Le DailyBeast recueille les confessions d'un espion repenti de l'Etat Islamique<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Société
"Abu Khaled" (ce n'est pas son vrai nom) serait un ancien de l'Etat islamique qui aurait aujourd'hui quitté l'organisation.
"Abu Khaled" (ce n'est pas son vrai nom) serait un ancien de l'Etat islamique qui aurait aujourd'hui quitté l'organisation.
©madameoumadame.fr

De l'intérieur

Selon ce témoignage d'un ancien membre de l'organisation terroriste, l'Etat islamique veut vraiment devenir un Etat et une armée, mais fait encore preuve d'amateurisme.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

Voir la bio »

"Abu Khaled" (ce n'est pas son vrai nom) serait un ancien de l'Etat islamique qui aurait aujourd'hui quitté l'organisation. Syrien et musulman de naissance, mais jamais profondément islamiste de conviction, il aurait rejoint le groupe islamiste à moitié par opposition à Assad, à moitié par goût de l'aventure. Il aurait été membre de l'Amn al-Dawla, la "sécurité d'Etat" de l'Etat islamique. Puis il l'aurait quitté, convaincu que se battre avec l'Etat islamique ce n'est pas se battre pour l'avenir de la Syrie, faisant de lui un homme mort si l'Etat islamique le retrouve. Le journaliste du Daily Beast Michael Weiss, expert de l'Etat islamique, ne peut évidemment pas corroborer son histoire, mais après plusieurs semaines d'entretien par Skype et WhatsApp, décide de lui faire confiance, et recueille son témoignage.

Ce qui ressort d'abord de son témoignage sur l'Etat islamique, c'est un mélange étrange de professionalisme et d'amateurisme. 

Le professionnalisme, d'abord : l'Etat islamique se décrit donc comme un "Etat" islamique, même, la nouvelle incarnation du Califat qui est censé établir le règne de l'Islam (radical bien sûr) sur la terre. Pour rentrer dans l'Etat islamique, ce n'est pas comme rentrer dans une mafia ou un autre groupe souterrain. Il y a des procédures bureaucratiques. Il faut demander la nationalité et se soumettre à une enquête. Après s'être rendu à un checkpoint et avoir demandé à devenir membre de l'Etat islamique, il est transféré à "l'Ambassade de Homs"- le lieu où les membres potentiels syriens sont reçus - puis ensuite au "Département de l'administration des frontières." L'Etat islamique a publié des vidéos de propagande où les combattants étrangers de l'Etat islamique brûlent solennellement leurs passeports, symbolisant le fait qu'ils s'engagent définitivement. En réalité, les passeports étrangers sont confisqués. Par qui ? Le "Département des ressources humaines." On est loin de l'organisation décentralisée en cellules autonomes d'Al Qaida. L'Etat islamique se veut vraiment être un Etat et une armée.

En parallèle, l'amateurisme. Pour devenir "citoyen" de l'Etat islamique, il faut passer un enseignement en doctrine islamiste et en charia. Mais voilà, les "enseignants" de l'Etat islamique sont des jeunes d'une petite vingtaine d'années, venus d'un peu partout, et qui ne parlent pas toujours la langue de leurs élèves, et, parfois, n'en savent pas plus sur l'islam que leurs "élèves."

RETROUVER NOTRE DOSSIER COMPLET SUR LES ATTENTATS DE PARIS

Puisque l'Etat islamique a tellement de combattants internationaux, la langue est un problème. La plupart des nouvelles recrues ne parlent même pas l'arabe classique qu'un étudiant du Coran devrait connaître. Le syrien "Abu Khaled", parlant arabe, français et anglais, est précieux, et devient interprète.

L'Etat islamique a aujourd'hui perdu son aura d'invisibilité. Ses combattants étrangers ne sont pas vraiment formés, et se sont fait décimer à la bataille de Kobani, la première défaite de l'Etat islamique, par les peshmergas kurdes entraînés et soutenus par des frappes américaines. Pour "Abu Khaled", la direction de l'Etat islamique a changé son fusil d'épaule par rapport aux combattants étrangers : au lieu de les faire venir sur son territoire pour s'y renforcer, il essaye maintenant de les renvoyer dans leur pays d'origine pour y former des cellules et attaquer les "croisés" là-bas - peut être une explication de la recrudescence d'attaques de Daesh hors de son territoire? On pense à Paris évidemment, mais aussi aux attentats à la bombe d'Ankara récents et à l'explosion de l'avion de ligne russe au-dessus de l'Egypte.

Portrait intéressant, donc, et probablement crédible, de l'Etat islamique. La suite au prochain épisode -"Abu Khaled"- a d'autres histoires à raconter…

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !