La BCE célèbre les 25 ans de l’euro dans l’indifférence absolue des Français. Voilà ce qu’ils auraient pourtant intérêt à en retenir<!-- --> | Atlantico.fr
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La présidente de la BCE, Christine Lagarde, accueille les anciens présidents de la BCE, Jean-Claude Trichet et Mario Draghi, pour le 25 e anniversaire de la BCE, à Francfort, le 24 mai 2023.
La présidente de la BCE, Christine Lagarde, accueille les anciens présidents de la BCE, Jean-Claude Trichet et Mario Draghi, pour le 25 e anniversaire de la BCE, à Francfort, le 24 mai 2023.
©Daniel ROLAND / AFP

Flons-flons

La Banque centrale européenne a célébré ses 25 ans ce mercredi. A quel point l’euro s’est-il construit sur la monnaie allemande, au détriment, notamment des Français ?.

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega

Don Diego De La Vega est universitaire, spécialiste de l'Union européenne et des questions économiques. Il écrit sous pseudonyme car il ne peut engager l’institution pour laquelle il travaille.

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Frédéric Farah

Frédéric Farah

Frédéric Farah est économiste et enseignant à Paris I Panthéon Sorbonne.

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Atlantico : La BCE célèbre les 25 ans de l’euro dans l’indifférence absolue des Français. Au regard de l’impact de ce dernier sur nos vies, ne devrions-nous pas plus nous en préoccuper ?

Don Diego de la Vega : Oui, c'est, c'est curieux. Les gens ont en tête qu'il y a une crise immobilière qui commence. Les gens ont en tête que ce n’est pas toujours facile d'obtenir un crédit à sa banque depuis quelques mois. Les gens n’ont pas en tête que les questions de monnaie sont très importantes, mais ça, ils ressentent quand même. Et malgré ça, on a l'impression que la BCE et tout cela se passe dans une autre dimension et qu'il n'y a pas de lien avec nos institutions, celles-là même qu'il faudrait éventuellement challenger, évaluer, etc.

On ne peut malheureusement pas reprocher ça à l'opinion parce que c'est ce que pensent les politiques eux-mêmes. Ils ont satellisé ce sujet. Et eux-mêmes ne questionnent jamais la BCE. On ne peut pas demander à un peuple d'avoir un esprit critique sur les questions monétaires et la gestion de la monnaie lorsque leurs représentants élus ont délibérément éloigné ces questions en les fédéralisant. En Europe, par exemple. Ils ont confié ces responsabilités à des personnes prétendument indépendantes, ce qui signifie en réalité qu'elles sont inamovibles et irresponsables. Il est injuste de reprocher aux gens leur attitude insouciante vis-à-vis de la monnaie lorsque leur classe politique a délibérément dépolitisé ce sujet. 

Par ailleurs, les questions monétaires sont souvent très contre-intuitives. Il y a des aspects qui ne sont pas évidents, alors que le peuple a une compréhension assez claire de la fiscalité et du budget. En France, par exemple, nous avons environ 60 millions de spécialistes en raison de l'expérience vécue de remplir la déclaration d'impôts. De manière plus générale, chacun a son opinion sur les questions budgétaires, mais dès qu'il s'agit de toucher à la monnaie, les choses deviennent plus complexes. C'est là la raison fondamentale d'un problème. Ces questions ont été reléguées à tort ou à raison dans un domaine plus éloigné, et maintenant, pour reprendre le contrôle, même si cela est intéressant d'un point de vue concret, cela n'est pas évident car cela a été relégué à des sphères étrangères. J'ai l'impression que ce n'est plus vraiment notre affaire, que c'est devenu quelque chose d'autre en réalité, et cela se propage sans qu'on puisse le voir ou l'ignorer.

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Frédéric Farah : Généralement les anniversaires de la construction anniversaire: 50 ans du traité de Rome, les trente ans du traité de Maastricht, ou encore la journée du 9 mai, jour de l'Europe suscitent une vaste indifférence. La communication des institutions européennes n'aide pas non plus. Devrions-nous en préoccuper davantage? Certainement, et cela ne fait pas le moindre doute. Mais les citoyens sentent bien que, quel que soit le degré de leur préoccupation, leurs capacités à infléchir les orientations de la politique monétaire sont nulles. L'euro a été conçue et partant la Banque centrale comme autant de cordons sanitaires pour tenir loin la gestion de la monnaie du peuple.

