Les fonctionnaires, leur rémunération et celle des autres Français : qui sont les gagnants, qui sont les perdants ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Une enseignante lors d'un cours avec ses élèves.
Une enseignante lors d'un cours avec ses élèves.
©THOMAS COEX / AFP

Hausse des salaires

Les 5,7 millions de fonctionnaires en France vont recevoir une nouvelle augmentation de salaire. L'exécutif prévoit une hausse de la valeur du point, qui sert de base de calcul pour leur salaire, à hauteur de 1,5 % au 1er juillet.

Adélaïde Motte

Adélaïde Motte

Adélaïde Motte est journaliste à l'IREF. 

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Atlantico : Après avoir reçu les organisations ce lundi, le gouvernement a annoncé une hausse de 1,5 % du point d'indice des fonctionnaires, qui entrera en vigueur le 1er juillet prochain. Pourquoi les fonctionnaires réclamaient-ils une hausse du point d’indice ?

Adelaïde Motte : En mai, l'inflation sur l'année s'élevait à 5,1% et 14,1% pour les produits alimentaires. Les fonctionnaires, ou plus exactement leurs syndicats, demandaient donc une hausse semblable pour que les agents conservent leur pouvoir d'achat. Vous vous doutez que l'annonce gouvernementale est très en-deçà des attentes des syndicats. Néanmoins, la fonction publique coûte déjà horriblement cher aux Français, pour un service qui laisse souvent à désirer. Le contribuable français dépense plus de 1 800€ de plus que son homologue allemand pour faire fonctionner l'administration, et elle fonctionne mal ! Entre les retraites, les avantages sociaux, les salaires, les primes, le gouvernement, dont le budget est déjà déficitaire, ne peut pas se permettre les augmentations à deux chiffres demandées par les syndicats.

La hausse des salaires des fonctionnaires est-elle légitime quand on la compare ces dernières années à celle des salariés du privé ? Quels sont les équilibres ? Qui sont les mieux payés ?

La comparaison entre les salaires du privé et ceux du public ne peut se faire qu'en gardant à l'esprit la grille salariale. En effet, on pourra vous signaler que les agents les mieux payés perçoivent 30% de moins que ce qu'ils pourraient avoir dans le privé. La grille salariale a progressivement relevé les bas salaires sans toucher aux plus hauts, d'où un tassement. Résultat, la progression salariale et très faible dans la fonction publique. Cette réalité est cependant corrigée par les primes, qui représentent parfois le cinquième de la rémunération des plus hauts salaires.

Dans un communiqué, la CGT a vilipendé une mesure « largement insuffisante », estimant la perte de pouvoir d'achat à 16% depuis 2010. Quelle a été l’évolution des salaires des fonctionnaires ces dernières années ? Comment se compare-t-elle à celle des salariés du privé ?

Plus que de la défense des travailleurs, la CGT s'occupe de combat politique et de lutte des classes. Il aurait donc été surprenant qu'elle se montre satisfaite. Ses revendications sont par ailleurs irréalistes et il ne faut pas les prendre en compte pour évaluer les mesures gouvernementales. On peut en revanche signaler que le salaire des fonctionnaires a été revalorisé de 3,5% en juillet 2022 et de 1,5% cette même année au titre des augmentations individuelles. Sur un temps plus long, le point d'indice est passé de 5,1€ en 2002 à 5,8€ en 2022, soit une augmentation de près de 14%. Ajoutez-y les 1,5% qui viennent d'être annoncés, vous tutoyez les fameux 16% annoncés par la CGT. 

A côté de cela, les salaires du privé n'atteignent jamais 1,5% d'évolution sur une année, si vous considérez les salaires moyens et les évolutions en euros constants. Toutefois, la comparaison est difficile : les postes ne sont pas les mêmes entre le privé et le public, les disparités sont beaucoup plus importantes dans le privé et surtout, l'Etat a moins d'influence sur les rémunérations. Il n'y a donc pas d'homogénéité.

Dans quelle mesure l’inflation impacte différemment les fonctionnaires et les salariés du privé ? Qui sont les gagnants, qui sont les perdants ?

L'inflation comprise comme la hausse des prix impacte tout le monde de la même façon. En revanche, si vous considérez les difficultés de certaines entreprises à se maintenir à flots, vous comprenez que les salariés du privé peuvent perdre leur emploi à cause d'un plan social ou de la fermeture de leur entreprise, alors que les fonctionnaires ont la garantie d'un emploi à vie. 

De façon générale, il faut toujours rappeler les différents avantages du statut de fonctionnaire, systématiquement payés par le contribuable. Les retraites coûtent ainsi à l'Etat plus de deux milliards d'euros, et la note ne serait pas si difficile à réduire : les pensions sont calculées sur les six derniers mois au lieu des vingt-cinq meilleures années et les départs anticipés sont légion. Il existe des agents compétents et efficaces, personne ne le nie. Mais il en existe aussi de peu consciencieux, dangereux ou malhonnêtes, et ceux-là, on ne peut pas les renvoyer, tout juste leur trouver une voie de garage. Les contribuables méritent un service public de qualité, rendu par des agents dont la carrière puisse suivre les résultats... ou les fautes.

Primes, concernant les cadres ou non, entre fonctionnaires et salariés du privé, quels sont les éléments à prendre en compte pour avoir la vision la plus juste possible de la situation ?

Le système de primes est un composant très connu et très particulier du système de rémunération des agents de la fonction publique. Elles sont nombreuses et leur justification est parfois discutable. Citons la prime de présence de certaines collectivités locales ou la prime pour utiliser un ordinateur mise en place il y a des décennies. En 2017, un rapport de la Cour des comptes montrait que l'Etat rémunérait ses agents sur la base de quelques 1 700 textes et 5 400 règles de paie indemnitaires. La rémunération des agents de la fonction publique est donc régie par un imbroglio complètement incompréhensible qui donne bien de la peine à ceux qui voudraient rationaliser tout cela et travailler sur une vénération plus juste et plus compréhensible. Malheureusement, les primes sont une façon assez simple de conserver des privilèges et les syndicats ne sont pas forcément favorables à une simplification.

Pour retrouver la note publiée sur FIPECO : cliquez ICI

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