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L'échec des jeux d'argent en ligne n'est pas dû au hasard, mais à la fiscalité française
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Poker menteur

Autoriser les jeux d'argent en ligne était un bon premier pas dans la législation française en 2010... Malheureusement pas suivi d'effets! Une fiscalité étouffante a condamné la plupart de ces sites, parmi lesquels seuls deux surnagent. Explications...

Florian Motemps

Florian Motemps

Florian Motemps est le co-fondateur de Kuzeo.com, comparateur intéractif de sites de jeux d’argent en ligne légaux.

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Il y a un an et demi, la France faisait sa révolution concernant le monde des jeux en ligne puisqu’elle ouvrait enfin son marché. Cette ouverture régulée par la loi devait être revue dernièrement afin de jauger la fiscalité des opérateurs par rapport à l’évolution même du marché ; il s’agit de la clause de revoyure. Mais la fin du mois d’octobre a vu des rebondissements inattendus, qui pourraient bien bouleverser l’avenir des jeux d’argent en ligne en France.

Combien d’opérateurs légaux proposent des jeux d’argent en ligne ?

Cette libéralisation du marché a permis à 36 opérateurs d’exploiter le marché des jeux d’argent en ligne grâce notamment à la distribution de 51 agréments ayant attrait au poker, aux paris sportifs et aux paris hippiques.

Des mesures saines étaient proposées par les parlementaires…

Dans le cadre de cette mise à jour, l’objectif était notamment de proposer une fiscalité plus juste pour les opérateurs légaux. Plusieurs parlementaires (dont Jean-François Lamour et François Trucy) avaient donc eu pour mission de plancher sur les propositions de modifications fiscales afin de les proposer au ministre de l’économie, c’est-à-dire à Bercy.

Alors que dans ce rapport était clairement énoncé que les prévisions concernant cette libéralisation des paris en ligne avaient été particulièrement optimistes par rapport à la réalité actuelle, il est également mis en exergue le fait que de nombreux opérateurs comme BetClic perdent de l’argent à cause d’une fiscalité trop lourde. Les parlementaires étaient pourtant d’accord avec ce constat, mais Bercy a refusé toute modification, par l’intermédiaire de Valérie Pécresse.

… qui ont dû essuyer un refus catégorique de recalcul en ces temps de crise

La principale mesure proposée par le groupe d’étude, mais également par l’autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL), était de calculer le prélèvement sur le produit brut des jeux, aussi appelé PBJ, et non sur les mises totales. Ainsi, uniquement les revenus réellement encaissés se trouvaient taxés et non l’entièreté.

En plus de mettre en péril la viabilité économique des opérateurs de jeux d’argent en ligne, la non-acceptation de cette mesure pourrait inévitablement entraîner une évasion fiscale majeure de la part des protagonistes de ce marché ; alors que son acceptation pourrait également relancer la demande des joueurs qui est bien inférieure aux estimations réalisées il y a 18 mois.

De plus, si la situation reste figée, de nombreux opérateurs illégaux pourraient voir le jour, ce qui serait contraire à l’objectif même des lois mises en place depuis l’ouverture de ce marché. Bercy souhaiterait même fiscaliser les opérateurs illégaux qui par nature se trouvent bien souvent hors de l’Union européenne, une volonté qui a du mal à être comprise par les opérateurs dits « légaux » de France.

La FDJ et le PMU, maîtres à bord

La FDJ et le PMU avaient anticipé ce refus de Bercy. Ces opérateurs historiques, solidement implantés dans le paysage « culturel » français, n’ont que faire de cette décision d’un statu quo puisqu’ils sont les maitres à bord. « À l’exception du PMU et de la Française des jeux, les sites agréés de jeux d’argent ne gagnent pas d’argent en France » a même indiqué au journal Le Figaro le président de l’ARJEL, Jean-François Vilotte.

Les pertes que subissent leurs concurrents vont donc être très lourdes à supporter, certains ont d’ailleurs déjà fermé leurs portes, comme 200%Poker par exemple, à cause des taxes trop lourdes et d’un modèle économique qui n’est plus assez solide.

Les joueurs sont aussi lésés

Les budgets des sites de poker, de paris sportifs et de turf deviennent de plus en plus serrés. Leur communication est bien sûr freinée depuis quelques mois (-58% par rapport à l’an dernier) et les joueurs gagnent trop peu d’argent sur ces sites qui deviennent trop peu attractifs.

Les sites illégaux et les concurrents européens proposent un taux de redistribution plus fort aux joueurs et des cotes beaucoup plus alléchantes sur les paris en ligne. Il n’est alors pas étonnant que 15% des paris sont encore faits sur des sites non agréés. On se demande bien comment les bookmakers légaux les plus fragiles vont réussir à durer dans le temps ; leur échec semble promis.

Même les pros se trouvent dans le viseur de Bercy

Enfin, Valérie Pécresse souhaite désormais imposer les joueurs professionnels de poker sur le revenu alors que ces derniers bénéficiaient encore de la législation sur les jeux de hasard. Selon Bercy, l’habileté des joueurs de poker professionnels enlève toute notion de hasard.

En somme, il n’est pas étonnant que l’AFJEL souhaite être reçue dans les plus brefs délais par Valérie Pécresse afin d’éviter la noyade annoncée d’un secteur d’activité bien moins fastueux qu’on ne pourrait le croire.

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