En somme peu importe la couleur de la majorité au pouvoir, la politique monétaire demeure loin de l'action du corps électoral. La banque centrale européenne est par les traités,  la plus indépendante du monde.

La question demeure de savoir quels gardes fous réels les citoyens peuvent disposer pour influer sur la politique monétaire. La monnaie devrait redevenir ce qu'elle a toujours été et ce qu'elle est encore à savoir politique. La monnaie, c'est avant tout une affaire de pouvoir, de souveraineté. L'euro est la première monnaie sans souverain dans l'histoire.

Il est important que le souverain en démocratie, c'est à dire le peuple par la voie de ses représentants s'empare de la question monétaire et exerce une pression sur ses dirigeants pour que la Banque centrale fasse l'objet de contrepoids nationaux et ou européens plus significatifs. Ce serait le minimum pour commencer. Cela est d'autant plus nécessaire que la BCE a acquis depuis la crise des dettes souveraines de 2011-2013 un poids sans précédent dans sa jeune histoire.

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Ceux qui n'ont pas manqué de souhaiter bon anniversaire à la BCE, c'est la Bundesbank dans un communiqué dans lequel il est dit que la politique de stabilité de la Bundesbank a conduit le Deutsche Mark à devenir la monnaie d'ancrage et de référence de la BCE. A quel point l’euro s’est-il construit sur la monnaie allemande, au détriment, notamment des Français ?

Don Diego de la Vega : Après la deuxième guerre mondiale, les Allemands n’avaient plus la main sur grand-chose. Par un mécanisme de compensation, ils se sont dit qu’ils allaient devenir bons dans les domaines où ils pouvaient aller, notamment la monnaie. Dans les années 70, il y a eu un choc. Le Deutschmark s'en est bien sorti et la Bundesbank a récupéré une sorte de magistère moral et intellectuel, en fait une sorte de domination sur toutes les autres banques centrales d’Europe. Un mécanisme de change s’est développé, qui était calqué sur le Deutschmark qui est devenu la monnaie de référence, ce qu'on appelle l'encre nominale. Cela a donné à la banque centrale allemande un pouvoir colossal sur l'ensemble du système. On l'a vu. Cette légitimité, la Bundesbank, évidemment, n'allait pas y renoncer. Donc elle a accepté l'euro, mais à condition que ça se passe à ces conditions. Avec sa gouvernance, avec ses méthodes, ses hommes et ses pratiques. Par exemple, ils ont accepté qu'une Banque centrale européenne et un euro, mais se sont organisés pour qu’elle soit localisée à Francfort, qu’il y ait une sorte de surmoi germanique dans quasiment toutes les décisions, avec un staff très pro germanique. Ils se sont organisés par exemple, pour qu' il n’y ait quasiment pas de transparence, car la Bundesbank a une tradition de secret. Bref, ils ont accepté le principe de l’euro à condition de contrôler le système. Beaucoup d’économistes ont du mal à voir cela, estimant que la Bundesbank a avalé beaucoup de couleuvres, que les temps ont changé, etc.  Mais au moment du quantitative easing, la Bundesbank est allée en justice pour essayer d'empêcher la BCE d’agir. En matière de régulation bancaire, la Bundesbank s'est débrouillée pour que les banques régionales allemandes ne fassent pas partie du système. Une action menée grâce à ses alliés autrichiens, finlandais, hollandais et cetera. Ils ont donc un contrôle fort, tandis que tous les autres ont un complexe d’infériorité. Cela fait que les arbitrages sont toujours en faveur de la conception allemande des banques centrales, d’une indépendance radicale, mais imprégnée des intérêts allemands. 

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Frédéric Farah : L'euro par sa conception même est un mark qui ne dit pas son nom. Pour le dire encore autrement, l'euro est l'autre nom du mark sans ses inconvénients pour l'Allemagne.

