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Les inconvénients cachés de la proposition de Nicolas Sarkozy pour faire travailler plus les profs
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Élève Ducobu

Nicolas Sarkozy propose d'augmenter de 500 euros par mois le salaire des professeurs qui accepteraient d'être présents 26 heures hebdomadaires au lieu de 18 à l'école. Les enseignants peuvent-ils vraiment l'accepter ? Combien cela coûterait-il ?

Roger Célestin

Roger Célestin

Roger Célestin est journaliste.

Il écrit pour Atlantico sous pseudonyme.

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Passer, sur la base du volontariat, de 18 heures de cours à 26 heures de présence par semaine dans les collèges et les lycées, en contrepartie d’une augmentation de 25% du salaire... la proposition du candidat Nicolas Sarkozy ce mardi à Montpellier, concentre beaucoup d' inconvénients.

Il la justifie par un double argument : d’une part, améliorer le taux de présence des adultes dans les établissements, d’autre part améliorer la rémunération des profs.

Oui, cela renforcerait la présence des adultes, ce qui est indispensable et urgent. Et le fait que ces adultes soient des profs et non des surveillants redouble l’efficacité de la présence, en terme d’amélioration du climat des établissements. Mais cela ne suffit pas, loin de là.Le candidat n’a pas parlé de la transformation du métier d’enseignant qui justifierait leur présence renforcée, et qui représenterait une vraie perspective, un vrai projet d’envergure, auquel les enseignants, qui ont une haute idée de leur mission au service de la République, pourraient adhérer.

Quid du chiffrage de cette mesure ? L'UMP ne l'a pas encore précisé. Pourtant la question est d'importance. Si l'on se fie au récent sondage Le Monde/IFOP, 61% des enseignants refusent l'idée d'être davantage présents dans l'établissement. Par conséquent, 39% - soit 190 000 dans l'enseignement secondaire - pourraient être volontaires (puisque l'on compte 480 000 profs dans le secondaire). Le coût total pour le prochain quinquennat pourrait donc s'élever à 5,6 milliards d'euros. 

Par ailleurs, Nicolas Sarkozy commet une erreur psychologique étrange, qui était pourtant assez facile à éviter, en utilisant pour les enseignants les slogans et la communication prévus pour les commerçants, artisans et salariés. Car s’il est bien une catégorie professionnelle qui n’est pas motivée par l’argent, c’est bien celle des enseignants. Et s’il est bien une profession qui, dans sa grande majorité, travaille sans compter son temps, en moyenne 40 heures, et souvent bien plus, c’est bien celle-ci. Les profs doivent donc rire jaune quand ils entendent le candidat Sarkozy "assumer le choix de payer davantage ceux qui travaillent plus" et vouloir "récompenser le talent, récompenser le mérite, valoriser la réussite". 

Ce n’est donc pas avec une promesse d’augmentation que l’on décidera les enseignants à travailler autrement, leur présence renforcée dans les collèges et lycées étant la conséquence de cette nouvelle organisation. Entendre le responsable de leur principal syndicat, le SNES, est édifiant (ce mercredi sur France Info) : "Pourquoi être davantage dans les établissements ? Pour y faire quoi ?" demande-t-il, sans vergogne ! L’idée qu’il y ait, dans les collèges et lycées, des élèves en difficulté et que le travail d’un prof soit de s’occuper de ces élèves, n’effleure pas le SNES ! L’idée que cet échec du système, malgré l’engagement horaire et personnel des profs, soit du à des méthodes et une organisation collectives inadaptées, n’ébranle pas les certitudes du SNES.

Face à cela, Vincent Peillon a raison de rappeler que les trois fondamentaux des systèmes qui réussissent sont :

1) une école maternelle et primaire réussissant les apprentissages fondamentaux, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui avec 40% des élèves en difficulté lors de leur entrée en 6ème. C’est un énorme problème dont les conséquences sont comme une réaction en chaîne jusqu’aux 150 000 jeunes éjectés chaque année du système sans diplôme ni qualification,

2) des professeurs bien formés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Avant que Nicolas Sarkozy ne la supprime, la formation était de toute manière inadaptée aux besoins de l’école.

3) des troncs communs qui fonctionnent, et donc pas d’orientation précoce forcée vers des filières déconsidérées. Cela donne la colonne vertébrale du programme socialiste, avec la volonté de ne pas oublier l’enseignement professionnel.

Mais l’essentiel, c’est-à-dire, le « comment » du candidat socialiste, reste toujours aussi flou, notamment sur ce que les profs seraient prêts à changer dans leur mode de travail, de même que la manière de se dépêtrer de la promesse absurde des 60 000 postes supplémentaires.

Cette mesure du candidat Hollande a été chiffrée : le candidat estime qu'en fin de quinquennat, son coût sera de 1,7 milliards par an. L'UMP la chiffre à un montant total de 7,5 milliards d'euros sur l'ensemble du quinquennat, là où l'Institut Montaigne évoque plutôt 5,2 milliards d'euros. Dans le match des chiffrages, les deux candidats ne sont donc pas forcément les meilleurs élèves.

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