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La germanophobie ambiante,
ou la peur refoulée de nous-mêmes
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Même pas peur !

Malgré la crise européenne et les tensions au sein du couple franco-allemand, la France ne doit pas avoir peur : les solutions existent, alors cessons de nous replier sur nous-mêmes.

UE Bruxelles AFP

Jean-Paul Betbeze

Jean-Paul Betbeze est président de Betbeze Conseil SAS. Il a également  été Chef économiste et directeur des études économiques de Crédit Agricole SA jusqu'en 2012.

Il a notamment publié Crise une chance pour la France ; Crise : par ici la sortie ; 2012 : 100 jours pour défaire ou refaire la France, et en mars 2013 Si ça nous arrivait demain... (Plon). En 2016, il publie La Guerre des Mondialisations, aux éditions Economica et en 2017 "La France, ce malade imaginaire" chez le même éditeur.

Son site internet est le suivant : www.betbezeconseil.com

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Il faut cesser de se faire peur. La crise est bien présente, on le voit tous les jours, mais les solutions pour la traiter aussi, et on l’oublie trop. On peut toujours critiquer une Allemagne qui serait trop stricte et exporterait (trop ?), mais que serait-on sans son appui ? Un appui qui lui coûte, on le voit de plus en plus, mais qu’elle continue à apporter, s’il aide à changer les comportements pour conforter la maison commune. Car il est évident que l’Allemagne a intérêt au succès de l’Europe, comme nous. Et que ce succès passe par des règles plus strictes dans la dépense publique, notamment dans nos économies matures, exposées, vieillissantes.

La germanophobie qui revient est ainsi, en réalité, une europhobie, avec l’idée que les contraintes de l’euro seraient trop fortes, à moins que ce ne soit l’euro lui-même. Ainsi, pour se défaire du "joug" allemand, rien de tel que de s’affranchir de la monnaie unique, donc de dévaluer. On retrouverait ainsi notre liberté. On reprendrait la suite de nos dévaluations de la monnaie française par rapport au mark, avec ses résultats sur la compétitivité. Regardons notre déficit, regardons l'excédent allemand... et que l'on nous explique comment pouvoir dévaluer c'est la bonne façon pour soutenir l'industrie !

Plus profondément, n’est-ce pas une francophobie que l’on voit ici, une peur de nous-mêmes ? Une peur de prendre nos responsabilités, une crainte devant une action plus complexe, une action qui remet en jeu nos habitudes, puisqu’il s’agit de réformes profondes. Pour en sortir, il ne s'agit pas seulement d’arrêter de critiquer les autres pays et nos politiques (comme s'ils ne nous reflétaient pas) et de nous plaindre de ce qui nous arrive. Le monde ne nous en veut pas, il peut faire sans nous : à nous d’être "avec lui". Il faut cesser aussi d'attendre la solution simple et unique, l’inflation (d’où ?) ou bien la dévaluation, alias l’éclatement de la zone euro.

Il faut plutôt se dire que la phase actuelle de ralentissement est périlleuse, car nous sommes en surendettement, et qu’il faut en sortir au plus vite. Ralentir, c’est  prendre le risque de s‘enfoncer. C’est bien pourquoi la Banque centrale européenne (BCE) doit (et va) racheter du papier public pour faire baisser les taux longs et permettre que la crise grave s’éloigne.

Les "mesures non conventionnelles" vont continuer, mais elles seront soumises à la condition que les États fassent leur devoir d’assainissement budgétaire. La BCE va ensuite continuer à refinancer les banques, pour qu’elles financent l’économie d’abord, se renforcent, et éventuellement se regroupent. Elle leur accordera donc des financements plus longs, prendra des covered bonds et fera reculer les tensions actuelles sur la liquidité. Elle va, aussi, baisser ses taux, faisant que la courbe des taux réels des meilleurs soit négative en termes réels, et que peu à peu une telle situation se retrouve pour les autres – sachant que leur refinancement passera par l’EFSF.

On peut toujours agiter des craintes, parler du pire, réveiller de vieux démons. C’est risqué. Ça l’est d’autant plus que les solutions se mettent en place pour en sortir. Elles sont plus compliquées qu’aux États-Unis, au Japon ou en Grande-Bretagne, à savoir demander à la banque centrale d’acheter de la dette publique. C’est parce que la zone euro est plus compliquée, c’est aussi parce que les situations de certains sont plus tendues, c’est enfin parce que la pression d’ajustement budgétaire et de soutien à la croissance privée est ainsi plus forte.

N’ayons donc pas peur ! Ce que nous faisons prouve les efforts faits. Il faut continuer dans la même voie.

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