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Génération quinquas : le match des stratégies des prétendants au leadership d'une droite decapitée
©Reuters

Bulletin de notes

Le parti Les Républicains doit se trouver un nouveau chef après la défaite de François Fillon à l'élection présidentielle. En coulisse, les ténors affutent leurs armes pour prendre position. Si François Baroin et très offensif, Christian Estrosi est plus dans l'entente avec Emmanuel Macron. L'échéance importante est l'élection législative de juin.

Tristan Quinault-Maupoil

Tristan Quinault-Maupoil

Tristan Quinault-Maupoil est journaliste politique au Figaro.fr. 

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Atlantico : Qui parmi les ténors de la droite est le plus à même de prendre la tête des Républicains dans la campagne des législatives ? Quelles sont les stratégies mises en place par François Baroin, Laurent Wauquiez, Xavier Bertrand ou Christian Estrosi  à cet effet, et notamment dans leur positionnement vis à vis d'Emmanuel Macron ? 

Tristan Quinault-Maupoil : Laurent Wauquiez est en position de prendre la direction du parti Les Républicains et pour la direction de la campagne des législatives, c'est François Baroin qui est en tête. Les sarkozystes se sont mis d'accord. Ils se sont organisés pour imposer ces deux noms là mardi matin à l'occasion d'un petit déjeuner où ils ont pu discuter de ces sujets-là. Brice Hortefeux qui est vu comme la voix de Nicolas Sarkozy avait déjà évoqué ces deux noms-là le lundi à la radio pour assurer le fonctionnement du parti pour l'après présidentielle. C'est grâce à cette organisation que les sarkozystes ont pu s'imposer. A l'inverse, les juppéistes ont contesté ces deux choix-là mais n'ont pas eu de leader à proposer en lieu et place de François Baroin et Laurent Wauquiez. Ils se sont moins bien organisés pour s'imposer dans cette course. Les fillonistes sont quant à eux mal placés pour imposer quoi que ce soit. Ils ont perdu la présidentielle dès le premier tour. Le premier cercle a soutenu François Fillon dès le début contre vents et marée. Les sarkozystes se sont positionnés de fait pour prendre la direction du parti. 

En ce qui concerne Laurent Wauquiez et François Baroin, ils ont tous les deux opté pour la stratégie du coup de force, ce que certains appellent un putsch. Ils s'imposent en l'absence d'alternative. C'est un état de fait qui devient une évidence. 

Pour Christian Estrosi, c'est un peu plus compliqué parce qu'il a évoqué la possibilité de tendre la main à Emmanuel Macron. Il laisse même entendre qu'il pourrait former une coalition avec le candidat d'En Marche!. Il sort du cadre des Républicains. Cela va être compliqué pour lui de trouver une place dans le nouvel organigramme du parti. 

En ce qui concerne Xavier Bertrand, il a réuni ses proches lundi. Lui aussi veut s'organiser. Il était l'invité du journal de 20 heures sur France 2 hier soir. Il n'a pas fait d'annonce mais a tenu à rappeler de l'importance de voter pour Emmanuel Macron au second tour de la présidentielle et de faire barrage au Front National. Est-ce que c'est la conséquence de sa réunion de lundi ? C'est un peu tôt pour le dire. Ce qui est sûr, c'est qu'il souhaite peser dans la nouvelle organisation des Républicains mais on ne sait pas encore comment il compte le faire. Xavier Bertrand est dans une situation un peu similaire à celle de Christian Estrosi dans la mesure où il a été élu président d'une région, les Hauts de France, après les élections régionales de décembre 2015. Il s'était imposé grâce à un front républicain avec les voix de la gauche. Il a proposé de tendre la main à Emmanuel Macron. Ce n'est pas le ténor qui a les mots les plus durs. Il élargit sa prise de parole au-delà du cadre du parti. On peut rajouter Bruno Le Maire qui évoquait la possibilité d'une coalition.

