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La guerre des entrepreneurs milliardaires. Imaginez la scène en France
©Reuters

No way

Michael Bloomberg, l'ancien maire de New York, a officialisé sa candidature aux primaires démocrates. Une telle situation est impensable en France. Un milliardaire candidat ? Non, il n'aurait aucune chance.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Imaginez cette scène. Bernard Arnaud face à François Pinault son éternel EnnAmi ? Xavier Niel face à son beau-père? La seule certitude c’est que faute de beaucoup de milliardaires français, nous aurions bien du mal à avoir l’embarras du choix. Peu de femmes, à part l’héritière de l’Oréal. Bref, un combat sans combattants. Néanmoins, pour la beauté du geste, revenons sur la candidature de Michael Bloomberg, 3 fois Maire de New York, et milliardaire s’il en est, pour imaginer sa transposition en France, ce pays qui hait la réussite et les déteste, même lorsqu’ils paient les impôts du reste de la population et que leurs entreprises emploient des dizaines de milliers de Françaises et Français. Radiographie de « science-fiction » d’une impossibilité historique et politique.

Trump pourrait, peut-être, plus facilement, être Président en France. Il y a un petit côté « Bernard Tapie » chez cette homme-là. La gouaille rocailleuse, une impossibilité à n’avoir peur de rien, un culot taillé dans le marbre, le verbe haut, et une incapacité à estimer réellement sa fortune. Ce profil pourrait plaire par certains côtés, notamment l’aspect « anti-establishment » affirmé. Un Mélanchon de droite en somme, né riche au lieu de naître de parents communistes (en tous cas c’est la légende) comme notre Nanard préféré. Cela resterait néanmoins un exploit sidéral dans notre pays. Un pays qui depuis quelques célèbres découpages de têtes, a affirmé sa détestation pour les « possédants » (avec quelques raisons à l’époque). Et qui depuis, a transformé cet apprentissage violent en doctrine du quotidien. Qui depuis a fait de l’histoire une répétition quotidienne, comme une punition pour l’éternité, d’avoir un jour, tenté de manger seul la pomme.

En France, les milliardaires fréquentables doivent être de gauche. Les communistes en ont eu quelques-uns, célèbres. Doumeng pour les plus âgés de mes lecteurs. Mitterand était entouré, comme tous les hommes qui étaient de gauche faute de place à droite, de milliardaires de tous poils. Qui ont profité assez grassement et largement, des affaires de la gauche, à qui l’on pardonnait tout, puisqu’il s’agissait non d’un enrichissement injuste mais de rééquilibrage historique ; non de corruption, mais de justice et d’alternance. Et il y avait aussi les milliardaires qui avaient le droit de l’être, car il donnait à la France un rayonnement culturel. C’était le cas du pygmalion de St Laurent, l’insupportable Bergé. Un homme qui aimait les artistes, aussi profondément, ne pouvait être montré du doigt. 

Mais un milliardaire, de droite, ou pire, non affiché de gauche, c’est insupportable et inadmissible. Michael Bloomberg n’aurait pas l’ombre d’une chance en France. Ses origines personnelles le condamneraient d’emblée auprès d’une majorité, qui confond encore le Hamas avec le Club Med, et qui pense qu’Edwy Plenel est le gendre idéal, même teint au charbon, et que Zemmour doit être interdit d’antenne, au nom de la démocratie, bien entendu. 

Un homme qui a gagné de l’argent, ne peut en aucun cas êtres passionné par l’intérêt général. Un homme qui est devenu milliardaire, en construisant un empire, en créant des emplois, pardon, en exploitant son prochain pour s’enrichir, a non seulement, et certainement, beaucoup à se reprocher, mais, il est certainement trop égoïste pour se préoccuper du sort de son prochain. Il est vrai que nos politiques, altruistes comme nous avons pu le réaliser, et pauvres, comme nous avons pu le constater également, satisfassent tellement aux critères du parfait serviteur de l’intérêt publique et ont une réussite tellement insolente dans nos pays Européens, que nous aurions bien tort de tenter d’autres profils !! 

Nous aurions déjà des gilets rouges dans la rue, les descendants du milliardaire communiste à coup sûr. Ils viendraient piller ce qui resterait à piller autour de l’Etoile, avant de s’offrir un lot de consolation Place d’Italie, afin de manifester leur dégoût d’un pouvoir qui irait à ceux qui sont déjà responsables de son désarroi. De sa pauvreté. Sans penser un seul instant, que la réussite de ce si petit nombre, qui n’a en général rien volé et a construit son empire de ses mains, permet d’alimenter tous les systèmes sociaux qui lui permettent de monter manifester à Paris, sans craindre pour son salaire, sa protection sociale et ses minimas sociaux. 

Jamais un entrepreneur, et encore moins milliardaire, ne pourrait prendre le pouvoir en France, car le pouvoir ne veut pas de lui. Le pouvoir l’a désigné comme cible, à la vindicte populaire, afin de diriger sa rage et éviter la concurrence. C’est « smart » de la part d’une classe politique, qui sait que se frotter à la concurrence pourrait lui coûter sa place. Or, l’intérêt personnel, en France, comme dans nombre de pays, reste l’intérêt primaire du politique et surtout du haut fonctionnaire. La diversité des points de vue qu’exigerait une renouvellement de nos institutions, de notre vision, de notre idéal, se heurtera à cette barrière idéologique, la dernière idéologie encore en place dans notre pays, celle de la haine de la réussite. Alors, nous pourrons peut-être, quoi que j’en doute, assister à un combat de titans, mesuré en compte en banque, entre 2 milliardaires, que tout oppose, mais que l’Amérique rassemble, dans une ouverture que malgré tous ses défauts, cette démocratie sait se réserver et réinventer. Ce pays qui a déjà vu des femmes pouvoir prétendre à la course à la Présidence, pour succéder à un homme noir. On avait pour habitude de dire que tout ce qui venait des USA finissait en France 10 années plus tard. Le digital semblait avoir raccourci ces délais. Pour tout. Sauf pour la politique. Pour cette révolution-là, il faudra à nouveau couper des têtes. Qui sait si ce sont les bonnes qui tomberont ?

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