Jacques Myard : "Soit chacun retrouve sa monnaie, soit l’Allemagne décide de sortir de l’euro"<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour Jacques Myard, la seule solution valable pour préserver la zone euro serait que l'Allemagne retourne au mark.
Pour Jacques Myard, la seule solution valable pour préserver la zone euro serait que l'Allemagne retourne au mark.
©Reuters

Par ici la sortie

Selon le député UMP, la première puissance économique européenne fausse la capacité de la monnaie unique d'être un outil efficace. La seule solution valable pour préserver la zone euro serait que l'Allemagne retourne au mark.

Jacques Myard

Jacques Myard

Jacques Myard est député-maire UMP de Maisons-Laffitte (Yvelines).

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Atlantico : Selon vous, la solution la plus plausible pour maintenir la zone euro serait que l'Allemagne en sorte. Mais la zone euro peut-elle avoir une pertinence sur la scène monétaire internationale sans sa principale puissance économique ?

Jacques Myard : Une union monétaire, c’est un ensemble d’économies gérées par la même monnaie. En l’occurrence la zone euro ne gère pas des économies ayant la même capacité, la même puissance. Dans ces conditions, une union monétaire qui n’est pas une zone économique optimale aboutit tôt ou tard, pour pouvoir survivre, à ce que l’on appelle une "union de transfert". Dans le cas de la zone euro, l’Allemagne est l’économie dominante et face au déficit de balance des paiements des autres pays de la zone, elle a imposé une purge budgétaire pour réduire les dépenses et rééquilibrer les comptes. Bruxelles, Francfort et Berlin ont confondu les causes et les conséquences. Le problème des pays de la zone euro n’est pas tant le déficit budgétaire, que la perte de compétitivité à l’international dans la zone et hors la zone. Aujourd’hui, refusant d’aider par des transferts les pays faibles, l’Allemagne se fonde sur le traité de stabilité budgétaire pour ne pas avoir à payer. Elle étrangle ainsi les économies du Sud, et même la France, ce qui ne peut pas durer.

L'Allemagne de son côté a-t-elle vraiment intérêt à retourner, seule, à sa monnaie nationale ? Qu'est-ce qui pourrait la convaincre de sortir de la zone euro ?

La zone euro a profité à l’Allemagne puisqu’elle vend ses produits avec une compétitivité supérieure. Mais cette période risque fort de se terminer car les pays de la zone euro vont diminuer leurs achats à l’économie allemande. On le constate déjà, il y a une baisse de la croissance et la déflation risque de gagner l’Allemagne. Si la zone euro a profité à l’Allemagne, cette dernière risque d’être confrontée aux difficultés des autres pays. Dans ces conditions, la seule solution pour avoir une politique monétaire adaptée est une baisse forte de l’euro (environ 20 à 25 %). Soit on démonte tout le système et chacun retrouve sa monnaie, soit l’Allemagne décide de sortir, ce qui réévaluera sa monnaie. Dans ce dernier cas on se retrouverait avec un mark et une zone euro. On aurait alors la même relation entre la France et la Grèce que celle qui existe entre l’Allemagne et le reste de la zone euro aujourd’hui.

En revanche, si par les moyens proposés par Mario Draghi, on obtient une baisse de l’euro dans le système actuel, certes la France va en bénéficier, mais l’Allemagne encore davantage. Plus l’euro baisse, plus l’Allemagne devient compétitive au niveau international. Ce n’est pas approprié car on revient à la case départ avec une Allemagne qui cumule les surplus… ce qui fera remonter l’euro.

Si l'Allemagne ne sort pas de l'euro, et si la zone euro continue sur sa dynamique, cela deviendra intenable pour des pays comme l'Espagne, la Grèce ou le Portugal. Mais pourquoi ne serait-ce pas plus efficace de faire sortir ces pays-là de la zone euro plutôt que l'Allemagne ?

De toute façon, à partir du moment où quelques Etats sortiront de la zone euro, cette zone sera en danger. Mais quand on pose la question politique de la sortie de l’Allemagne, on rappelle au moins à celle-ci qu’elle faillit sur ses responsabilités, et on lui dit très clairement que c’est elle qui actuellement est fautive en refusant les transferts pour les zones faibles.

Faire sortir l'Allemagne de la zone euro, n'est-ce pas l'aveu que la convergence des économies européennes est impossible ? Ne vaudrait-il pas mieux tendre vers cet objectif ?

C’est évident que la convergence est impossible ! La monnaie unique est un slogan politique et une aberration économique. La convergence est  devenue un dogme religieux. Or, on ne fait pas vivre dans une union monétaire des économies divergentes qui n’ont pas du tout le même potentiel. J’avais dit un jour à Jean-Claude Trichet à propos de l’euro qu’il s’agissait "d’une monnaie parfaite, pour un monde parfait qui n’existe pas". Avec la zone euro nous n’avons plus la maîtrise interne et externe du change et on a abandonné la maîtrise budgétaire au nom des critères de Maastricht, en interdisant aux banques centrales de faire des avances directes aux Etats, ce que font la FED. On a accru d’une manière gigantesque les dettes. Mario Draghi envisage maintenant l’assouplissement de la création monétaire pour les Etats par l’achat direct des OAT. Mais il est sans doute déjà trop tard. Il faudrait envisager aussi que les banques centrales puissent faire des avances directes pour l’investissement, chose impossible aujourd’hui compte tenu de la perte de compétitivité de nos entreprises et d’une fiscalité qui chasse l’épargne des Français. Ajoutez donc à cela une monnaie inadaptée et une absence de réciprocité dans les échanges européens, cela commence à faire beaucoup…

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