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L'édito : François Hollande offre Bolloré aux écologistes
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L'Édito de Jean-Marc Sylvestre

Le président de la République sera vendredi après-midi à l’usine de batteries du groupe Bolloré. Il devait déjà venir à Ergué-Gabéric, près de Quimper, pour inaugurer cette unité de production il y a quelques jours puis il a annulé plusieurs fois avant reporter à aujourd’hui. Finalement, à peine descendu de l’avion qui l’a ramené tôt ce matin de Bamako au Mali, il ira lancer la conférence environnementale à Paris, puis il partira en Bretagne.

Ce voyage n’est  pas neutre. Économiquement pour Vincent Bolloré c’est un bon coup de pub. Cette usine de Batterie, il l’a portée en gestation depuis des années. Ses équipes sont convaincues d’avoir découvert un procédé de batterie révolutionnaire. Pourquoi ? Parce qu’elles sont moins lourde, avec une capacité de stockage plus importante, donc une autonomie plus longue et un temps de charge plus rapide que les batteries traditionnelles. Vincent Bolloré lui, est sincèrement convaincu que l’avenir du transport terrestre passe par l’énergie électrique et que l’avenir de la voiture électrique passe par des batteries plus performantes. D’où l’investissement recherche très important consenti dans le plus grand secret depuis plus de dix ans. D’où sa décision de construire l’usine et les labos en Bretagne du sud, au cœur du fief familial Bolloré, « Bolloré land », ici même où le grand-père avait développé les premières activités.

Au niveau industriel, Bolloré s’est déjà frotté à la réalité du marché en équipant en batteries les fameuses Blue-car,  ces voitures qui sont commercialisées par le groupe et fabriquées en Italie, il a investi avec la mairie de Paris, dans le système Autolib’ pour prouver que ça pouvait marcher. Bref, cette activité est plus que sérieuse et le potentiel est le plus important. L’avenir pour Vincent Bolloré est de faire très prochainement une offre aux particuliers mais plus encore de vendre le système aux grandes villes du monde entier. L’avenir c’est d’aborder les pays émergents dont on sait bien qu'ils ne pourront jamais répondre à la demande de masse avec des moteurs thermiques mais des moteurs électriques, d’où l’enjeu des batteries.

Ce n’est donc pas par hasard si, la semaine dernière, Vincent Bolloré a annoncé un partenariat avec le groupe Renault pour concevoir et commercialiser dans le monde entier sa Bluecar. Pour Carlos Ghosn, c’est le seul moyen de ne pas sortir de l’électrique alors qu’il s’est un peu planté dans son investissement. Faute de batterie et de distribution, la Zoé par exemple, qui aurait dû faire un tabac dans les villes, n’a joué les stars que dans un film de Luc Besson. Il faut dire que la Zoé n’avait le premier rôle dans le film que parce qu'elle tombait en panne faute de batterie. C’est parce que son autonomie n était pas suffisante, que son conducteur a dû s’arrêter en pleine campagne et a vécu une très belle histoire pendant que la batterie se rechargeait. Franchement, le film n’était pas méchant mais il n’était guère valorisant pour la petite Zoé.

Vincent Bolloré lui aura eu l’intelligence de faire tester sa voiture et sa batterie auprès des parisiens avant de se lancer à la conquête du marché mondiale. Il pourra sans doute le faire demain avec Renault. L’entourage de François Hollande a beaucoup insisté pour que le Président vienne parrainer une telle opération. Politiquement c’était pourtant un peu risqué, jusqu’au moment où un communiquant de génie a découvert que ça pouvait au contraire être une bonne affaire. Pour les socialistes, Vincent Bolloré c’est l’homme qui avait accueilli Nicolas Sarkozy sur son Yatch au lendemain de l’élection en 2007. Une petite croisière qui avait marqué tout le quinquennat de cette empreinte bling-bling. Donc à gauche, Bolloré on le tenait plutôt à distance. Infréquentable.  A droite aussi d’ailleurs.

Mais on s’est aperçu aussi que la journée environnementale pouvait être chaude. Dominée par les militants écologistes, qui ont posé un ultimatum au Président pour qu'il change de politique, n’ont pas digéré que François Hollande abandonne la transition énergétique  pour le moment. Il ne digère pas que François Hollande ne remettent pas en cause le nucléaire et le soupçonne de lâcher sur les gaz de schistes. Politiquement, c’est la présence des ministres écologistes qui est en jeu. Mais François Hollande considère qu'il ne peut pas s’offrir le luxe d’une crise politique avec le Front de gauche et les écologistes. Par conséquent, il tergiverse et il louvoie. Sur le nucléaire par exemple, il ne dira absolument rien sur le démantèlement des anciennes centrales sauf qu'il annoncera sans doute que l’État se renforce au capital d’Areva .

Ses communiquant expliqueront vers midi, que c’est une façon de renforcer le contrôle public d’Areva. Sur les gaz de schistes , il ne dira rien de ces études américaines qui prouvent  aujourd’hui que sur les 2% de la croissance US, la moitié serait imputable à la révolution énergétique de ce gaz qui permet aux américains de payer leur énergie trois fois moins cher que le prix qu'on la paie, nous, aux Russes. revanche, on a découvert que l’industrie française possédait une pépite. Une vraie. Le président de la République fera beaucoup de publicité aux batteries de Vincent Bolloré en allant visiter l’usine Bretonne.Ca n’est que justice. Mais en prime, et pour les acteurs politiques, c’est l’essentiel. Demain Bolloré sera donné en  exemple de croissance  verte. Une énergie propre. Un moyen de transport propre, et des emplois par milliers à terme. Pendant ce temps-là, les écolos qui regarderont les reportages à la télévision ne grogneront pas contre le nucléaire ou les gaz de schistes. Ils en oublieront peut être l’ultimatum. La gouvernance française aura encore gagné quelques jours dans ce conflit latent qui fissure et mine la majorité gouvernementale. Pourvu que ça dure,  au moins jusqu’aux municipales. 


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