Le marché de la mycose ou tous les dangers de la médecine marketing<!-- --> | Atlantico.fr
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La mycose est une des causes de consultation les plus fréquentes chez les gynécologues.
La mycose est une des causes de consultation les plus fréquentes chez les gynécologues.
©DR

Bonnes feuilles

Le gynécologue Marie-Claude Benattar alerte sur les dérives de patientes devenues "consommatrices de santé". Extrait de "Pilules de 3ème génération, vaccin anti-cancer du col de l’utérus... : La santé des femmes en danger" (2/2).

Marie-Claude Benattar

Marie-Claude Benattar

Marie-Claude Benattar est gynécologue, diplômée en gynécologie psychosomatique. Elle est pionnière dans la technique de l'amplification du point G.

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La mycose est une cause fréquente de nos consultations, mais aussi la plus galvaudée. Je vous explique.

(...)

Nous voyons vos mycoses presque toute l’année, avec un pic de fréquence en été et hiver. (...) Elle se soigne très facilement et simplement et parfois même disparaît d’elle-même, sans rien faire, si ce n’est que de patienter quelques heures.

En revanche, elle peut devenir récidivante, donc chronique, lorsqu’elle est sur traitée ou confondue avec une simple irritation. Avoir une mycose vulvo-vaginale est certes très gênant : ça gratte, ça démange, mais ce n’est pas contagieux, même si le déclenchement survient juste après un rapport sexuel et même si cela irrite votre partenaire. Cela se traite facilement, nous y reviendrons. Pourtant, cette affection bénigne est devenue la « grande affaire », un motif de consultation extrêmement fréquent et récurrent pour certaines patientes qui ont du mal à modifier leurs habitudes et les conduites thérapeutiques stéréotypées.

Il s’agit aussi d’un marché juteux pour les laboratoires, mais plus grave, c’est également la cause d’un vrai calvaire plombant toute vie sexuelle à la longue.

En pleine expansion, le marché de « la mycose » fait l’objet de dépenses abyssales depuis une vingtaine d’années voire plus. Pourquoi ?

- Vous pouvez acheter votre traitement sans ordonnance et sans avoir consulté. Malheureusement, dans 80 % des cas, vous n’avez pas de mycose. Vous en avez tellement peur, qu’au moindre chatouillement, vous vous précipitez chez le pharmacien qui vous délivre toute la panoplie : savon, crème, ovules, même s’il s’agit seulement d’une petite irritation externe passagère.

L’ovule mis vous brûle encore plus, alors vous en remettez un autre, cela brûle toujours, encore un autre… Quand vous nous consultez, vous en êtes au stade de la réaction allergique, vos tissus sont gonflés, rouge vif, fissurés, hypersensibles. Parfois, votre sexe est devenu si « éléphantesque » que j’en ai mal pour vous. Il ne reste plus comme choix que d’éteindre le feu, vous faire la leçon, réparer les tissus congestionnés, vous interdire l’automédication pour l’avenir.

- Vous prenez souvent des antibiotiques, par exemple prescrits par votre dermatologue pour une peau granuleuse, mais sans qu’ils ne soient accompagnés de la prise de lactobacilles pour régénérer la flore. Vous devenez candidate à la mycose chronique, une consommatrice d’ovules antimycosiques mensuels ; votre vie sexuelle vire au calvaire, si par malheur personne ne vous dit « stop » et vous explique comment il faut faire.

- Vous avez peur des M.S.T. Dès que vous avez un petit copain, à l’affût du moindre changement d’abondance, d’odeur ou de couleur de votre fluide vaginal (qui se met au diapason justement pour vous protéger), vous multipliez la fréquence de la toilette vulvo-vaginale, au point de vous trouver assez rapidement avec un périnée fendillé, des lèvres boursouflées et un vagin brûlant au moindre contact.Au pire, vous allez chez le pharmacien pour « mycose » et dans la plupart des cas, il aggrave votre cas. Au mieux, vous consultez pour « infection » et partez dépitée et dubitative après avoir pris connaissance des règles de bonne conduite hygiénique, c'est-à-dire avec l’interdiction de vous « sur laver » dans l’avenir sous peine de subir une gêne chronique.

- Vous avez découvert les déodorants sexuels, les lingettes, les savons, les brumes, les gels, les protège-slips tout spécialement proposés dans l’idée que votre sexe serait plus attrayant. Vous les utilisez avec allégresse sans vous rendre compte que vous agressez vos tissus, supprimez toutes vos défenses naturelles. Les laboratoires qui commercialisent les savons au départ antibactériens, ont été avertis par le corps médical et ont élargi les gammes en passant allègrement d’un pH trop acide au pH neutre (alors que le pH spécifique de la zone vaginale, acide, est compris entre 4 et 4,5), mais en continuant à entretenir l’illusion que ces produits sont absolument nécessaires. Ils ne font que vous entraîner vers des habitudes néfastes.

(...)

Cela fait plus de vingt ans que je soigne les mycoses sans donner d’ovules ou de crème antimycosique. Il suffit de les remplacer par des ovules ou une crème de probiotique. Ils hydratent et réparent avec l’avantage de soigner sans agresser ni affaiblir le système.

Cela fait plus de dix ans que je mets en garde contre l’usage abusif des savons ou gels pour la toilette gynécologique : il faut arrêter de savonner son sexe quotidiennement, que ce soit avec un savon spécial ou pas. Depuis que les femmes ménopausées ne prennent plus d’hormones per os, elles doivent absolument, même si beaucoupn’aiment pas trop cela, nourrir leur vagin trois fois par semaine en mettant des crèmes ou des ovules hydratants, indispensables même en dehors de toute pratique sexuelle, pour éviter cystites, vaginoses bactériennes ou brûlures chroniques. La carence hormonale entraîne un amincissement des muqueuses sexuelles et son assèchement avec un pH élevé à 7 (similaire à l’enfant).

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 Extrait de "Pilules de 3ème génération, vaccin anti-cancer du col de l’utérus... : La santé des femmes en danger" (© Editions J.Lyon), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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