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Les dieudonnistes crachent aussi sur les tombes.
Les dieudonnistes crachent aussi sur les tombes.
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Salissures

Ils ont apposé leur signature sur un symbole. Histoire de s'échauffer avant la manif du Jour de colère.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Il y a de cela 70 ans, le 22 février 1944, 23 résistants furent fusillés à l'issue d'un procès resté célèbre (une femme, la 24e condamnée, fut envoyée en Allemagne pour y être décapitée). Le gouvernement de Vichy assura leur gloire posthume avec une affiche connue sous le nom de l'Affiche rouge. Il y était question, avec leurs photos, de "l’armée du crime" et ils étaient qualifiés de "judéo-communistes". Presque tous étaient juifs. Mais pas tous, puisque parmi eux il y avait des Arméniens (dont leur chef Missak Manouchian), des Espagnols et des Italiens.

C'est, dira-t-on, une vieille, très vieille histoire. Ce n'est pas faux. Mais ce n'est pas une vieille histoire pour tout le monde. En effet, des mains sales sont, il y a quelques jours, venues taguer la fresque à la gloire de Manouchian qui figure passage du Surmelin dans le 20e arrondissement. Juste deux mots : "shoah nanas". "Shoah nanas" est aux admirateurs de Dieudonné ce que le "Ugh" est aux Peaux-rouges dans les vieux westerns, ce que le "youkaïdi youkaïda" représente pour les scouts traditionnels et ce que (rapprochement plus cohérent) "Heil Hitler" fut aux nazis.

"Shoah nanas" n'a pas fait la une des médias. Contrairement au tag, présenté comme "odieux", affublant José Anigo, l’entraîneur de l'OM, du qualificatif "mafioso". Cris d'indignation, protestations outrées. C'est que c'était tout nouveau tout beau. La fraîcheur de la nouveauté ! Alors qu'un tag antijuif s'inscrit dans une tradition millénaire. Et que cette haine est tellement répétitive qu'elle finit par lasser par sa monotonie et relève de la banalité du mal à laquelle on ne fait plus attention.

Les combattants exécutés le 22 février 1944 étaient, pour la plupart, juifs. Et en tout cas étrangers. Ils aimaient la vie et la France à en mourir. Ils étaient communistes et c'est aussi pour cette raison qu'ils ont fait le coup de feu contre les nazis. Et ils sont morts aussi pour l'honneur du peuple juif, eux qui avaient vu leurs parents, leurs petits frères et petites sœurs partir pour les chambres à gaz. Mais ils étaient avant tout français. Tellement plus français qu'une vieille ganache nommée Pétain. Tellement plus français que les canailles au front bas qui se marrent en écrivant "shoah nanas".

Tel n'est sans doute pas l'avis de Robert Faurisson qui épaule Dieudonné dans son dur combat contre la pieuvre juive. Il a – infatigable explorateur des ramifications du complot talmudique – étudié de près l'affaire de l'Affiche rouge. Et après moult recherches il a livré sa conclusion. Les "terroristes de l'Affiche rouge", a-t-il décrété, ne pouvaient être de "vrais Français". Car "seuls des Juifs pouvaient lâchement tirer dans le dos des soldats allemands". Culture historique oblige, c'est ce qu'ont vaguement compris ceux qui sont allés taguer la fresque de Manouchian, un Arménien pourtant.

Nul doute que Faurisson saura leur dire où ils doivent se rendre pour cracher aisément sur les tombes des morts de l'Affiche rouge. Elles se trouvent au cimetière parisien d'Ivry. La plupart, mais pas toutes, portent l'étoile juive. Reste – et cela se dit partout – que Dieudonné et les siens sont victimes d'une intolérable atteinte à la liberté d'expression. Ça se discute. Et ça peut même se plaider. Mais là il faut pour le coup du donnant-donnant. Peut-être que les adeptes du "shoah nanas" ne devraient pas être poursuivis pour incitation à la haine raciale. Mais en échange il conviendrait qu'on puisse les qualifier d'ordures sans être condamné pour injures !

PS : Une bonne nouvelle quand même pour Dieudonné. L'émission Ce soir ou jamais, de Taddéï, la seule à laquelle il est encore invité, a été déprogrammée du vendredi soir au jeudi soir. Comme ça, les Juifs qui respectent le shabbat pourront enfin le regarder.

A lire du même auteur : Le gauchisme, maladie sénile du communisme, Benoît Rayski, (Atlantico éditions), 2013. Vous pouvez acheter ce livre sur Atlantico Editions.

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