L'impact sous-estimé de la foi du général de Gaulle sur ses choix de vie

De tout cela m’est apparue progressivement la conviction que sans la foi, et une relation singulière et régulière avec Dieu, Charles de Gaulle n’aurait pas existé tel que nous le connaissons. Il n’aurait pas accompli son oeuvre de salut pour la France et une partie du monde.

Au cours de mes recherches, j’ai trouvé dans son enfance, à travers les témoignages familiaux et ses propres écrits, des indices de cet enracinement chrétien très vigoureux. Ma grand-mère m’avait confié que dans les premières années de leur mariage, pendant lesquelles il était encore valide, mon grand-père lui lisait un passage de la Bible tous les soirs. Charles, autant que son frère Jacques, lisait aussi certainement la Bible de façon régulière. J’ai compris dans ses premiers écrits d’homme, la place de la foi dans sa vie. J’ai observé dans son comportement de soldat, d’homme de gouvernement, et d’homme d’État, les symptômes d’un grand croyant, la marque chrétienne, franciscaine parfois, de l’homme sur le dirigeant. Mais tout cela est empreint d’un infaillible respect de la laïcité et de l’impartialité de l’État. Il fait toujours très clairement la distinction entre sa foi et le fait d’assumer la charge de la République totalement, c’est-à-dire sans jamais négliger tous les non-catholiques, et sans, non plus, jamais renier ce à quoi il croit et qui le fait vivre, en particulier sa vision historique de la France et de sa mission.

Dans ses lectures, dans son éducation à la fois classique et originale – presque non-conformiste à plusieurs égards, et certainement très chrétienne –, le général de Gaulle se forge une âme autant qu’un caractère capable de résister aux défis du temps et du monde en transition. Ainsi, lorsque son heure arrive – il ne l’a certes pas planifiée, même s’il l’a anticipée très jeune –, il agit, tout simplement. Cette action, qui est sa marque, s’accompagne toujours du verbe. Il parle, écrit, informe, explique. Grâce à ses mots dont il fait ses amis en les choisissant avec beaucoup d’attention, nous pouvons lire, voir et entendre, aujourd’hui encore et même demain grâce aux technologies numériques, ses appels, ses discours, ses messages, ses conférences de presse. Nous pouvons donc presque facilement rencontrer cet homme au destin exceptionnel dont la vie imprime de son oeuvre l’histoire de France et celle du XXeþsiècle. Encore faut-il le vouloir. Encore faut-il en prendre le temps.

Aujourd’hui, je vous invite à cette rencontre. Rencontrer de Gaulle! Voilà bien un projet audacieux. Pourtant, je vous y engage avec moi, car je sais que cela en vaut la peine. Par son exemple, sa droiture et son énergie inlassable au service de la France dans sa mission universelle pour l’Homme, Charles de Gaulle est une source permanente d’espoir et une inspiration vivifiante pour agir. Et quel autre chemin pour le rencontrer serait meilleur que ses propres écrits ?

Il y a chez lui d’abord une éthique de responsabilité. La conscience d’être appelé aussi à une tâche de salut public, une oeuvre de «redressement national»… Il en a la prescience dès 1905, alors qu’il n’a pas encore 15ans :

En 1930, l’Europe, irritée du mauvais vouloir et des insolences du gouvernement, déclara la guerre à la France. Trois armées allemandes franchirent les Vosges. […] En France, l’organisation fut faite très rapidement. Le général de Gaulle fut mis à la tête de 200000 hommes et de 518 canons, le général de Boisdeffre commandait une armée de 150 000 soldats et 510 canons. Le 10 février, les armées entrèrent en campagne1.

Et puis il y a aussi tout un travail sur lui même. Il se constitue progressivement, seul, mais aussi sous l’influence de sa mère, très pieuse, et avec l’aide de son père, catholique à l’esprit ouvert, très cultivé, une base culturelle chrétienne, littéraire et philosophique de nature à renforcer sa formation classique. Une sorte de «miroir des princes» sur mesure qu’il cultivera toute sa vie avec bonheur. Cet homme nourrit constamment sa pensée et sa réflexion autant que sa foi. Son éthique de responsabilité est une dynamique qui le pousse chaque jour, malgré ses défauts dont il a une conscience aiguë, à se dominer un peu plus.

Il n’a que 26 ans et fait des exercices pour mieux se maîtriser… C’est le côté gandhien du personnage. Son universalité apparaît plus clairement encore à cause de son inspiration chrétienne constante et tonique. L’homme agit, combat, décide, organise, avec une grande attention aux autres et aux choses. Cela est visible et lisible dans toutes ses correspondances. Il est familier d’un discernement utile dans sa relation aux autres, qu’il forme et entretient dès sa prime jeunesse par des comparaisons historiques fréquentes, des lectures. Il s’efforce dès son enfance et tout au long de sa vie, malgré les épreuves et les doutes, à façonner son oeuvre des vertus d’honnêteté, de droiture, de fidélité, d’humilité et de service.

Par-dessus tout, sa passion pour la France et la mission éternelle qu’il lui reconnaît au service de l’Homme et de la paix du monde l’anime constamment et lui fait rechercher le contact avec les peuples plus qu’avec les élites, même s’il considère celles-ci avec beaucoup de respect et d’attention.

Extrait de "Une vie sous le regard de Dieu - La foi du Général de Gaulle", de Laurent de Gaulle, publiés aux éditions du Toucan, 2015. Pour acheter ce livre, cliquez ici.