Combien coûte vraiment une place de cinéma ?<!-- --> | Atlantico.fr
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3 euros la séance... vraiment ?
3 euros la séance... vraiment ?
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Fête du cinéma

Du 25 juin au 1er juillet, la Fête du cinéma bat son plein. Pour une place achetée, chaque séance suivante est à trois euros. Mais au fait, quel est le "vrai" prix d'une place de cinéma ?

Françoise Benhamou

Françoise Benhamou

Françoise Benhamou est économiste, professeur à l'université Paris 13 et chercheur au CEPN.

Elle tient une chronique régulière sur Livres Hebdo et Rue89.

 

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Atlantico : La Fête du cinéma, la Rentrée du cinéma, le Printemps du cinéma… Les exploitants sont-ils en train de brader les tickets ?

Françoise Benhamou : Ce sont des formes de promotion tout à fait classiques, qui s’adressent à ceux qui vont de toute façon au cinéma, mais avec l’idée que la fête va y faire revenir des gens qui n’y étaient pas allés depuis longtemps, soit par un effet prix, soit par un effet de publicité. L’envie revient, et on essaye de redéclencher un phénomène d’habitude d’aller au cinéma qui aurait pu se perdre.

Que cela se fasse de plus en plus au cours de l’année, c’est peut-être une bonne chose. En plus, ça booste un peu les statistiques de fréquentation. Ces dernières sont bonnes, mais il y a toujours une fragilité du cinéma. D’abord, quand on regarde les statistiques, on peut regretter que le cinéma français n’ait pas une part aussi élevée que d’autres années, et puis il y a toujours cette idée qu’avec la culture ce n’est jamais gagné.

Entre les promotions sur Internet, les billets à plus de 10 euros, le surcoût de la 3D, comment savoir combien coûte vraiment une place de cinéma ?

On est typiquement dans ce que l’on appelle des politiques de discrimination par les prix en économie. Vous n’avez pas un prix de la place de cinéma, mais des politiques de prix, qui sont destinées à d’adapter au fait que les différentes personnes qui sont susceptibles d’aller au cinéma ont des dispositions à payer qui sont tout à fait différentiées. Si on a une politique de prix uniforme, on risque de perdre un certain nombre de gens, ou à l’inverse de se passer de recettes supplémentaires en faisant payer davantage ceux qui sont prêts à payer plus.

La recette moyenne est autour de 6 euros. Derrière ça, il y a de plus en plus de places vendues au-delà de 10 euros, des abonnements annuels… L’idée, c’est de jouer sur ces différentiels de consentement à payer.

Que faut-il penser de l’avant-première du dernier volet d’Harry Potter à Bercy le 12 juillet prochain, en 3D et pour 25 euros ?

Les recettes pour les producteurs et les distributeurs vont être inchangées : ce que vous perdez à un endroit, vous le gagnez ailleurs. Quand vous organisez ce genre d’événement, il est clair que vous « volez » une partie du public des salles. Est-ce que c’est illégitime ? Pour moi, ça ne l’est pas. Le cinéma a vocation à passer par toutes sortes d’intermédiations : le DVD, le téléphone portable, la salle, et aussi par de grands événements comme celui-là. Ils ne sont pas incompatibles. On ne peut pas dire que tous les gens qui vont à Bercy seraient allés en salle. L’événement Bercy, en lui-même, peut les décider à aller voir le film.

Finalement le DVD et le piratage ne tuent pas les salles, comme les exploitants le craignaient il y a quelques années…

Il peut même y avoir un effet positif. Le piratage a un fonctionnement beaucoup plus compliqué que ce qu’on dit. C’est-à-dire que ce n’est pas que de la perte de recettes, mais aussi de la création de notoriété. Tout ce qui est piraté n’aurait pas obligatoirement été acheté.

De même, le DVD, et encore moins le numérique, n’ont pas tué la salle. Le numérique, qui correspond à une consommation individualisée devant son écran, réanime la salle en lui redonnant un attrait social. Dans le fond, les salles se portent d’autant mieux que les gens regardent leur ordinateur seuls. En revanche, le streaming peut réduire la part du DVD physique. Des concurrences existent, mais elles s’exercent de manière complexe.

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