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"En France le seul bon philanthrope est le philanthrope mort"
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Générosité

Bill Gates vient d'annoncer qu'il ferait un don de 1,6 milliards à l'occasion du sommet de l'Alliance mondiale pour les vaccins et l'immunisation (GAVI) à Londres, ce lundi. Le philanthrope américain consacre désormais sa vie à sa fondation, Bill et Melinda Gates. Qu'en est-il des plus grandes fortunes de France, sont-elles généreuses ?

Antoine Vaccaro

Antoine Vaccaro

Antoine Vaccaro est docteur en Science des organisations, président du Cerphi et enseignant à Sciences Po Paris.

 

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Atlantico : Quand un philanthrope français  s’affiche, qu’il  fait acte de générosité, l’opinion publique au lieu de louer cet acte, pose, in petto, la question : comment s’est-il enrichi ; pourquoi cette suspicion ?

Antoine Vaccaro : Cette suspicion est liée au climat de défiance qui règne entre les Français  et plus particulièrement envers leurs « élites ».[1] Ce qui me fait dire qu’en France le seul bon philanthrope est le philanthrope mort. Celui-là a fait son legs ; a désigné les causes qu’il souhaite soutenir et dès lors, on l’honore.

La deuxième raison est juridique. Si les donations anglo-saxonnes sont extravagantes, c’est que les héritiers n’ont aucun droit à revendiquer une quelconque quotité réservataire. Aux USA ou en GB on peut déshériter ses héritiers et tout donner à une cause,  ce qui n’est pas le cas dans les pays latins.

La troisième raison est liée au système fiscal en amont du don. Si la fiscalité du don en France est parmi les plus avantageuse au monde, les prélèvements fiscaux et sociaux sont perçus, par les  plus les grandes fortunes, comme confiscatoires. Aussi il est de bon aloi de renvoyer les questions de prise en charge de l’intérêt général à l’Etat Providence.

La quatrième raison est économique. Plus vous avez de milliardaires dans un pays et plus  vous avez de philanthropes. Néanmoins se pose la question du partage de la richesse, ce qui est un autre problème. 

En France, nous avons aussi de grands philanthropes, pour ne citer que nos deux plus grands capitaines d’industrie, François Pinault et Bernard Arnault, mais leur philanthropie est tournée vers l’art et la culture. Cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas intéressés par le  social et l’humanitaire, mais ils en parlent moins. Ils préfèrent mettre en avant le côté prestigieux de leur fondation, de leur musée, de leur collection, plutôt que le volet caritatif, pour ne pas se voir reprocher d’être, au mieux, paternalistes au pire opportunistes.

Que faire pour encourager la philanthropie en France ?

Sur le plan fiscal on peut difficilement demander plus. La seule chose qui reste à changer : la capacité de testateur de déshériter ses héritiers. Ce serait très populaire ! C’est une vraie mesure d’égalité. La gauche pourrait le proposer au-delà d’un certain montant de fortune.



[1] La société de défiance : Comment le modèle social français s'autodétruit ?

Yann Algan, Pierre Cahuc

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