Henri Proglio sera-t-il reconduit à la tête d'EDF pour ses mérites ou par le système ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Henri Proglio devrait être reconduit lundi à la tête d'EDF.
Henri Proglio devrait être reconduit lundi à la tête d'EDF.
©Reuters

Recette gagnante

Le PDG d'EDF, Henri Proglio, devrait être reconduit à son poste après le vote de l'assemblée générale des actionnaires et sur décision finale de François Hollande. Et ce n'est pas grâce à son mauvais bilan à la tête de l'entreprise.

Thierry Gadault

Thierry Gadault


Thierry Gadault, journaliste économique indépendant, a travaillé pour La Tribune, l'Expansion et le Nouvel Économiste. Il est co auteur d’"Henri Proglio, une réussite bien française. Enquête sur le président d'EDF et ses réseaux, les plus puissants de la République" aux Editions du moment, (2013), et publie fin octobre une enquête sur EDF chez First édition, "La bombe à retardement". Il est également rédacteur en chef du site Hexagones.fr

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Atlantico : Le conseil d'administration d'EDF se réunit ce lundi 29 septembre, pour examiner la liste des administrateurs qui sera soumis au vote de l'assemblée générale des actionnaires. Henri Proglio devrait être reconduit à la tête d'EDF. Quel bilan peut-on faire de son action ?

Thierry Gadault : Si on prend la situation financière de l’entreprise, le bilan est extrêmement mauvais puisque EDF est surendettée, ces performances opérationnelles sont extrêmement faibles, il n’y a plus d’argent en caisse et donc le financement de la montagne d’investissements que l’entreprise doit faire au cours des dix prochaines années est impossible.


Côté opérationnel, on peut considérer que tout compte fait, Henri Proglio a plutôt bien mené sa barque en éviter tout conflit social dur à l’occasion de l’annonce de la fermeture de la centrale de Fessenheim, d’autre part il a quand même réglé les trois dossiers les plus embêtants pour EDF à l’internationale, à savoir l’Italie, l’Allemagne et les Etats-Unis. Mais au final, la situation globale d’EDF est aujourd’hui extrêmement préoccupante.

Comment expliquer alors son maintien à ce poste ? S’agit-il d’une position acquise par le mérite ou est-ce dépendant d’un certain système qui le favorise ?

La réponse est un peu complexe. D’un côté ce qui est évident, c’est qu’il n’y a pas de générations de patrons aujourd’hui d’entreprises publiques qui se détachent, ce qui ferait que le gouvernement aurait un choix assez important pour pouvoir remplacer un tel ou un tel. C’est ce système qui est en place, et il se maintient, c’est d’ailleurs ce qui est arrivé à Stéphane Richard à la tête d’Orange. D’autre part, vu de l’Elysée, il a rempli en grande partie le deal qui avait été passé, sous cet angle là il n’y a de raisons non plus de le sanctionner.

On parle d’un homme qui a les réseaux les plus puissants de France, qui a été pendant plus de 30 ans, un lieutenant puis le général de la Compagnie générale des eaux, qui est devenu Vivendi, puis Véolia. C’est la société de services aux collectivités locales, Henri Proglio connaît donc bien toutes les coulisses et les secrets de la politique, c’est donc assez difficile de se fâcher avec un personnage tel que lui. Mais en même temps, il a 65 ans passées, on ne peut pas dire que EDF soit dans une situation très reluisante, on ne pas considéré que le forcing qui a été fait pour prolonger de 20 ans la durée de vie des centrales soit une excellente idée, il y a donc aussi tous les arguments pour en changer… Après il s’agit d’une question de volonté politique…

Pourtant en 2012, le candidat François Hollande voulait sa tête : "Proglio, il est sur la liste, celui-là. Ce type qui organise des meetings dans les centrales nucléaires contre les accords Verts-PS", déclarait-il. C'est aujourd'hui le Président Hollande qui prendra la décision finale. Comment expliquer ce revirement ? Comment Henri Proglio a-t-il gagné sa place ?

Entre mai et août 2012, à la suite de l’élection présidentielle Henri Proglio avait clairement pris position en faveur de Nicolas Sarkozy. A l’époque son maintien en place est du à deux faits : d’une part l’incapacité du Président en place à trancher et prendre des décisions, d’autre part une partie de son entourage était pour le maintien en poste de Proglio à la condition qu’il accepte un deal qui portait sur trois points. Le premier était la baisse de sa rémunération pour la mettre au niveau demandé pour les chefs d’entreprises publiques, ce qu’il a fait. Deuxièmement, il devait mettre sous contrôle la CGT pour éviter tout débordement social, il l’a fait. Et le troisième c’était de participer positivement à la préparation de la loi sur la transition énergétique, il a effectivement participé, mais si j’étais un partenaire écologiste du gouvernement je dirais qu’il a plutôt tout fait pour couler les ambitions de la loi, plutôt que d’en faire un instrument de politique énergétique.

Qui sont ses alliés dans le monde politique ?

Le lobbyiste Paul Boury est l’une des personnes qui ont fait le lien entre Henri Proglio et François Hollande, à l’Elysée il avait un soutien de poids : Pierre-René Lemas, l’ancien secrétaire général de l’Elysée, et au sein du gouvernement et à l’Assemblée, il avait de très nombreux élus, à commencer par Jean-Marc Ayrault.

Récemment Ségolène Royal lui demandait s'il était vraiment indispensable qu'il reste jusqu'en 2017... Qui sont les autres prétendants au "trône" ? Henri Proglio est-il sûr de l'emporter ?

Tant que la décision n’est pas prise on ne peut pas être sûr, mais s’il est renommé dans la liste des administrateurs c’est déjà un signe important. Thierry Breton, l’ancien ministre de l’Economie et patron d’Atos n’est pas candidat officiellement, mais on sait qu’Alain Minc et son ami Jean-Pierre Jouyet, le nouveau secrétaire général de l’Elysée ont fait le forcing cet été pour le positionner. On sait que de nombreux ministres sont opposés à un renouvellement d’Henri Proglio, que le nom de Guillaume Pépy est ressorti lui aussi durant l’été et qu’il se tiendrait prêt. Et le corps des mines essaie toujours de positionner l’un des siens, peut-être Jean-Pierre Clamadieu, le patron de Solvay.

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