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Indignation Low cost ? La bêtise du pseudo scandale des primes de cabinets ministériels "trop généreuses"
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Editorial

Non, les indemnités des conseillers des ministres ne sont pas par principe trop élevées ou immorales. Il est grand temps au contraire de s’interroger sur les moyens que la société est prête à investir pour maintenir le niveau de celles et ceux qui entourent ceux qui gouvernent.

Pierre Guyot

Pierre Guyot

Pierre Guyot est journaliste, producteur et réalisateur de documentaires. Il est l’un des fondateurs et actionnaires d’Atlantico.

 

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Et revoilà les fameuses "primes de cabinets" ! Le Figaro a décortiqué le "jaune budgétaire" (comprenez le document fourni en annexe du Projet de Loi de Finances) qui fait la liste des rémunérations complémentaires versées aux collaborateurs des cabinets ministériels du gouvernement Ayrault et en a publié hier les montants. C’est peu dire que le sujet est un marronnier. Il cumule en effet à l’avantage de refleurir à intervalles réguliers dans l’actualité, celui d’offrir au public un confortable terrain de jeu pour cracher sur ces feignasses de fonctionnaires et/ou ces incompétents de politiques et/ou ces voleurs qui nous dirigent…

Pour le coup, Le Figaro a raison de s’interroger sur la logique (Y-en-a-t-il une ?) qui mène à mieux rémunérer les collaborateurs de tel ministère plutôt que ceux de tel autre. 42.000 euros en moyenne de primes annuelles pour un conseiller d’Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée chargée de la Décentralisation (Mais si ! Faites un effort ! Tout le monde se souvient d’elle, bien sûr !!) contre 8.000 euros en moyenne pour un collaborateur de Michel Sapin au Ministère du travail : l’écart mérite certes qu’on s’interroge. 

La terminologie choisie par le Figaro qui désigne "les généreuses primes" de cabinet du gouvernement Ayrault est plus discutable puisque, comme le calcule Le Monde, les ministères (et donc les cabinets ministériels, et donc les conseillers) du gouvernement Ayrault ayant été plus nombreux que ceux du dernier gouvernement Fillon, le montant global des primes a été plus important. Dans le même temps, chaque collaborateur de ministre du gouvernement Ayrault a touché moins que son prédécesseur dans le gouvernement Fillon. 

Hélas, il est une question qui n’est jamais posée, celle de la légitimité et de la pertinence de ces primes. Deux, trois ou quatre mille euros de compléments de salaire mensuels sont-ils par principe indus et excessifs ? Par leur désignation administrative, ces «Indemnité pour sujétions particulières» (ISP) expliquent la raison même de leur existence.

Le rythme et la quantité de travail d’une fonction de conseiller en cabinet ministériel sont totalement hors-norme. Les semaines de 60, 70 ou 80 heures ne sont pas exceptionnelles. Le stress lié à une disponibilité de tous les instants laisse généralement les conseillers essorés au bout d’à peine deux ans. Chaque remaniement rappelle la précarité du poste pour tous les "contractuels", ces conseillers qui ne sont pas fonctionnaires et se retrouvent le plus souvent au chômage quand leur ministre est remercié. Il est rare également de lire des articles consacrés à ces profils hautement qualifiés qui ne font pas partie de la fonction publique et qu’un ministre ne peut recruter, faute d’en avoir les moyens. Plus d’un conseiller ministériel venu du secteur privé accepte de baisser son salaire pour travailler au sein d’un cabinet, encore faut-il que cette baisse reste raisonnable et gérable pour l’intéressé (Pour exemple, ce cadre de haut niveau qu’un ministre reconduit dans le gouvernement de Manuel Valls souhaitait recruter et qui n’a pu rejoindre le cabinet ministériel : le montant de la rémunération qui lui était proposée lui permettait à peine de payer le montant de son impôt sur le revenu, calculé sur son salaire précédent !).

Par ailleurs, les rémunérations des conseillers "contractuels", toutes primes incluses, ne peuvent en aucun cas être supérieures de plus de 15% à leur salaire d’origine et dans tous les cas, ces indemnité pour sujétions particulières sont clairement indiquées sur tous les contrats de travail et sont évidemment déclarées au fisc. On est loin des enveloppes de liquide passées de main à main d’il y a encore quinze ans.

A l’arrivée, il n’est pas question de faire pleurer dans les chaumières sur des rémunérations qui sont très largement supérieures au salaire moyen des Français. Mais il serait sain de s’interroger sur le niveau des conseillers et techniciens que la société souhaite pour entourer et aider ceux qu’elle a désignés pour gouverner. Et donc de s’interroger sur les moyens financiers qu’elle est prêt à y mettre.

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