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Exclusif : l'insoutenable affaire de l'instituteur de Savoie violeur et agresseur présumé de 33 fillettes
©Reuters

Sale affaire

Un instituteur de Savoie est soupçonné d’avoir violé ou agressé sexuellement 33 fillettes entre 2011 et 2013. Les enquêteurs ont retrouvé des milliers de photos sur son ordinateur qui montraient les parties intimes des enfants, tous âgés entre 5 et 12 ans. Leurs témoignages sont accablants. Atlantico a lu le réquisitoire du parquet de Chambéry qui demande le renvoi aux assises de l’instituteur où il devrait être bientôt jugé. Insoutenable.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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Un instituteur de Savoie, âgé de 50 ans, soupçonné entre 2011 et 2013, d’avoir violé ou agressé sexuellement 33 fillettes devrait bientôt être jugé par une Cour d’assises ;

- Le parquet de Chambéry vient en effet de demander son renvoi. La juge d’instruction devrait, à moins d’un coup de théâtre improbable, faire de même ;

- L’instituteur semble lui aussi avoir être victime d’agressions sexuelles de ses oncles lorsqu’il était jeune ;

-Pour les psychiatres, la dangerosité de l’enseignant ne fait aucun doute. Ils estiment également qu’il est accessible à une sanction pénale.

C’est un procès pénible, pour tout dire insupportable, qui devrait se tenir prochainement devant la Cour d’assises de Savoie : celui d’un instituteur, Eric Molcrette, 50 ans, soupçonné de s’être livré à des viols et agressions sexuelles sur 22 fillettes âgées de 5 à 6 ans au moment des faits, c’est-à-dire entre le 1er septembre 2011 et le 9 avril 2013. A l’époque, Eric Molcrette était en poste en Savoie, instituteur commun aux deux villages de Planaise et de Chavanne. Ce n’est pas tout : ce maître, qui pendant les vacances d’été, s’occupait d’un centre équestre en Charente-Maritime, à Mornac-sur-Seudre, devrait également rendre des comptes dans une autre affaire : il se serait livré à des agressions sexuelles sur 11 fillettes âgées de 9 à 11 ans. Soit en tout 33 fillettes. Aujourd’hui, l’instruction est terminée et le Parquet de Chambéry a demandé, dans son réquisitoire, le renvoi de l’instituteur devant la Cour d’assises. En toute logique, la juge d’instruction Sophie Muracciole devrait suivre le Parquet. Toutes les victimes se sont constituées partie civile, via des avocats de Chambéry. La  Fondation pour l’enfance, qui fait beaucoup pour les enfants victimes de violence ou de maltraitance,  dont la présidente d’honneur est Anne-Aymone Giscard d’Estaing, a pris la même initiative, via son avocat Olivier Baratelli. Lequel confie : "  Je souhaite que ce procès,  qui devrait se tenir bientôt, ait une valeur pédagogique. Il faut que l’opinion, et bien-sûr les pouvoirs publics, prennent  bien conscience, une  fois encore, que les agressions sexuelles détruisent des familles entières. Je souhaite également que les audiences permettent aux parents de faire leur deuil de ce qu’ont subi leurs enfants et que ces derniers puissent se reconstruire et mener plus tard une existence paisible. " Voilà donc un procès qui risque d’être pénible pour les parents des victimes, et au cours duquel devrait être à nouveau évoqué le rôle de l’Education nationale. En clair, celle-ci a-t-elle été suffisamment vigilante ? Ou a-t-elle fait preuve d’attentisme dans la dénonciation des faits ? L’inspecteur académique, d’emblée, a dit qu’il avait été le premier à dénoncer les faits à la justice.

10 avril 2013. Virginie C. mère de Martine*, et François D. père de Marie, se présentent à la gendarmerie de Montmelian pour déposer plainte pour viol contre Eric Morclette, professeur de leurs enfants à l’école de Planaise, village de 400 habitants situé à 18 kilomètres de Chambéry. Virginie raconte que le professeur a mis au point un jeu, dénommé le jeu du goût. C’est ainsi que sa petite fille, Martine, les yeux cachés par un masque doit lécher un produit et tenter de le reconnaître.  Sauf que sa petite copine, Marie, fille de François D. trichant un peu, malgré l’interdiction du maître, a constaté que le maître sortait son «  zizi », sans ôter son pantalon, puis le trempait dans du sirop et le mettait dans la bouche de Marie. Entendue par les gendarmes, Martine répétait ce qu’elle avait vu. Très vite, l’audition des deux fillettes s’ébruite dans le village. C’est la stupéfaction. En poste depuis 2010, l’instituteur qui, pour l’année 2012-2013, enseignait  dans une classe de 22 élèves, - du cours préparatoire au cours moyen - était très apprécié. Mais là, c’est le choc. Enorme. Le 11 avril, placé en garde à vue, Eric Morclette conteste les faits décrits par la petite Martine… Puis, au fil de l’audition, il admet avoir eu, depuis quelque temps, des pulsions sexuelles, avant de reconnaitre que la fillette qui goûtait le sirop sur son pouce finit par le goûter sur son sexe. " J’avais immédiatement eu honte ", avoue-t-il aux enquêteurs. Avant d’admettre que sa conduite trouvait son explication dans une déception amoureuse datant de 2011. Morclette précisait encore avoir été victime dans le passé d’une agression sexuelle d’un de ses oncles.

