Le tsunami du Covid devait ravager les pays pauvres et émergents. La vague n’est pas venue : que s’est-il passé ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Covid-19 impact économique pays en voie de développement pays riches Afrique Asie coronavirus
Covid-19 impact économique pays en voie de développement pays riches Afrique Asie coronavirus
©JOHN WESSELS / AFP

Résistance face à la pandémie

Les pays en voie de développement ont subi proportionnellement moins de cas de contaminations et de décès pendant la pandémie de Covid-19 par rapport aux autres nations. Comment expliquer que les dommages économiques soient moins importants pour les pays à faibles revenus ?

Alexandre Delaigue

Alexandre Delaigue

Alexandre Delaigue est professeur d'économie à l'université de Lille. Il est le co-auteur avec Stéphane Ménia des livres Nos phobies économiques et Sexe, drogue... et économie : pas de sujet tabou pour les économistes (parus chez Pearson). Son site : econoclaste.net

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Atlantico.fr : En 2020 selon les prévisions, la crise sanitaire devait être désastreuse pour les pays en voie de développement. Mais les conséquences ont finalement été moins douloureuses que prévues. Que pensions-nous qu'il allait leur arriver ?

Alexandre Delaigue : Sur le terrain économique, les annonces étaient extrêmement négatives. Sur le terrain sanitaire, nous pensions que si les pays riches connaissaient des difficultés, celles-ci seraient démultipliées dans les pays pauvres. Les pays riches sont un débouché économique pour un grand nombre de pays émergents et tout le monde pensait que la crise aurait impliqué une crise forte dans les pays en voie de développement.

Alors que les pays du Nord subissent une récession historique, comment se fait-il que ces dommages économiques soient moins importants pour les pays à faibles revenus ? Ont-ils fait quelque chose de particulier ?

Plusieurs facteurs existent. Quand on représente sur une courbe, la mortalité d’un côté et l’impact économique de l’autre, on constate que ces deux aspects sont directement liés. Il n’existe aucun arbitrage entre la santé ou l’économie. Les pays qui ont les plus importants problèmes de santé, ont eu plus de problèmes économiques et inversement. Les pays émergents ont eu moins de problèmes de santé, de ce fait, ils ont connu moins d’effets négatifs sur leur économie.

Nous nous sommes trompés à deux niveaux. Premièrement en imaginant que les conséquences sanitaires seraient beaucoup plus fortes dans les pays émergents. Ce qui n’a pas été le cas. Deuxièmement, en anticipant un arbitrage entre santé et économie. Ce qui n’a pas été le cas non plus.

Sur le continent Africain, les systèmes de santé ont bien réagi mais il ne faut pas oublier la pyramide des âges. Étant donné l’effet diversifié du Covid-19 par âge, automatiquement les pays émergents de l’Afrique ou du Sud-Est asiatique, qui ont une population plus jeune, ont été moins touchés. Les pays d’Amérique latine, qui ont eux une pyramide des âges plus proche des pays européens, ont subi les effets sanitaires et économiques de plein fouet.

Alors qu’on s’imaginait que les pays africains avaient des systèmes de soin défaillants face aux épidémie, ils ont plutôt bien réagi. À côté de leurs lacunes budgétaires indiscutables, ils ont l’avantage d’avoir l’habitude de gérer les épidémies. Ils ont du personnel médical entraîné par l’expérience d’Ebola ou de diverses épidémies. Ils ont eu de meilleurs réflexes que nous. Dans certains pays du Sud-est asiatique, l’expérience du Sars leur a permis de concevoir une meilleure capacité de réaction. Une capacité absente dans les pays riches.

À partir du moment où la crise du Covid a été moins forte, automatiquement l’effet sur les exportations, les industries sont moindres. Il ne faut pas oublier que les pays émergents commercent entre eux et sont aussi moins dépendants des pays riches pour leur activité économique.

Les inégalités mondiales se sont-elles aggravées avec la Covid-19 ?

Il y a un paradoxe à ce propos. Il semble que les inégalités mondiales se soient légèrement réduites dans l’année 2020 à cause de cet écart de récession. On parle d’inégalités de revenus par pays, mais au niveau individuel, nous n’avons pas les éléments permettant d’identifier cela.

Y-a-t-il des éléments intéressants que nous pourrions appliquer à notre gestion de la crise ?

Il y a une série de réflexes qui auraient pu être acquis étant donné que les autres avaient de l’avance. Maintenant, si une autre épidémie survient l’acceptation sociale du port du masque sera plus comprise par la population. À l’avenir, comme en Asie du Sud-Est, on peut croire que le port du masque sera envisagé en cas de maladie respiratoire en Europe.

On pourra aussi retenir la leçon de la Chine. L’homme politique en charge de la réaction sanitaire avait de l’expérience,  il l’a acquise lors d’interventions d’aides humanitaires durant les crises d’Ebola en Afrique. Il était en charge de la réaction Sars au début des années 2000 et a utilisé tout son savoir pour la Covid-19. À l’avenir, il est nécessaire d’apprendre l’importance de s’entourer de personnes expérimentées.

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