Le gouvernement allemand d'alors et en particulièrement celui de M. Helmut Kohl ne voulait pas abandonner le mark, monnaie politique encore une fois, tant il incarnait la puissance économique allemande et surtout l'Allemagne démocratique. Le gouvernement allemand a su faire valoir ses intérêts: siège de la BCE à Francfort, statut de la BCE identique à celui de la Bundesbank allemande, indépendance radicale de la banque centrale selon les principes ordolibéraux, la stabilité des prix comme objectif principal. Le premier gouverneur Wim Duisenberg était néerlandais, le florin la monnaie des Pays bas était depuis fort longtemps le satellite du mark. Il était normal qu'il préside les destinées de la monnaie unique commençante.

L'euro fort des années 2001-2008 était aussi un voue allemand. L'industrie française en a largement payé le prix. La liste des éléments qui fait de l'euro un mark déguisé pourrait s'allonger. S'il en fut ainsi c'est moins par la force du gouvernement allemand qu'à la faiblesse française.

C'est à partir de 2012, que l'euro est devenu moins allemand et a pris des couleurs plus italiennes sous l'égide de Mario Draghi. La Banque centrale devenait la garante des dettes souveraines, et ouvrait massivement le robinet à liquidités pour encourager consommation, production et aussi spéculation. Sur cette phase qui a duré dix ans environ et qui appartient au passé, l'histoire  reste à écrire et les débats seront vifs sur l'interprétation de ce moment.

Pour les tenants de l'ordolibéralisme, cette politique monétaire était une hérésie. Elle serait responsable en partie de la présente inflation. Cette période de 2012 à la fin 2021 a vu l'Union européenne devenir plus incertaine sur ses principes ordolibéraux : suspension des règles budgétaires, plan de relance, politique monétaire accommodante.

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Mais les orientations de fond ont demeuré : réformes structurelles, promotion de la logique de marché, confiance dans le libre-échange sans compter l'incapacité à se penser comme un acteur stratégique.

Désormais l'orthodoxie tente un retour encore modeste, mais il est là. La BCE fait repartir les taux d'intérêt à la hausse, se fait moins la garante des dettes souveraines, appuie par ses déclarations les tenants de l'austérité, se félicite des propositions de la Commission de revoir les règles budgétaires. Mais les choix de la Commission sont plus cosmétiques qu'autre chose.

L'euro pour l'économie française n'a pas été un levier. La politique de la BCE depuis dix ans a rendu l'endettement moins cher, c'est le lot de consolation. Mais c'est désormais fini.

Vingt-cinq ans après, quelles sont les réussites et les échecs de la BCE?

Don Diego de la Vega : Pour tirer un bilan, il faut regarder les promesses de départ. La première était la stabilité des prix, mais qui était assurée depuis les années 1980 sans l’euro. Deuxième promesse, même si ce n’était pas dit comme ça, la volonté de concurrencer le dollar à l’international. La part de l’euro dans les échanges internationaux n’a pas réussi à représenter beaucoup plus que la somme des monnaies nationales. Troisièmement, il y avait l’euro bouclier, pour protéger des crises. Or nous n’avons jamais eu autant de crises, ce qui est logique dans une zone de change fixe. On a par exemple le même taux directeur pour 15 pays très différents. Cela rend le système sous-optimal pour tous. Il y a eu d’autres promesses, comme l’euro social, promu par les gens de gauche qui n’ont pas vu que l’euro poussait plutôt à la désinflation compétitive, favorisant les vieux bourgeois allemands. A l’inverse, certains ont pensé que l’euro permettrait un reflux du socialisme. Et pourtant, on n’a jamais connu autant de dépense publique. L’autre promesse était celle de la naissance d’une zone monétaire endogène. Mais en réalité, les échanges entre pays européens n’ont pas progressé avec l’euro, ils ont stagné.

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Si on relit Yves-Thibault de Silguy, Jacques Delors on voit que la liste des promesses non tenues est importante. Rien ne s’est passé comme prévu et personne n’a été vraiment satisfait. Les Allemands n’ont pas pu écraser les Français, les Français ne co-dirigent pas l’euro, mais les plus cocus ce sont les Italiens. On leur a promis des taux d’intérêts allemands (bas) en échange de leur renoncement à la possibilité de dévaluer. Mais ils n’ont pas eu les taux espérés. Aujourd’hui, l’euro a la cote seulement chez des pays pour qui il s’agissait d’une décision plus politique qu’économique. 