Très vite, les investigations de la brigade de recherches de Chambéry va confirmer les accusations portées par les petites Marie et Martine. Toutes les fillettes de la classe d’Eric Morclette, également entendues, livreront un témoignage identique. Toutes diront avoir joué au " jeu du goût ". C’est par exemple Sonia, âgée de 6-7 ans, au moments des faits,  qui affirme que le maître, pendant le " jeu du goût "  se déroulant dans une salle de repos fermée, "  était gentil "… Mais que, en temps normal, il " était méchant " et " criait "  sans arrêt. Liliane, un peu plus âgée - 7-8 ans -  à  l’époque, répètera à ses parents, ainsi qu’à sa sœur et à son frère, que le maître " avait enlevé les boutons de sa braguette et il avait son zizi qu’elle devait lécher " Mireille se souvenait elle aussi du " jeu du goût ". Elle parlait à ses parents " d’un goût pas bon, salé comme le goût de la mer "Des témoignages de ce type, la justice va en recueillir plus d’une trentaine. Avec une constante terrible : tous ces enfants, selon l’acte d’accusation, ont été victimes de viols. Au centre équestre de Mornac-sur-Seudre (Charente-Maritime), où celles-ci étaient nettement plus âgées – l’une d’entre elles a aujourd’hui 16 ans - Eric Morclette est accusé d’agressions sexuelles aggravées.

Pour les élèves garçons, rien de tel. Aucun d’entre eux n’a été sollicité pour jouer au " jeu du goût ". Ou n’a été victime d’agressions sexuelles. Au fil de leur enquête, les gendarmes vont aller de surprise en surprise. C’est ainsi qu’en saisissant sur l’ordinateur de Morclette enregistrements, vidéos, photographies, ils vont mettre la main sur 500 000 photos dont beaucoup montraient les parties intimes des fillettes. Mais surtout, on y trouvait des fichiers d’enfants avec nom et prénom, ainsi que les fichiers d’enfants ayant séjourné au centre de Mornac (Charente-Maritime) du 1er au 31 août 2012.  Les agissements d’Eric Morclette révélés à Planaise constituent sans aucun doute le summum du sordide. Et de l’insupportable pour les parents. Témoin, ces photographies d’enfants prises lors de sorties scolaires ou dans la salle de motricité de l’école qui dévoilent en gros plan leurs parties intimes. Témoin, d’autres photos où l’on voit des enfants avec un liquide visqueux sur leur bouche. Témoin enfin, d’autres vidéos tout aussi insoutenables.

Lorsque cette succession de drames, qui a fracassé des dizaines de familles viendra aux Assises, tous les regards se porteront évidemment sur la vie, le passé, d’Eric Morclette.  L’accusation portée contre lui est lourde. Très lourde. Car au cours des audiences, des familles, des fillettes, pour certaines adolescentes revivront ce qu’elles ont vécu dans les années 2011-2012. Certaines victimes sont d’ailleurs soignées par des psychologues, tant le traumatisme subi est toujours présent. Mais cette affaire montrera une fois encore que les bourreaux, dans les dossiers de pédophilie, sont souvent les victimes d’hier. Le professeur des écoles Eric Morclette en est l’illustration.  Non seulement sa vie a été marquée par une atmosphère  de violence venant d’un père alcoolique, mais aussi par trois épisodes d’agressions sexuelles commises  par deux membres de sa famille et par un inconnu. Pour les psychiatres, la dangerosité de Molcrette ne fait aucun doute. Il est accessible à une sanction pénale…

*Les prénoms de tous les enfants ont été volontairement changés, la législation relative à la protection de la vie privée interdisant de donner l’identité d’un mineur.

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