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L'inéluctable retour des Etats pour faire face au défi de la mondialisation
©Reuters

Bonnes feuilles

La mondialisation "dissout" les Etats, mais la crise de cette même mondialisation rappelle leur nécessité. Les peuples réclament plus d'Etat contre les dérégulations venues d'ailleurs. Ce que l'on prenait pour l'agonie du vieil Etat-nation dissimulerait-elle, en vérité, sa renaissance ? Extrait de "Le retour des Etats", de Michel Guénaire (1/2).

Michel Guénaire

Michel Guénaire est avocat et écrivain. Il est l’auteur du Génie français (Grasset, 2006) et Après la mondialisation. Le retour à la nation (Les Presses de la Cité, 2022). Vous pouvez retrouver Michel Guénaire sur Twitter : @michelguenaire

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Les Nations unies comptaient 51 Etats à leur création. Le Sud- Soudan est devenu le 193e Etat membre de l’organisation internationale au mois de juillet 2011. En un demi- siècle, le nombre d’Etats a été multiplié par quatre. Ce sont les pièces d’un unique puzzle qui seront détachées et seront assemblées dans le monde. Leurs discussions seront nourries, leurs rivalités apparaîtront de plus en plus fortes, leur inégalité restera toujours comme reste l’inégalité entre les puissances.

Les pays qui furent longtemps laissés à l’écart du progrès voudront désormais s’organiser dans des espaces politiques, sociaux et économiques, mêlant les armes de la diplomatie, le levier des monnaies et le contrôle des ressources naturelles, pour retrouver la clef de leur destin aux côtés des seconds. L’établissement des rapports entre les puissances acquises et les puissances émergentes désignera le lieu de nouveaux échanges affranchis des codes anciens.

Tous les Etats du monde, pressés de devoir s’organiser pour défendre leurs intérêts, prendront leurs distances par rapport à la marche du monde fini qui les englobait, tenteront de se réapproprier les frontières de leur territoire, deviendront les acteurs en devenir des régions du monde. Ils prendront racine dans leur passé. La volonté des nations est aussi ineffaçable que leur histoire, et les nations ont des caractères avant de suivre un développement.

Les tenants de la mondialisation n’avaient cessé de penser un monde sans l’Histoire. Par le fait que les économies des nations devaient échanger, il devait en résulter la même organisation politique et sociale pour tous. La crise de la mondialisation oblige à repenser un monde avec l’Histoire.

Le phénomène du retour des Etats a ainsi une dimension proprement historique. Il est la traduction d’un retour proprement dit du sens historique dans la vie politique des nations. Il opère un retour inédit à l’histoire de celles- ci. La réappropriation par les peuples de leur développement sera le dépassement de l’histoire antécédente du monde qui avait voulu l’effacer. La crise qu’avait connue chaque pays l’avait poussé à rejoindre le grand cercle des économies ouvertes et à se convertir au modèle universel du capitalisme radical. La fin de celui- ci entraînera les pays à retrouver l’autonomie relative de leur progrès. Les Etats sont l’expression d’une aspiration à une maîtrise historique de leur développement par les nations, ou ces dernières ne doivent trouver leur identité dans le nouvel âge du monde que par un appui sur leurs repères historiques.

L’Occident découvre ou redécouvre sa relativité. La conscience de cette relativité rouvre la perspective de l’histoire du monde ou d’une histoire des mondes. Elle ranime le sentiment que la géographie a des rapports étroits avec l’histoire. Un continent a eu ses propres aventures durant cinq siècles, cinq continents vont avoir les leurs à partir du nôtre en se confrontant à lui, et ce dernier cherchera à son tour sa propre voie ou il mourra. Celui d’où est partie l’aventure de la mondialisation par vagues successives depuis cinq siècles jusqu’à la dernière apparue il y a une trentaine d’années avait promu sa seule loi continue du progrès, en niant l’expérience positive des autres peuples ; cinq autres continents lui répondent maintenant, avec leur identité. Les sociétés du monde entier existent à part l’Occident, et elles veulent se penser de plus en plus différemment de lui.

Le regard porté sur les vieilles civilisations enseigne cette leçon : chacune d’entre elles a atteint un jour son rayonnement en ayant trouvé un équilibre. Les sociétés trouvent leur force par leur équilibre et, sitôt celui- ci perdu, connaissent le déclin. C’est cette notion d’équilibre, atteint dans une société par une symétrie des forces qui l’habitent, un stade de son organisation où chacun prend place, la rencontre des traditions et des inventions qui exprime un respect et une attention de part et d’autre, que les Etats chercheront par- dessus tout à rétablir ou simplement établir entre eux, plutôt qu’un nouvel ordre du monde.

Le retour des Etats, qui s’étendent à l’échelle d’une région ou se regroupent à plusieurs dans de nouveaux ensembles régionaux, sera la nouvelle organisation politique du monde. C’est dans la culture des nations, entre les traditions de l’Occident et de l’Orient, que seront dessinées les figures de la légitimité des acteurs politiques de cette nouvelle organisation du monde (première partie : « Histoire »).

Ces acteurs partiront du statut de l’Etat- nation, où ils viendront chercher le ressort de leur souveraineté, mais ils le dépasseront. Les interventions des Etats ont été jugées tour à tour indispensables et incomplètes, mais seront prolongées et renouvelées dans un statut, une organisation et un fonctionnement qui devront désormais répondre à une nouvelle attente de la politique (deuxième partie : « Instrument »).

Le retour des Etats fera apparaître, dans le creuset des nouveaux espaces de vie internationale qui se feront face, des régions se définissant comme des empires. C’est de l’autonomie et de la volonté animant les Etats de ces régions que partiront les nouvelles batailles du monde, conduites par l’arme renaissante que voulut bannir un temps la révolution de la mondialisation, la diplomatie (troisième partie : « Action »).

Dans cet équilibre du monde, l’Europe doit trouver sa place. Son morcellement né de la division de ses peuples, joint à l’impuissance inférée du modèle de sa construction, pose la question d’une nouvelle fondation. La voie de l’avenir ne ressemblera pas à l’esquisse du traité de Rome. Il faut à l’Europe trouver une nouvelle organisation entre ses membres, ses institutions et ses normes (quatrième partie : « Europe »).

Quels hommes seront mis à la tête des Etats ? Les Etats seront aussi la révélation du caractère des hommes appelés à les diriger. C’est la dernière question. Elle interroge le type des nouveaux gouvernants qui apparaîtra pour exercer la responsabilité du pouvoir. L’élection, critère de la légitimité des représentants, recherchera l’exemple, moteur de l’entraînement des sociétés (cinquième partie : « Hommes »).

Extrait de "Le retour des Etats", Michel Guénaire, (Editions Grasset), 2013. Pour acheter ce livre, cliquez ici.

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