Le prix émotionnel de l'adultère<!-- --> | Atlantico.fr
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L'adultère est toujours un choc pour celle ou celui qui le découvre.
L'adultère est toujours un choc pour celle ou celui qui le découvre.
©Reuters

Libération des mœurs ou pas

L'adultère, ou du moins l'infidélité, est un sujet à la mode en ce moment. Toutefois, sa découverte, quand elle est avérée, est toujours un traumatisme pour la personne trompée. Les différences de perception entre les hommes et les femmes sont en revanche de moins en moins nettes.

Sabrina Philippe

Sabrina Philippe

Sabrina Philippe est psychologue-conseillère chez e-Darling, spécialiste des relations amoureuses.

Elle est l'auteur du livre "Amour toujours : toutes les clés pour réussir votre recontre sur internet", aux éditions Solar.

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Atlantico : Selon l'une de ses amies, citée par Le Point, en apprenant la liaison supposée entre François Hollande et Julie Gayet, Valérie Trierweiler se serait "pris un TGV dans le buffet". Pourquoi la découverte d'un adultère ou d'une infidélité est-elle à ce point violente pour la personne trompée ?

Sabrina Philippe : C'est la trahison, le fait que l'autre ait pu mentir, plus que l'acte en lui-même qu'il ait pu tromper son compagnon et le cacher, qui est violent pour la personne trompée. Un couple est basé avant tout sur la confiance, sur la connaissance de l'autre, même si l'on sait qu'on ne le connaît jamais complètement. Il y a toujours une part d'ombre, évidemment, mais on souhaite que cette part d'ombre soit la plus fine possible. Derrière l'adultère, il y a l'acte de mentir, de cacher des contacts, des mails, des appels, des échanges, des absences. L'autre se révèle sous un autre jour et est capable de vous mentir, de cacher, de dissimuler.

Quels sont les sentiments qui traversent la personne trompée ? 

On s'est trompé soi-même et on ne l'a pas vu. Dans les sentiments qui traversent la personne trompée, il y a de la culpabilité : je n'ai pas vu, je n'ai pas su voir, je me suis trompé sur l'homme ou la femme qui partageait ma vie. Mon jugement n'était pas bon. Comment savoir alors si le jugement sera bon la prochaine fois ?

Je crois en revanche qu'il y a de moins en moins de honte. Aujourd'hui, la diversité des relations, les possibilités, les choix qui sont offerts, font que l'adultère est beaucoup plus admis ; plus précisément, la possibilité de l'adultère est admise. Une femme travaille, rencontre des personnes, bouge… Le modèle a évolué.

Est-ce que les femmes le vivent différemment des hommes ? Pourquoi ? Est-ce à cause du regard porté par la société ?

Je ne suis pas sûr qu'en réalité les femmes le vivent si différemment que les hommes. Il y a évidemment une différence de perception mais plus qu'au sexe, je pense que cette différence est d'avantage liée à l'image que l'on a de soi-même. Plus vous avez une image de vous qui est assez stable, forte, moins le fait d'être trompé va faire mal. Être trompé, c'est se tromper soi-même. C'est exactement la même chose que lors d'une séparation.

Si vous avez une personnalité plutôt forte, bien assise, bien construite, l'adultère ne dépassera pas le fait de vous être trompé. Si vous avez une personnalité plus fragile, cela va remettre en cause ce que vous êtes. C'est une question de personnalité mais également de moment de vie puisqu'on peut tous être dans un moment de fragilité à un instant T. Cela va compter dans la perception de l'adultère, tout comme l'amour que l'on porte à l'infidèle, évidemment.

Comment le vivent les hommes ? Est-ce moins grave pour eux ?

Je ne crois pas que les hommes dédramatisent totalement l'adultère dans la mesure où ils continuent à le cacher. Nous ne sommes pas encore arrivés à une époque où l'on vit tous des relations adultères au grand jour, ce qui a d'ailleurs été le cas à certaines époques où l'adultère était accepté. La différence entre les hommes et les femmes est en train de s'atténuer sur ce point-là.

Chez la nouvelle génération, les hommes ont intégré la possibilité que leurs femmes peuvent les tromper. L'apparition de sites dédiés à l'adultère comme Gleeden, certaines publicités, font partie d'une communication médiatique qui sous-entend que tout le monde trompe tout le monde. On a une dédramatisation de l'acte alors que l'acte ne reste pas banal. L'adultère est diffusé largement d'un point de vue médiatique mais, quand on le vit personnellement, ça reste un traumatisme. C'est exactement comme le divorce.

Une étude du Pew Research publié par le site Quartz indique que 40% des Français considère l'adultère comme "moralement inacceptable". Nous sommes loin derrière des pays comme l'Allemagne (60%), l'Espagne (64%), les États-Unis (84%) ou encore l'Indonésie (94%). L'adultère est-il un trait culturel de la France ?

Nous avons un passé historique qui fait que la France a toujours été le pays de l'amour, du plaisir, voire du libertinage. Culturellement, religieusement, il est évident que nous n'avons pas la même histoire que la Turquie. Le Paris libertin a, par exemple, toujours existé. Dans les années 1920, Paris était connu pour ses fêtes grandioses et débridées. Les petites femmes de Pigalle n'est pas un phénomène nouveau.

Même sous la monarchie, des maîtresses étaient plus célèbres que certaines reines comme la marquise de Montespan (favorite de Louis XIV, ndlr) ou la marquise de Pompadour (favorite de Louis XV, ndlr). Elles sont restées dans l'histoire. Tout cela joue dans la perception que nous, Français, pouvons avoir de l'adultère. Ce n'était pas représenté, voire glorifié comme cela dans les autres pays. L'adultère a toujours fait partie de notre histoire. Nous ne sommes pas les États-Unis : le puritanisme à l'américaine, ce n'est pas pour nous, pas encore. Cela peut évoluer. Il y a toujours eu des mouvements de retour à la morale après des mouvements libertaires.

La vie privée de François Hollande, dont une partie semble avoir été dévoilée la semaine dernière par le magazine Closer, s'inscrit-elle dans cette lignée ?

L'affaire Hollande-Trierweiler n'est, de ce point de vue, pas étonnante. On a eu auparavant un président qui a divorcé puis, dans la foulée, a épousé une chanteuse. On a eu Dominique Strauss-Kahn, favori pour la présidentielle qui se retrouve en prison pour une histoire de mœurs. Ce n'est pas rien. Ce sont nos figures de proue et elles sont assez représentatives de ce que nous sommes. Je ne suis pas sûr que l'on soit près d'apprendre qu'Angela Merkel a un amant.

Et puis, Julie Gayet est une belle femme. Le fait que cet homme puisse avoir une femme de cette beauté, on se dit qu'il est plus malin qu'on le pensait. Le sentiment que cette situation génère est très ambivalent. Finalement, on dénonce plus le fait qu'il se soit fait prendre (si cela est confirmé, NDLR).

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