En réalité, il y a au sein de la droite ceux qui sont persuadés que même en ayant perdu les présidentielles, la droite peut arriver au pouvoir grâce aux élections législatives. Ce sont qui pensent que la droite a perdu l'élection présidentielle uniquement à cause de François Fillon et que les idées de droite sont majoritaires en France. Ils sont convaincus que la droite l'emportera en juin prochain. Ces ténors-là sont sur une ligne intransigeante par rapport à Emmanuel Macron. Enfin, il y a une autre ligne qui ne croît que moyennement à cette victoire en juin et qui pense que la seule manière d'exercer le pouvoir, c'est de dialoguer avec le candidat d'En Marche! et participer au renouvellement de la classe politique. Bruno le Maire est l'une des personnalité qui s'était présentée à la primaire comme le candidat du renouveau. Xavier Bertrand fait partie de ces quadras qui souhaite encore avoir une action au sein du parti et Christian Estrosi qui est plus âgé mais qui est de la même génération que François Fillon et Nicolas Sarkozy et veut encore exercer le pouvoir. 

Quels sont les atouts dont devront disposer ces personnalités pour espérer prendre le "lead" sur le parti ? Comment se positionnent-ils à l'heure actuelle dans cette course ? 

Pour prendre le commandement du parti, les prétendants doivent avoir le cœur des militants. Ce qui est une chose assez difficile à réaliser parce que pour avoir le cœur des militants, il faut tenir un discours intransigeant, un peu dur, ce qui peut être en contradiction avec le pouvoir ou il faut élargir son influence à tous les Français. Pour convaincre l'ensemble des Français, il faut être capable d'avoir un discours un peu plus modéré. C'est ce que Laurent Wauquiez fait. Il a le cœur des militants parce qu'il joue la carte des militants tout comme Jean-François Copé ou Nicolas Sarkozy avaient pu le faire à leur époque. 

On peut compter deux catégories de ténors chez Les Républicains. D'une part, ceux qui pensent pouvoir accéder au pouvoir via le parti, que le parti représente une première étape, une rampe de lancement pour le pouvoir. C'est le cas de Laurent Wauquiez. Et il y a ceux qui pensent au contraire que le parti est quelque chose de démodé, qui veulent se passer du parti et regardent l'exemple d'Emmanuel Macron avec attention. C'est notamment le cas de Bruno le Maire.  

L'union du parti, bien que fragile, a pour le moment résisté aux différentes affaires Fillon pendant la campagne, celle-ci est-elle à risque en vue des prochaines législatives ? Une tension politique interne pourrait-elle achever les tensions existantes, ou la résilience du parti est-elle encore suffisante pour y résister ?

L'unité au sein des Républicain est d'abord fragilisée par une question de ligne politique plus que par l'affaire Fillon. Les ténors cherchent à savoir quel ton adopter face à Emmanuel Macron. Est-ce qu'il faut adopter une ligne plus à droite ou plus centriste ? Voilà les enjeux qui divisent la droite actuellement. L'affaire Fillon est cantonnée à l'ancien candidat sur lequel la faute est rejetée. Le soir de la défaite, Éric Woerth avait tout de suite déclaré que ce n'était pas une défaite de la droite mais une défaite personnelle de François Fillon. L'idée selon laquelle la défaite à la présidentielle est une défaite personnelle du candidat fait consensus. On peut tout de même trouver à droite quelques voix qui expliquent qu'il faut trouver des idées moins radicales que celles de François Fillon. Mais une fois encore, c'est un débat de ligne politique et pas sur l'affaire en tant que telle. 

L'unité du parti des Républicains a assez bien tenu jusqu’à présent. Désormais, il n'y a qu'une seule échéance, les élections législatives. Soit la droite les remporte et elle se trouvera face à l'exercice du pouvoir. La question de l'unité sera mise sous le tapis. Ou bien, elle les perd, et ce sera la deuxième défaite en très peu de temps et là, ça peut ouvrir une crise très importante chez les Républicains. Les prochaines législatives seront décisives. 

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