Frédéric Farah : La BCE a défendu trop longtemps et jusqu'à maintenant le combat pour la stabilité des prix, ce qui a eu pour effet de rendre moins dynamique la croissance. Son message et nous le voyons à l'oeuvre a été de dire qu'à la moindre surchauffe, elle serait prête à intervenir pour relever ses taux. C'est pourquoi la zone euro en raison de la nature de la monnaie unique et de la politique de la BCE était guettée par des risques déflationnistes. En 25 ans, la zone euro n'a jamais été leader de la croissance mondiale. L'UE de manière générale a attendu que la croissance vienne d'ailleurs, des Etats Unis, des pays émergents.

D'autre part la BCE n'a pas été suffisamment attentive au cycle financier et l'a nourri en favorisant des logiques spéculatives, c'est le grand revers des politiques d'assouplissement quantitatifs et sans compter les biais inégalitaires générées par celles-ci. 

Elle a trop longtemps négligé une politique de change, et ce n'est que récemment que l'on a assisté à la fin des grandes fluctuations euro/ dollar. Mais les variations de la monnaie unique et particulièrement sa surévaluation ont été coûteuses pour certains pays comme la France, la Grèce, l'Italie, l'Espagne ...

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Par ailleurs, et ce n'est pas sa seule responsabilité, aucun policy mix satisfaisant c'est à dire l'articulation politique budgétaire et monétaire n'a pu être trouvé. C'est le biais plutôt austéritaire qui a dominé les débats pendant plus de dix ans. Attention ce biais pourrait revenir: resserrement budgétaire au niveau national et monétaire au niveau européen.

La BCE a préservé l'intégrité de la zone euro lors de la crise des dettes souveraines, mais à un prix très élevé pour les citoyens européens, que l'on pense à la Grèce, victime sacrificielle de l'opération de sauvetage de l'euro.

La politique d'assouplissement quantitatif et son rôle de garant des dettes souveraines ont pu alléger le poids de la dette. Il est à regretter que cette séquence n'a pas été un moment clef pour les Etats d'engager des politiques d'investissement plus significatifs pour la transition énergétique par exemple. 

Les objectifs et principes fondamentaux qui régissent la BCE devraient-ils être revus, 25 ans après ?

Don Diego de la Vega : Complètement revu. Il y a une stratégie review il y a 2 ans, qui a duré 18 mois, qui n’a débouché évidemment sur rien du tout. Aujourd'hui il faudrait faire plus qu'une stratégie de review, il faudrait littéralement faire un audit. Une remise à plat intégrale. Le premier truc à changer, c’est le casting. Il faut revenir au traité. Le Traité dit que les gens qui sont dans le comité de politique monétaire doivent être des gens reconnus sur les questions économiques et financières. On pourrait mettre des quotas : un tiers minimum d’économistes monétaires.

Ensuite en termes d’objectif, c’est la stabilité des prix mais comme elle est atteinte depuis 40 ans, la BCE doit concourir aux politiques de l’Union et essayer de maximiser l’emploi. Ce point est difficile à changer. Le problème c’est que la BCE a défini que l’inflation souhaitable c’était 2%. C’est déjà contestable, mais elle s’appuie sur le CPI pour le mesurer. Or le CPI est biaisé. La Grèce avait un CPI positif alors même que le pays perdait de son PIB. A l’inverse, dès qu’il y a un problème sur l’énergie, le CPI explose. Et la BCE augmente les taux d’intérêts en conséquence, de manière pavlovienne.

Cela devrait nous inciter à revoir le mode opératoire de la BCE qui est d’autant plus biaisé qu’elle supervise les banques commerciales qui veulent une hausse des taux alors même qu’elle contient dans ses administrateurs, des anciens banquiers d’affaires et des futurs banquiers. Sur douze mois glissants, la BCE a fait un chèque de 130 milliards d'euros aux banques commerciales.

