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Drivy lève 31 millions d’euros, BlaBlaCar s’impose… ce que les beaux succès de ces start-ups françaises coûtent aux acteurs traditionnels du secteur
©Reuters

Concurrence accrue

Drivy et BlaBlaCar constituent deux exemples de réussite de start-ups françaises ces dernières années. Par leur politique de prix, elles ont bousculé les acteurs traditionnels du secteur des transports, leur prenant certaines parts de marché, sans pour autant créer un nouveau marché comme elles l'affirment.

Christophe Benavent

Christophe Benavent

Professeur à Paris Ouest, Christophe Benavent enseigne la stratégie et le marketing. Il dirige le Master Marketing opérationnel international.

Il est directeur du pôle digital de l'ObSoCo.

Il dirige l'Ecole doctorale Economie, Organisation et Société de Nanterre, ainsi que le Master Management des organisations et des politiques publiques.

 

Le dernier ouvrage de Christophe Benavent, Plateformes - Sites collaboratifs, marketplaces, réseaux sociaux : comment ils influencent nos Choix, est paru en mai  2016 (FYP editions). 

 
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Atlantico : La start-up française Drivy vient de lever 31 millions d'euros en vue de son développement. Son succès,depuis sa création en 2010, s'inscrit dans la lignée de la réussite de Blablacar, et d'autres dans une moindre mesure. Ces start-ups françaises prennent-elles des parts de marché aux acteurs traditionnels des secteurs sur lesquels elles se positionnent ?

Christophe Benavent : C'est une question difficile, car il faudrait pouvoir définir précisément la notion de secteur : est-ce le transport en général? Les déplacements interurbains, qui définissent plutôt le champ d'action de Blablacar, ou le marché de la location d'automobiles stricto sensu pour Drivy. Au delà de cette prudence nécessaire, on peut donner quelques éléments de réponse. Pour Drivy l'enjeu est clairement de prendre place dans le marché de la location à courte durée qui représente un marché de l'ordre de 2,5 milliards d'euros et de l'ordre de 18 millions de locations dont la durée est d'environ 4 jours. 40% de ce marché est justifié par des motifs professionnel. On estime que 6,5  millions de Français ont eu recours à ce type de service. Drivy concerne à priori plutôt les utilisateurs dont le motif de déplacement est non-professionnel et par le prix peut largement concurrencer les loueurs traditionnels sur ce segment et représente aujourd'hui 1,5 million de jours de locations depuis 2010. Ce qui laisse des perspectives de développement importants. Mais à 30 euros, ont imagine facilement qu'il y a un potentiel au moins aussi important dans la population qui ne loue pas ordinairement. Pensons simplement aux vacances, et aux consommateurs qui sont partis en villégiature sans leur voiture ! Drivy peut contribuer certainement à l'extension de ce marché. Pour Blablacar les choses sont un peu différentes. C'est un substitut direct au train, notamment sur les trajets mal desservis par la SNCF : les liaisons interurbaines à distance moyenne, de l'ordre de 300 km et transversales. C'est aussi un marché qui arrive en phase de maturité. Même si on a peu de chiffre précis, l'examen des recherche google montre que depuis l'été dernier, il y a une stabilité du nombre de requête. Le pic a été atteint au cours de l'été 2015, il sera sans doute dépassé cet été.  Mais surtout depuis quelques mois, un nouvel acteur peut concurrencer directement Blablacar, c'est le car dont les prix sont tout à fait concurrentiel sur les desserte principales.

En proposant des tarifs beaucoup plus attractifs que les acteurs traditionnels, notamment en ce qui concerne la location de voitures (30 euros en moyenne par jour avec Drivy contre 80 euros en moyenne avec une agence de location traditionnelle), ces start-ups contributent-elles à la création d'un nouveau marché (constitué par des personnes n'ayant pas les moyens d'accéder à ces services dans leur forme traditionnelle) ? 

