Jeff Bezos ramène Arianespace dans la course à l’espace pour se protéger des ambitions d’Elon Musk (Tesla)<!-- --> | Atlantico.fr
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Jeff Bezos lors de la présentation de Blue Moon, un véhicule d'atterrissage lunaire pour la Lune, à Washington, le 9 mai 2019.
Jeff Bezos lors de la présentation de Blue Moon, un véhicule d'atterrissage lunaire pour la Lune, à Washington, le 9 mai 2019.
©SAUL LOEB / AFP

Atlantico Business

Quand les milliardaires américains entrent dans la guerre des étoiles, c’est Arianespace, lanceur européen, qui en profite en décrochant le plus gros contrat de son histoire dans le cadre du projet d’internet spatial lancé par Amazon.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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En un clic, Jeff Bezos aura cette semaine rebattu les cartes sur le marché de l‘espace qu’on croyait définitivement préempté par des milliardaires américains fortement aidés (ce qu’on ne dit jamais) par le Pentagone.

L’Europe ne sera donc pas absente de cette nouvelle guerre des étoiles. Ariane 6, la toute nouvelle fusée d’Arianespace dont le pas de tir est fin prêt à Kourou après 5 années de travaux, va donc revenir dans le jeu de la concurrence mondiale. Jusqu’à maintenant, le marché de l’espace, c’est à dire principalement celui des lanceurs de satellites, semblait complètement préempté par les Américains de Boeing, ceux de Blue origin ou de Tesla avec Space X.

Alors que l’Europe, avec l’Agence spatiale européenne, avait servi de pionniers en défrichant ce marché, les fusées Ariane lancées à Kourou ont été dépassées avec l’explosion des besoins, l’appétit insatiable des technologies de la communication et l’arrivée dans cette course aux étoiles, de quelques milliardaires américains qui rêvaient d’ouvrir l’espace à tout le monde. En tirant sur les prix, en modifiant les technologies, en allant peut être moins loin ou moins haut, on pouvait rêver d’ouvrir l’espace au tourisme avec des navettes. C’était le projet d’Elon Musk avec Space X, ou de Jeff Bezos avec "Blue origin".  

Les spécialistes de l'espace ne donnaient pas cher de l'avenir d’Arianespace qui semblait complètement dépassé, parce que trop cher, sans doute, avec des lanceurs trop lourds.

C’était sans compter avec la dernière-née des fusées européennes, Ariane 6 dont le premier lancement aura lieu avant la fin de l’année à Kourou. Parce qu’Ariane 6 est technologiquement beaucoup plus efficace, et surtout beaucoup moins cher que les 5 Ariane précédentes.

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Du coup, le lanceur européen vient de décrocher le plus gros contrat de son histoire avec Amazon, dans le cadre d'un vaste projet d'Internet spatial lancé par l'entreprise de Jeff Bezos.

Le projet du patron d’Amazon est assez pharaonique. Il compte déployer pas moins de 3236 satellites tout autour de la planète, afin de proposer une connexion à haut débit à tous les habitants de la Terre, quel que soit leur localisation géographique. Pour réaliser ce projet et positionner les satellites, les ingénieurs de Jeff Bezos ont prévu 83 lancements, étalés sur les 5 prochaines années.

Au départ, Jeff Bezos pensait travailler avec un de ses bébés, Blue Origin, filiale d’Amazon dédiée à la conquête du marché de l’espace, mais surtout avec l’aide importante des géants américains Boeing et Lockheed Martin qui ont mis au point, le très gros lanceur Vulcan Centaur depuis Cap Canaveral en Floride, via un lanceur très lourd Vulcan Centaur.

Ce modèle ne suffira pas. D’où l’entrée dans le jeu d’Arianespace qui sera forcément prête à un prix compétitif. Amazon va donc partager son marché entre trois fournisseurs :

- 38 lancements seront opérés par l’entreprise crée par Boeing et Lockheed (United launch Alliance)

-37 lancements seront assurés par Blue Origin, la compagnie fondée par Jeff Bezos

Et enfin, a priori dans un premier temps, 18 lancements pour Ariane 6.

Au total, Amazon a prévu d’investir 10 milliards de dollars dans ce projet. L’enjeu est considérable puisqu’il s’agit de prendre le marché mondial de l’internet et pour Jeff Bezos, de prendre de vitesse, un autre milliardaire américain qui prépare un projet similaire, puisque Elon Musk, le patron star de Tesla, n’a jamais caché son ambition de déployer un réseau internet mondial avec une multitude de satellite géostationnaire : le réseau Star Link sur lequel, il aurait déjà recruté 100 000 abonnés payants. Tout cela via sa société Space X, très connue dans le monde entier pour ses offres de voyages touristiques dans l’espace.

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Cette initiative de Jeff Bezos fait évidemment l'évènement dans le monde des affaires parce qu’elle commande plusieurs remarques.

La première est que le marché de l’espace est en train de passer de l’ere industrielle. Il quitte le domaine de la recherche ou du rêve pour aborder un marché crédible et sans doute solvable parce que l’Internet est évidemment un facteur de productivité.

La deuxième remarque, c’est que ce marché n’a pu s’ouvrir qu’après des investissements publics considérables parce que, quoiqu’on en dise, l’Etat américain et notamment le ministère de la défense ont dépensé des sommes colossales depuis le premier lancement à côté de Cap Canaveral, il y a plus d’un demi-siècle. On s’aperçoit aujourd’hui que l’Europe n’était pas aussi à la traine qu’on le craignait. Bref, l’Agence européenne spéciale ne dormait que d’un œil.
La troisième remarque est très simple. Arianespace (et par conséquent l’Europe de l’Espace) ne doit son salut qu’à la concurrence. D’abord, parce Ariane 6 correspond avec son prix, aux besoins nouveaux du marché. Amazon n’aurait jamais choisi Ariane 6 si les lancements d’Ariane 6 n’avaient pas été compétitifs. Ensuite, personne n’est dupe, si Jeff Bezos a besoin d’aller vite, c’est parce qu’il est talonné par Elon Musk.

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