Les patrons français veulent soumettre les candidats à leurs questions qui les taraudent<!-- --> | Atlantico.fr
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Le Medef va recevoir tous les candidats déclarés à l'élection présidentielle de 2022 pour entendre leurs projets.
Le Medef va recevoir tous les candidats déclarés à l'élection présidentielle de 2022 pour entendre leurs projets.
©Joël SAGET / AFP

Atlantico Business

Le Medef s'est donc résolu à organiser ce lundi, un grand oral destiné à tous les candidats à la présidentielle, mais les patrons veulent surtout faire passer des messages qu'ils estiment essentiels pour protéger le développement de l'économie française.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Grand oral, mise à l’épreuve, audition... Les expressions ne manquent pour cet évènement qui aura lieu aujourd’hui dans l’incubateur de start-ups, Station F, dans le 13ème arrondissement, avec une diffusion de l’essentiel des auditions sur BFM Business.

Les grands patrons ont finalement convaincu le président du Medef de recevoir tous les candidats déclarés à la présidentielle pour entendre leurs projets.

Mais en réalité, l’important, dans cette opération, est moins d’écouter les programmes que d’obliger les candidats à entendre les patrons sur l’état de la situation, ce qu’il faudrait faire et surtout ce qu’il ne faut pas faire. Les lignes jaunes, les promesses irréalisables sous peine de créer une situation beaucoup plus délicate que celle qu’ils voudraient améliorer.

En réalité, personne ne se fait d’illusion. Les patrons savent bien que tous ces candidats - sauf un seul (mais lequel ?) - ne seront pas en situation d’exercer le pouvoir. Les candidats, eux-mêmes, sont là pour témoigner et recruter des partisans, mais ils savent bien que leur influence sur la conduite des affaires sera très limitée.

Donc à quoi bon se prêter à ce jeu qui relève principalement de la posture ? Geoffroy Roux de Bézieux n’était guère pressé de se plier à cet exercice théâtral, sauf que le fonctionnement de la démocratie commande ce type de débat, ne serait-ce que pour des raisons pédagogiques à l’adresse des opinions publiques. Concevoir et lancer une réforme est une chose, la faire accepter par l’opinion est parfois plus difficile. La campagne électorale devrait faciliter la prise de conscience du changement.

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1er acte  : Les candidats à la présidentielle vont donc présenter pendant 20 minutes chacun, la politique économique qu'ils entendent mener avant de répondre aux questions des patrons. Exercice purement formel, la plupart des responsables politiques ont déjà eu l’occasion d’aborder des questions économiques devant un public de dirigeants d’entreprise. Sophie de Menthon avait déjà déblayé le terrain en recevant, dans le cadre de l’ETHIC, les principaux candidats.  Donc, personne n’attend de vraies surprises à l’issue de ces auditions. 

Valérie Pécresse aura été précédée par une tribune de Pierre Danon qui répond déjà à beaucoup de questions des chefs d’entreprise, c’était dans Atlantico, la semaine dernière.

Donc Valérie Pécresse va sans doute confirmer son engagement à baisser les impôts mais pas autant que ce que le Medef demande, à savoir la suppression totale des impôts de production pour 35 milliards d’euros.

Éric Zemmour plaide aussi pour un allègement des impôts de production et même la suppression de la CVAE et de la C3S, mais il pourrait aussi ressortir une vieille idée qui avait été expérimentée par Alain Madelin avec les zones franches. Dans ces zones, les entreprises ne paieraient ni impôts de production ni impôts sur les sociétés pendant cinq ans suivant leur installation.

Le problème des zones franches est qu’elles créent des effets d’opportunités qui sont préjudiciables aux zones non franches.

Yannick Jadot aura sans doute fort à faire pour faire admettre son projet de bonus-malus écologique applicable selon les activités, parce que les industriels qui exercent des activités polluantes y verront une attaque frontale et brutale.

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Marine Le Pen reviendra, pour sa part, avec dans sa poche une augmentation de 10% de tous les salaires jusqu'à trois fois le Smic et qu'elle envisage, exemptée de cotisations patronales.

Tous les candidats de gauche, de Fabien Roussel à Jean-Luc Mélenchon, réclameront sans doute un rétablissement de l’ISF, une semaine de 32 heures et une retraite à 62 ans.

2e acte :  le jeu des questions-réponses sera sans doute plus intéressant parce que les patrons réunis par le Medef n’ont pas l’intention de combattre frontalement certains candidats, ils ne vont pas rentrer dans un débat que ne déboucherait sur rien. Les patrons du Medef ont plus l’intention d’interpeller les candidats sur la cohérence d’ensemble des programmes. C’est bien là où le bât blesse.

Chaque responsable propose des mesures qui correspondent aux intérêts du cœur de leur électorat, mais qui peuvent provoquer des dysfonctionnements au niveau de la collectivité ou dans le temps.

La préoccupation majeure des patrons, c’est de savoir qui paie et combien. Toutes les propositions seraient intéressantes si toutes entrainaient des avantages et des améliorations pour tous, pour la collectivité, ce qui n’est pas le cas. Or, les chefs d’entreprise sont très marqués par la nécessité de cette cohérence parce que c’est leur problème quotidien. Leur rôle de chef d’entreprise est de prendre des décisions qui permettent de dégager un compromis entre toutes les parties prenantes de l‘entreprise.

Le client doit être content et fidèle, mais idem pour les salariés, idem pour les actionnaires ou même pour le management. Sans parler de l’écosystème dans lequel l’entreprise se développe. Les préoccupations RSE sont désormais sur le tableau de bord de beaucoup de patrons.

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Les responsables politiques français n’ont pas la culture du compromis, contrairement à leurs homologues allemands, ce qui explique d’ailleurs en partie le succès allemand.

Le Medef et toutes les organisations patronales ont donc un certain nombre de requêtes à adresser aux candidats pour améliorer les conditions de développement de l’appareil de production au bénéfice de tout le monde d’ailleurs : les clients, les salariés, les actionnaires...

Les demandes patronales peuvent se regrouper en trois grands dossiers :

Premier dossier : la compétitivité des entreprises. C’est l’urgence des urgences. Cette compétitivité est globalement la plus mauvaise d’Europe. D’où notre faiblesse à l’exportation. Et notre besoin d’importer.  

Pour le Medef mais pas que, l’amélioration de la compétitivité passe par un allègement de tous les impôts et taxes qui pèsent sur les entreprises (impôts de production, charges sociales) avec en prime une clarification de la question écologique. Si l’écologie est une priorité (ce que les chefs d’entreprise admettent), le pays doit encore statuer sur les responsabilités et l’affectation des couts de protection de l’environnement. Ce débat agite tous les courants politiques mais il n’est pas tranché.

Le deuxième dossier porte sur le modèle social : trop couteux pour les uns, trop généreux pour les autres. La société française n’a pas trouvé le bon compromis entre ceux qui paient le prix fort du modèle social et ceux qui en bénéficient. C’est purement un débat de société mais qui a forcément une composante économique et financière que la France hésite à traiter. Parallèlement, cette question impacte évidemment l’organisation des services administratifs de l’Etat et des institutions sociales, qui ne sont évidemment pas efficaces.

Le troisième dossier porte sur la place de la France dans le monde et pour commencer sur le fonctionnement de l’Europe. Entre le protectionnisme prôné par beaucoup mais irréaliste et le libre échange voulu par d’autres, la France a perdu ses boussoles.

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