C'est difficile à apprécier. Pour Drivy oui clairement comme nous venons de le dire. Que ce soit pour le loisir où par nécessité ( ex : déménagement) à 30 euros la journée c'est une option nouvelle qui peut être envisagée par des personnes qui n'ont presque jamais loué de véhicule. Dans le cas de Blablacar c'est moins évident, dans la mesure où il y a des offres de transport à prix réduit que ce soit l'avion ou le train, et maintenant le Bus. L'avantage de Blablacar en terme de prix joue mois par son montant que par la disponibilité. Les billets à petit prix doivent être réservé à l'avance ou sont contingentés. C'est moins la conquête de nouveaux clients, que l'augmentation de la fréquence de déplacement qui est favorisé. Pensons aux étudiants qui pour ces raisons de prix et de commodités peuvent envisager de rentrer plus fréquemment chez eux. 

Quelles réponses ont mis en place les acteurs traditionnels face à l'arrivée de ces start-ups ? Ces acteurs traditionnels font-ils des marges importantes qu'il leur suffirait de rogner pour rester compétitifs ou cette concurrence les menace-t-elle plus sérieusement ?

La menace est sérieuse. Elle est installée pour Blablacar, future pour Drivy. La réponse du concurrent dans le Blablacar est double : elle passe par une gestion plus fine des tarifs promotionnels et des prix réduits (pour les jeunes par exemple), par le développement de solution low cost comme Ouigo et le bus comme Ouibus, et un effort de segmentation notamment géographique plus affirmé. Mais cela pose un problème de marge et de rentabilité des TGV, les taux élévé de remplissage étant plus difficile à atteindre, sauf à réduire le nombre de desserte, ce qui a l’inconvénient de rendre encore moins attractif ce mode de déplacement.  Dans le cas de location, la solution est esquissée par Avis qui a racheté Zipcar, et lance la marque en France, avec un service on demand. On peut tout à fait envisager dans les mois et année qui viennent un rachat par les grandes marques de location qui vont se réorganiser en offrant différentes marque pour différents types de services. Elle vont apprendre à faire avec une nouvelle segmentation des marchés.

Selon le CNPA (Conseil national des professions de l'automobile), le marché de la location de voitures représente 3% de l'ensemble des locations courte-durée. La tendance pour les mois et les années à venir s'annonce-t-elle à la hausse ? 

Oui la tendance est certainement à la hausse car la diversification des modèles de transport entre le covoiturage, la location on-demand, le développement des VTC, s'accompagne d'un élargissement de la flotte des véhicules utilisé pour ces services.

On remarque que les start-ups françaises les plus performantes (Drivy, BlablaCar) œuvrent dans le secteur des transports, qui est par ailleurs l'un des secteurs dans lesquels s'illustre l'industrie française traditionnelle. Doit-on y voir une perpétuation de la tradition française, y compris dans les secteurs innovants ? 

Dans le cas de Blablacar c'est évidemment, non pas la culture française, mais l'association de la géographie ( de grande villes séparée par de vaste zone à faible densité de population, la stratégie tout TGV de la SNCF qui néglige les trajets transversaux en rayonnant à partir de Paris, qui ont créer un besoin latent. La tradition française n'y est pour rien, elle est bien trop colbertiste. En revanche, on doit souligner qu'entre la frenchtech pour le monde des startup et Ouishare pour le collaboratif, une communauté très dynamique s'est créée dans le monde le l'entrepreneuriat, facilitant les transferts d'idées et légitimant ces entreprises. La grande faiblesse cependant est qu'on risque de voir ces startup passer sous contrôle de fonds d'investissement en capital risque étranger, bien sur américain. Les startup pour se développer ont besoin de liquidités. Une levée de fond de 31 millions peut sembler importante, elle l'est moins si on compagne à l'investissement que General Motor vient de faire dans lyft : 500 millions. Quand l'écosystème français lève 1 milliard d'euros par trimestre, c'est 6 milliards qui est levé aux états-unis ces dernières années. Dans ce type de service la taille compte, il faut avoir la capacité à s'internationaliser très rapidement en rachetant les concurrents sur les marchés nationaux européen.

Le prochain ouvrage de Christophe Benavent, Plateformes - Sites collaboratifs, marketplaces, réseaux sociaux : comment ils influencent nos Choix, (FYP editions, 2016), paraîtra le 16 mai prochain. 

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