France-Espagne : le match de la vengeance pour la presse ibérique<!-- --> | Atlantico.fr
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La France rencontre l’Espagne ce samedi dans le cadre des quarts de finale de l’Euro 2012.
La France rencontre l’Espagne ce samedi dans le cadre des quarts de finale de l’Euro 2012.
©Reuters

Euro 2012

Ce samedi soir l'équipe de France rencontrera l'Espagne dans le cadre des quarts de finale de l'Euro 2012. Quelques mois après la polémique sur le dopage des sportifs espagnols déclenchée par les guignols de canal+, les médias ibériques nous en veulent-ils toujours ?

Javier Gómez Muñoz

Javier Gómez Muñoz

Javier Gómez Muñoz est un journaliste et présentateur espagnol.

Il a été correspondant en France pour le quotidien espagnol La Razón et a participé aux émissions politiques i-Europe, C dans l’air ou Mots croisés.

Il a également chroniqué le football espagnol dans l'émission "L'équipe du dimanche" entre 2006 et 2007.

Javier Gómez Muñoz travaille actuellement pour la chaîne de télévision espagnole La Sexta.

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Atlantico : La France rencontre l’Espagne ce samedi dans le cadre des quarts de finale de l’Euro 2012. La dernière défaite en match officiel de La Roja était contre la France en 2006. Zinedine Zidane avait été alors expédié un peu trop vite à la retraite par la presse ibérique. La presse espagnole a-t-elle appris de ses erreurs ?  

Javier Gómez : La presse est sans doute un peu plus molle qu’en 2006 car il n’y a pas de Zidane à envoyer à la retraite. Mais il ne faut pas oublier que l’Espagne est un pays fier qui n’apprend jamais de ses erreurs. La Une du quotidien sportif Marca représentait ce mercredi Karim Benzema, cachant son visage, admettant que l’Espagne était la grande favorite...

Nous avons réalisé des micros-trottoirs à Toulouse pour la chaine espagnole Sexta. Les Français étaient unanimes : « On joue mal ! L’Espagne va nous battre 5-0 ! ». Le pessimisme était vraiment de rigueur. Nous avons fait le même type de micro-trottoir à Madrid. Le contraste était saisissant. Du coté espagnol, le leitmotiv était : « On va les massacrer ! ».

Qu’en est-il de l’équipe ? Les joueurs espagnols partagent-ils l’enthousiasme des supporters ?

Ce caractère espagnol qu’on constate dans la rue n’est pas présent dans l’équipe. Les joueurs essayent un peu de calmer les troupes. Ils tempèrent l’atmosphère et préviennent tout le monde qu’ils ne peuvent pas gagner tous leurs matchs 3 à 0. A l’image de l’entraineur, Vicente Del Bosque, je crois qu’ils font preuve d’humilité.

Dieu merci, les espagnols ont une équipe qui ne leur ressemble pas. Curieusement, les joueurs espagnols sont les moins « espagnols » des espagnols… Ce sont des personnes très tranquilles, il n’y a pas de grandes stars type Cristiano Ronaldo ou des personnalités comme Mario Balotelli ou Zlatan Ibrahimovic. Ce sont des « mecs » très calmes, qui protestent rarement face à l’arbitre. C’est d’ailleurs la grande force de notre équipe, il n’y a pas de luttes d’égo.

Le dernier match de l’Espagne face à la Croatie a été, de l’avis de la majorité des observateurs, très poussif. Comment a été accueillie la prestation de La Roja par la presse ibérique ?

Le match a beaucoup fait parler. Il y a eu un phénomène intéressant : Vicente Del Bosque s’est fâché à cause des critiques, notamment sur le fait que l’Espagne n’ait pas joué avec un véritable attaquant de pointe. Del Bosque a eu une réaction de « mauvais politique » qui pense que si les journalistes le critiquent c’est qu’ils sont forcément contre lui.

Comme l’équipe espagnole a récemment tout gagné, il lui parait injuste de recevoir des critiques. Nous sommes des journalistes et non des supporters. Nous ne sommes pas là pour les applaudir à chaque fin de match. S’ils jouent mal, c’est notre métier de le dire.

Même une certaine presse a suivi le mouvement en accusant les journalistes de remettre en cause les principes de jeu espagnols. Personnellement, je trouve qu’on a trop confiance en notre style et qu’on se regarde un peu trop dans la glace. On exagère un peu quand on décide de joueur sans un vrai attaquant.

Les médias reviennent-ils sur la polémique lancée par les guignols de canal+ et les déclarations de Yannick Noah sur les sportifs espagnols et le dopage ?

Tout d’abord, il faut savoir que les Espagnols ont une sorte de complexe d’infériorité envers les Français depuis 1808 (Guerre d'indépendance espagnole qui opposa la France et l'Espagne). L’affaire des guignols et les déclarations ont réveillé un peu ce nationalisme « à deux sous ». Internet, Twitter fourmillent de parodies sur le sujet. L’esprit est revanchard.

Cela touche également les journalistes. Hier, en conférence de presse, la première question du journaliste de marca était sur la « campagne » française contre les sportifs espagnols, oubliant que les guignols sont tout de même une émission satirique qui est censée rigoler de tout.

J’ai parlé en privé avec Iker Casillas, le gardien titulaire de l’équipe espagnole, qui était visé par les guignols avec Rafael Nadal et Alberto Contador. Encore une fois, les joueurs sont très loin de la polémique. Iker Casillas est sincèrement le premier à n’avoir que faire de cette histoire. Son regard est simple : c’est de l’humour et cela ne mérite pas qu’on s’y attarde plus.

Sur le plan football, que dire du mach samedi ?  

Je pense que nous allons assister à l’exact contraire du match de 2006. Aujourdh’ui, l’Espagne connait exactement son plan de jeu, c’était le cas de la France en 2006. Aujourd’hui, l’Espagne a une équipe composée en majorité de vétérans, comme la France de Raymond Domenech il y a 6 ans. Enfin, La France est maintenant une équipe en phase ascendante forte techniquement, ce qui était le cas des espagnols en 2006.

La France manque encore de maturité, d’expérience. L’Espagne reste la grande favorite, encore plus après ce qu’il s’est passé au sein de l’équipe de France après la défaite contre la Suède. Certains pensent que cela pourrait être de nature à requinquer le groupe, à les remobiliser. Si ça peut s’avérer vrai pour les Italiens (bousculés par des affaires de paris truqués), je ne crois pas que cela soit la même chose pour la France. Le caractère français est différent et le problème est interne à l’équipe et non externe comme le scandale du Calciopoli.

Je vais être très honnête, je crois que ça sent mauvais pour la France…

Propos recueillis par Jean-Benoît Raynaud

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