Donc en résumé, il faut un meilleur lien entre le monde académique et la BCE, et une clarification des objectifs et une meilleure gestion des conflits d’intérêts. Si on réformait la BCE, on améliorerait la situation, mais on ne changerait pas la face du monde, car on garderait l’euro qui, en tant que monnaie, engendre des métastases. Notre monnaie est dysfonctionnelle et anachronique.

Frédéric Farah : Il va être difficile malheureusement de revenir sur son objectif principal, car la progression rapide des prix l'a récemment conforté dans son choix de lutter contre l'inflation avant toute chose. Mais indiscutablement, elle devrait faire de l'emploi et du financement de la transition énergétique des objectifs clefs.

Sa politique devrait être plus soucieuse de combattre les biais inégalitaires en termes de revenu qu'elle produit.

Son indépendance juridique devrait être aussi faire l'objet d'aménagement, comme nous l'avons dit des contrepoids sont nécessaires. Prenons un exemple, pour éviter l'instabilité financière et l'éclatement de la zone, elle a proposé un outil anti fragmentation mais pour qu'un Etat en bénéficie, il doit mettre en oeuvre des réformes structurelles qui vont affecter la protection sociale, le marché du travail, autrement dit qui affectent la justice sociale, le revenu des personnes. On le voit son action a un large spectre, il serait normal qu'une institution ayant pareil pouvoir puisse faire l'objet de contrôles plus amples.

La BCE doit encore davantage intégrer la préoccupation de la stabilité financière dans ses outils et objectifs de sa politique.

Toutes les améliorations possibles n'enlèvent rien au fait que l'Euro est une monnaie qui pose bien des problèmes plus qu'elle n'en résout.

Quelle est la responsabilité de la BCE dans la situation économique actuelle ?

Don Diego de la Vega : C'est une responsabilité éminente. Le marché ne regarde plus que les banquiers centraux. Il y a des responsabilités directes et indirectes. Si on parle de civilisation, de niveau de formation, ce n’est pas la BCE.. Et quand la BCE se mêle de questions structurelles en faisant un chantage pour que tel ou tel gouvernement fasse des réformes structurelles en échange d'une certaine accalmie monétaire, elle n’est pas dans son rôle. C’est honteux, mais ils le font. Ensuite, il y a les éléments qui relèvent fondamentalement d’elle. La BCE n’est pas la banque des banques. Elle doit s’occuper de la stabilité des prix et ensuite la maximisation de l’activité et de l’emploi. Toutes les variables nominales sont de sa responsabilité.  Donc par exemple comme quand depuis 3 ans on a des montagnes russes sur le PIB réel, ça c'est pas de sa faute, mais s'il y a des variables nominales qui font les montagnes russes depuis 3 ans, ça veut dire que la BCE a mené une politique qui n'est pas contracyclique. Elle doit s’assurer que la monnaie ne soit pas un perturbateur de plus. Et même ce travail-là n’est pas fait.

Par ailleurs, depuis les vingt ans que la BCE s’occupe des taux de change, l’euro est trop cher. Cela favorise les géants, du luxe notamment, au détriment de l’industrie de moyenne gamme. La politique monétaire est vraisemblablement à l’origine d’une part de la désindustrialisation que l’on observe actuellement. Beaucoup plus de problèmes que ce qu’on croit sont liés à la BCE.

Frédéric Farah : La BCE ne peut être tenue responsable de l'envolée des prix des matières premières ou alimentaires. Le choc exogène qui a affecté les économies européennes n'est pas de son fait. Sa responsabilité peut résider qu'elle nourrissait une inflation, mais pas visible dans nos paniers de course, celle qui affecte certaines classes d'actif sur les marchés financiers. En effet la politique d'assouplissement quantitatif a renforcé des logiques spéculatives.

Aujourd'hui son seul levier pour contenir la progression des prix serait de provoquer une récession qui freinerait la demande déjà atone par certains aspects. Alors, sa responsabilité serait engagée car elle serait à l'origine d'une remontée du chômage.

Et c'est là que l'on voit encore une fois une malfaçon de l'euro. Aux anciennes crises de changes, la monnaie unique leur substitue des crises de demande.

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