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Accord sur la dette américaine : 
so what ?
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Edito

Les Etats-Unis ne seront pas en défaut de paiement. Formuler cette phrase nous paraît rétrospectivement surréaliste, et pourtant c’était bien l’objet de l’accord politique entre Démocrates et Républicains qui sera sûrement validé par le Sénat aujourd’hui. Mais un accord provisoire, qui ne résout rien sur le fond.

Alain Renaudin

Alain Renaudin

Alain Renaudin dirige le cabinet "NewCorp Conseil" qu'il a créé, sur la base d'une double expérience en tant que dirigeant d’institut de sondage, l’Ifop, et d’agence de communication au sein de DDB Groupe.

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Après l’adoption cette nuit par la Chambre des représentants de l’accord sur le relèvement du plafond de la dette, l’ultime étape qui devrait valider définitivement ce compromis est celle du vote du Sénat aujourd’hui. Les Etats-Unis pourront donc s’endetter encore davantage, à hauteur de 2 100 milliards de dollars supplémentaires, soit une dette autorisée, disons légale, de 16 400 milliards de dollars (pour rappel, la dette publique de la France - Etat + collectivités territoriales - s’élève à 1 650 milliards d’euros à la fin du premier trimestre 2011). Si cet accord n’était pas trouvé, les Etats-Unis se trouveraient techniquement en défaut de paiement face à une dette de 14 294 milliards de dollars pour 14 300 autorisés. Autrement dit, il fallait renégocier l’autorisation de découvert !

Si l’issue des débats ne faisait pas beaucoup de doute au pays du pragmatisme, c’est le contenu du compromis qui a été l’objet d’âpres négociations entre Démocrates et Républicains. L’occasion, surtout un an avant l’élection américaine (6 novembre 2012), d’un débat davantage politique qu’économique, dont le parti de Barak Obama sort perdant face à des Républicains davantage partisans de réduction des dépenses que d’augmentations des recettes fiscales comme le souhaitait Obama. Il en ressort un relèvement du plafond de la dette sans hausse d’impôts mais assorti d’un plan de réduction des dépenses publiques de 1 000 milliards de dollars dans un premier temps, complété par 1 500 milliards d’économies supplémentaires à trouver d’ici un an.

La fin d’un modèle ?

Mais surtout, nous retiendrons de cet épisode la fin du culte de l’Amérique toute puissante. La croissance américaine ne rebondit pas, plafonnant autour de 1,5 %, et plus préoccupant encore, le taux de chômage persiste à rester entre 9 et 10 %. L’Amérique est en panne, et peine à retrouver un nouveau souffle. Si nous étions déjà frappés par l’idée d’Etats européens en quasi faillite, et même si les situations ne sont pas comparables, il n’en demeure pas moins que depuis une semaine nous associons les mots « défaut de paiement » aux Etats-Unis, autrement dit au « Modèle » de l’économie libérale, qui est aussi le modèle dominant, à quelques nuances près, de l’économie mondiale. Cette idée des Etats-Unis en défaut de paiement passe presque inaperçue, alors qu’elle est vertigineuse. Cela ressemble à une histoire banale parce que nous sommes noyés dans ces sujets depuis la crise financière de 2008, que nous avons eu l’illusion de quitter dès 2009. La seule modestie que nous avions à l’époque, souvenez-vous, était de nous interdire de prononcer trop vite le mot « reprise ».

Et lorsque nous parlons du poids de la dette, nous parlons d’un poids lourd à porter pour nos enfants et petits-enfants, pour les générations futures, une manière d’appliquer le bien connu principe, hautement responsable, « après moi, le déluge ». Nous pensions repousser le problème aux calendes grecques (j’avoue, facile). La réalité est que nous vivons aujourd’hui un effet ciseau indéniable : le poids de la dette augmente, et les échéances se rapprochent. Ces enjeux, nous ne les refilerons pas aux suivants, nous les pensions loin, ils se sont en fait rapprochés de nous. Cet accord américain qui fait tant de bruit aujourd’hui est provisoire et ne résout rien sur le fond, il devra être renégocié en 2013, demain matin.

Nous banalisons car nous faisons un déni psychologique face à un problème crucial que nous ne savons pas traiter sauf à essayer de courir toujours plus vite, dans une course en avant qui devient une fuite, tentant de repousser les limites du monde fini. Comme le disait Paul Valéry (en 1945 !), « le temps du monde fini commence ». Ce monde fini n’est pas qu’écologique, il est aussi financier. D’ailleurs, à relire « Regards sur le monde actuel », il le disait déjà !

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