est rendu par la Mairie.

La simple réalité est surtout que les vendeurs à la sauvette et  les camelots sont, sinon difficile à attraper, au moins insolvables ;  qu’ils représentent, en cas d’arrestation, une charge pour le contribuable, une impressionnante paperasserie pour les policiers, une intense opportunité de pleurnicheries de la part de médias habilement conscientisés, un problème politique en puissance, un accroissement potentiel de la surpopulation carcérale, et une démonstration vivante de l’incapacité de l’Etat et des autorités à faire leur travail. Ignorer leur existence est, à tout point de vue, bien plus facile et bien plus politiquement viable que toute autre méthode.

Il en va de même avec les automobilistes : traquer ceux qui roulent de façon vraiment dangereuse, sans permis, les veines chargés d’alcool ou de stupéfiants, ou l’autoradio à fond sur du Christophe Maé, c’est bien plus complexe, plus coûteux et politiquement bien plus sensible que choper du père de famille en AX ou en 405 diesel qui écoute RTL.

Ainsi vont donc les priorités politiques d’Anne Hidalgo et de son équipe : traquer les pauvres dans leurs vieilles voitures, les poursuivre de taxes, d’amendes et de vexations pour bien leur faire comprendre que la ville est devenu une zone réservée aux bonnes catégories socio-professionnelles dont ils ne font pas partie. Le Club Des Parisiens Qui Adoubent Anne  ne peut s’encombrer de tous ces nécessiteux dans leurs Clios crapoteuses, voyons ! Et tout comme la Mairie de Paris se fera fort de poursuivre les pauvres solvables, elle saura en revanche oublier ceux qu’elle ne sait pas attraper ou gérer, ceux qui sont réellement dangereux et ceux qui polluent pour de bon.

Tout ceci montre un gros problème de cohérence.

De la part de la maire de Paris, on peut bien sûr croire à un désir caché mais bien compris de gentrification de la capitale ; ceci expliquerait cette chasse permanente aux classes populaires, même si un tel acharnement est en opposition diamétrale avec ses discours socialistes officiels (ce qui ne surprendra que les plus naïfs). En revanche, on comprend mal comment obtenir cet embourgeoisement en laissant se développer la petite délinquance et une propreté alternative.

hidalgo lama

La encore, la réalité est simple, et plus pathétique : Anne Hidalgo et toute son équipe n’ont aucun plan d’ensemble, et ils ne gèrent la politique de la ville qu’à la lumière faiblarde de leur toute petite bougie idéologique, qui n’éclaire pas plus loin que le bout de leur nez.

Dans cette improvisation permanente, les petits compromis de dernière minutes écrasent les grands principes dans un bordel ignoré car non directement subi par ceux qui prennent les décisions. Le bénéfice politique immédiat remplace la vision de long terme.

Le dogme remplace le plan.

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